Un désolant « accord de paix » risque d’aggraver les violations et d’entériner l’impunité
Le désolant ensemble de propositions du gouvernement de Donald Trump qui viole le droit international et prive davantage encore de leurs droits les Palestiniens ne peut que conduire à une multiplication des souffrances et des atteintes aux droits humains en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, a déclaré Amnistie internationale le 28 janvier.
L’organisation a exhorté la communauté internationale à rejeter les mesures enfreignant le droit international qui figurent dans le soi-disant « accord du siècle » de Donald Trump. Elles comprennent l’extension formelle de la souveraineté d’Israël sur la vallée du Jourdain et la grande majorité des colonies de peuplement illégales dans le reste de la Cisjordanie occupée en échange de terres se trouvant actuellement en Israël.
« Si le gouvernement de Donald Trump souligne le principe de l’échange de terres dans son accord, il ne faut pas se laisser leurrer : ce qui est proposé, c’est une extension de l’annexion des territoires palestiniens, ce qui constituerait une violation flagrante du droit international humanitaire. Durant plus de cinquante années d’occupation, Israël a imposé, sous son régime, un système de discrimination institutionnalisé contre les Palestiniens, qui prive ces derniers de leurs droits fondamentaux et d’un accès à des recours efficaces pour les violations qu’ils subissent. Cet accord revient à entériner ces politiques violentes et illégales », a déclaré Philip Luther, directeur de la recherche et des actions de plaidoyer pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnistie internationale.
L’échange de terres proposé comprend l’éventuel transfert de zones israéliennes où les Palestiniens représentent une forte proportion des habitants, à un futur État palestinien. Cela incite à craindre que les Palestiniens de nationalité israélienne vivant dans ces zones ne soient privés de leurs droits.
Amnistie internationale demande à la communauté internationale de rejeter les propositions d’annexion, qui violent le droit international, et de réaffirmer le caractère illégal des colonies israéliennes dans les territoires occupés. Ces propositions ne modifieront pas les obligations juridiques qui s’imposent à Israël en tant que puissance occupante, au titre du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains, et ne priveront pas les Palestiniens des protections garanties par ce cadre juridique.
Cet accord comprend également des propositions pour la création d’un « mécanisme de compensation » pour les réfugiés palestiniens, au lieu de leur accorder leur droit au retour. On dénombre actuellement plus de 5,2 millions de réfugiés palestiniens enregistrés, qui représentent ainsi l’une des plus nombreuses populations de réfugiés au monde. Les Palestiniens qui ont fui ou été chassés de chez eux en 1948, ainsi que leurs descendants, disposent du droit au retour, au regard du droit international. Il s’agit d’un droit fondamental individuel qui ne peut pas être cédé à titre de concession politique.
« Des centaines de milliers de réfugiés palestiniens sont bloqués dans des camps surpeuplés, plus de 70 ans après qu’eux-mêmes, leurs parents ou leurs grands-parents ont été chassés de chez eux. Cette proposition ne tient pas compte des droits dont disposent les réfugiés au titre du droit international ni des dizaines d’années de souffrances qu’ils ont endurées », a déclaré Philip Luther.
Pour finir, l’accord cherche à saper la justice internationale peu après l’annonce, le mois dernier, d’avancées en direction d’une enquête menée par la Cour pénale internationale sur la situation dans les territoires palestiniens occupés. Il insiste sur le fait qu’au cours de toute négociation, les autorités palestiniennes ne doivent engager « aucune action, et [doivent] abandonner toutes les actions en instance, contre l’État d’Israël, les États-Unis et leurs citoyens quels qu’ils soient, devant la Cour internationale de justice, la Cour pénale internationale et tout autre tribunal ».
En décembre 2019, la procureure de la Cour pénale internationale a annoncé qu’un examen préliminaire de la situation en Palestine avait conclu que des crimes de guerre avaient été commis dans les territoires palestiniens occupés et qu’une enquête devra être ouverte une fois que la compétence territoriale de la Cour aura été confirmée.
L’accord exige également que l’Autorité palestinienne n’engage « aucune action contre aucun citoyen israélien ou des États-Unis devant Interpol ou tout système juridique non israélien ou américain (selon le cas) ». Cela vise de manière flagrante à empêcher les Palestiniens de demander justice devant les tribunaux nationaux de pays tiers en recourant à la compétence universelle, qui est un outil fondamental de la justice internationale.
« Une paix juste et durable nécessite un plan accordant la priorité aux droits humains des Palestiniens et des Israéliens, et doit comprendre la justice et des réparations pour les victimes de crimes de guerre et d’autres graves violations. Ce plan ne remplit aucune de ces conditions fondamentales, et il cherche en outre à saper les initiatives en cours visant à ce que justice soit rendue aussi bien pour les Palestiniens que pour les Israéliens », a ajouté Philip Luther.
Complément d’information
Le président Donald Trump a rendu public aujourd’hui son « accord de paix », qui se présente sous la forme d’une proposition de 180 pages intitulée Peace to prosperity (« De la paix à la prospérité »), affirmant qu’il représentait une « solution réaliste à deux États » déjà acceptée par Israël en tant que base de négociation avec les Palestiniens. Ce plan a été conçu sans aucune participation des dirigeants palestiniens.
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