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Ilhan Sami Çomak - Livres comme l'Air

PORTRAIT DE L'AUTeur

Arrêté en 1994 alors qu’il étudiait la géographie à l'Université d'Istanbul, İlhan Sami Çomak a été torturé pendant 19 jours avant de signer une fausse confession l'accusant d'avoir déclenché des incendies pour le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Bien que blanchi de cette accusation, il a été condamné en 2000 à la réclusion à perpétuité pour séparatisme par un tribunal de sécurité de l'État. En 2007, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a conclu que son droit à un procès équitable avait été violé, mais il reste emprisonné depuis lors, malgré un nouveau procès en 2014. Sa libération conditionnelle, prévue en août 2024, lui a été refusée par le comité de libération, invoquant un manque de remords malgré une vie consacrée à la poésie. Lauréat de prix prestigieux, membre honoraire de plusieurs centres PEN, Çomak est soutenu par PEN Norvège et d'autres centres qui surveilleront l’audience prévue fin novembre 2024 pour réexaminer sa libération.

Signez la pétition pour demander que sa libération soit effective et immédiate !

Jumelé à Félix Villeneuve

Félix Villeneuve est un écrivain et poète québécois originaire de Rouyn-Noranda. Diplômé en Études anciennes à l’Université Laval, il y termine actuellement une maîtrise en Études littéraires. Il est récipiendaire du Prix littéraire jeunesse 2004 des éditions Vents d’Ouest. Son recueil de nouvelles, L’Horloger (XYZ), est paru en 2014, et son premier roman, Plomb (Stanké), en 2018. Impliqué depuis 2015 au Centre québécois du P.E.N. international, il est nommé président de l’organisme en 2023. En parallèle au monde de l’écriture, il œuvre dans l’enseignement et le tutorat du français et de la littérature.

Autres informations

Retrouvez Félix Villeneuve au Salon du Livre de Montréal, qui se tiendra du 27 novembre au 1er décembre 2024 au Palais des congrès de Montréal. 

EN SAVOIR PLUS

Très cher Ilhan Sami Çomak,

Je t’écris du Québec. Cette lettre, je la lirai plus tard sur une petite scène du Salon du livre de Montréal, devant des écrivains, des poètes, des lecteurs et des curieux venus assister à un événement lors duquel des écrivains comme moi servent de conduit à des écrivains comme toi.

Cher Ilhan, dans ton poème Özgürlük [Liberté], tu dis : « Connaissez-moi par mon amour, non par ma solitude. /Comprenez-moi par ce dont je rêve, non par ce que j’ai perdu. ». Par ta poésie, par ton rêve, tu touches déjà le monde. Les grands espaces embrumés, les forêts denses agrippées au roc, les rivières, les lacs gelés aux craquements sourds par les nuits d’hiver, les collines échevelées où accoste parfois une lune parfaitement ronde. En certains lieux, on rencontre à tout hasard un renard, une perdrix, une belette, et on s’accroupit pour les observer un moment. Le Québec est un tel endroit. J’espère être parvenu à recueillir dans ma plume un échantillon suffisamment convainquant pour pétiller le papier, un moment, devant tes yeux. 

Tu es arrivé à l’écriture en 1994, après ton arrestation. C’est une drôle de coïncidence, tu sais : je suis arrivé, moi aussi, à l’écriture en 1994. Autres circonstances, autre maturité, certainement, puisque j’étais encore un enfant, mais le désir de liberté y était assurément. Écrire non pas pour fuir le réel (car le réel, toujours, nous rattrape), mais plutôt pour redéfinir ce réel, pour réinventer notre relation avec lui, pour trouver le moyen, à travers les mots, de nous répandre au-delà de l’immédiat, comme un fluide étrange, une source qui chercherait la pente à prendre pour rejoindre l’océan. Et chaque mot est une goutte supplémentaire dans la rigole, et chaque poème est une cascade, et bientôt (c’est étrange n’est-ce pas ?) on prend conscience que d’autres sources et d’autres ruisseaux s’y joignent, que quelque chose s’est mis en branle, par l’écriture, et que ce que nous avons créé existe puissamment non plus simplement dans les mots que nous mettons sur le papier, mais bien au-delà, dans un lieu étrange où va puiser toute l’humanité. Un lieu sans frontière, sans normes, sans maître. Un lieu de toutes les libertés.

J’espère que tu recouvreras bientôt ta liberté physique. En attendant, permets-moi d’ajouter ces quelques gouttes à ta rivière ; un bien humble cadeau pour un frère qui rêve de liberté.

Sincères amitiés,

Félix Villeneuve

Écrivain

Président de PEN Québec

LIVRES COMME L'AIR

Dans le cadre du projet Livres comme l’Air, des écrivain·e·s québécois témoignent leur solidarité à des écrivain·e·s emprisonnés ou menacés à travers le monde en leur rédigeant des dédicaces. 

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