Les autorités doivent ouvrir une enquête impartiale sur la répression des manifestations
Les autorités colombiennes doivent mettre un terme à la répression du mouvement de revendication sociale et au recours excessif à la force contre celles et ceux qui manifestent, en assurant le respect des droits fondamentaux de toutes et de tous, et veiller à ce que toute action engagée soit conforme au droit international relatif aux droits humains.
« Au lieu de répéter les tristes scènes de répression brutale auxquelles nous assistons depuis quelques mois dans une grande partie de la région, le gouvernement du président Iván Duque doit garantir le droit légitime de chacun à manifester pacifiquement », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice d’Amnistie internationale en charge des Amériques.
« Les autorités colombiennes doivent mettre fin à la brutale répression des manifestations, et notamment au recours excessif à la force et à la détention arbitraire. »
Amnistie internationale estime que la « grève nationale » porte des revendications légitimes en matière de droits humains, exprimées par divers secteurs de la société colombienne. Le nombre de personnes qui se sont retrouvées dans la rue pour manifester pacifiquement témoigne de la montée du mécontentement social face à l’attitude des autorités à l’égard des droits humains et de la grave situation dans laquelle se trouvent leaders de la société civile et défenseur·e·s des droits fondamentaux dans ce pays.
Amnistie internationale a pu visionner un certain nombre de vidéos confirmant que les forces de sécurité colombiennes avaient recours à la force de manière excessive, disproportionnée et inutile, ce qui constitue une violation des droits humains de la part des pouvoirs publics. L’organisation a pu voir des images montrant un membre de l‘escadron mobile anti-émeutes (ESMAD) frappant délibérément une manifestante d’un coup de pied au visage. Elle a également pu constater sur de nombreuses vidéos que les forces de sécurité avaient tiré des grenades lacrymogènes directement sur des manifestants. Des membres de l’ESMAD ont notamment agi de la sorte à une reprise au moins face à des manifestants qui se tenaient tous mains baissées et criaient « non à la violence ». Amnistie internationale a également visionné des images montrant trois membres de la police métropolitaine de Bogotá tirant une femme par les cheveux, puis frappant une personne dans la rue sans la moindre justification apparente. Elle a par ailleurs authentifié une autre séquence filmée, dans laquelle on voit des motards de la police métropolitaine de Bogotá s’en prendre à un individu sans raison apparente, ainsi que des images montrant des membres de la police montée attaquer une personne qui ne réagissait même plus, étant donné les coups qu’elle avait reçus.
La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a dénoncé l’arrestation d’au moins 112 manifestants et un recours excessif à la force de la part de l’ESMAD, qui aurait fait 40 blessés. De même, la CIDH a rappelé à l’État colombien que l’action de la police et des forces de sécurité devait se concentrer sur le contrôle des actes de violence, dans le souci de garantir l’exercice du droit à manifester, sans répression directe ni arrestation arbitraire des personnes manifestant pacifiquement.
Plusieurs jours avant la grève nationale, le gouvernement avait déjà lancé une campagne d’intimidation et de peur en direction de la population, qui projetait de défiler pacifiquement pour revendiquer ses droits. Un certain d’acteurs de la société civile ont dénoncé des perquisitions menées par la police en violation de la procédure légale, en différents endroits du pays.
Le domicile de plusieurs dirigeants de la société civile soutenant la grève aurait également été perquisitionné. Plusieurs de ces opérations ont été déclarées illégales par la justice.
Nous prions instamment les autorités de mettre immédiatement un terme à la répression, en donnant des ordres précis aux forces de sécurité afin qu’elles fassent preuve de la plus grande retenue dans le recours à la force – un recours qui ne doit se faire que de manière progressive, proportionnée et différenciée, conformément aux normes internationales. En outre, la justice civile et ordinaire doit enquêter sur la responsabilité des personnes qui ont réprimé les manifestations, en commettant des violations des droits humains, y compris celles qui ont ordonné ces dernières, les ont approuvées ou les ont passées sous silence.
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