La haute-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU souligne l’urgence d’une enquête internationale impartiale sur les atrocités au Tigré
Les Nations unies doivent immédiatement ouvrir une enquête sur les allégations faisant état de graves violations commises dans le cadre du conflit en cours dans la région du Tigré, y compris de possibles crimes de guerre et crimes contre l’humanité, a déclaré Amnistie internationale à la suite d’un communiqué de presse publié par la haute-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme jeudi 4 mars.
Ce communiqué précède de peu une discussion informelle programmée par le Conseil de sécurité de l’ONU au sujet de la crise au Tigré.
Le communiqué de la haute-commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet fait écho à la demande d’Amnistie internationale en faveur d’une enquête menée par l’ONU. Il mentionne des « allégations crédibles et persistantes faisant état de graves violations au Tigré ». Sa publication a lieu moins d’une semaine après qu’Amnistie internationale et CNN ont respectivement publié des informations sur des massacres qui auraient été commis par l’armée érythréenne à Aksoum et Maryam Dengelat.
L’enquête d’Amnistie internationale a conclu que le massacre de centaines de civils perpétré par des soldats érythréens à Aksoum fin novembre 2020 s’apparentait à un crime contre l’humanité. L’organisation estime en outre que les forces éthiopiennes pourraient être responsables de crimes de guerre. Lors d’une précédente enquête, elle a recueilli des témoignages accusant des forces affiliées au Front de libération des peuples du Tigré (TPLF) d’avoir commis un massacre à Mai-Kadra, susceptible d’être un crime de guerre.
« Le communiqué de la haute-commissaire insiste sur la gravité des crimes qui semblent être commis en ce moment même par toutes les parties au conflit en cours au Tigré, et sur l’urgence d’une action immédiate des Nations unies. Celles-ci doivent diligenter une enquête internationale et impartiale afin de suivre la situation et d’en rendre compte, ainsi que de recueillir et de conserver des preuves des crimes commis par toutes les parties, a déclaré Sarah Jackson, directrice adjointe du programme Afrique de l’Est, Corne de l’Afrique et région des Grands Lacs d’Amnistie internationale.
« Au vu de la complexité et de la gravité de la situation, il faut de toute urgence une enquête menée sous l’égide des Nations unies, plutôt qu’une enquête conjointe avec les institutions éthiopiennes, afin d’établir la vérité et de poser les bases du respect de l’obligation de rendre des comptes. Il n’y a pas de temps à perdre – le travail sur ce sujet doit débuter maintenant, avant que des preuves soient détruites et que les souvenirs commencent à s’effacer. »
Dans son communiqué, Michelle Bachelet souligne la nécessité d’un « examen objectif et indépendant » de la situation. Selon elle, « l’analyse préliminaire des informations reçues indique que de graves violations du droit international, pouvant constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, pourraient avoir été commises par de multiples parties au conflit, dont les Forces de défense éthiopiennes, le Front de libération des peuples du Tigré, l’armée érythréenne, la Force spéciale d’Amhara et les milices affiliées ».
Amnistie internationale a accueilli avec satisfaction les demandes de la haute-commissaire pour que d’autres observateurs indépendants des droits humains soient autorisés à accéder à la région du Tigré « en vue de constater les faits et de contribuer à l’établissement des responsabilités ». L’organisation a demandé l’autorisation de se rendre au Tigré le 3 décembre 2020 et attend encore une réponse des autorités.
Une séance à huis clos au Conseil de sécurité
Le communiqué de Michelle Bachelet a été publié quelques heures avant une discussion informelle du Conseil de sécurité des Nations unies consacrée à la crise des droits humains et la crise humanitaire au Tigré.
« Quatre mois après le début de l’une des pires crises humanitaires et crises des droits humains dans la région du Tigré, ce conflit n’a toujours pas été ajouté à l’ordre du jour officiel du Conseil de sécurité. Il faut que cela change, a déclaré Sarah Jackson.
« Nous appelons à nouveau les États membres de l’ONU à ouvrir une enquête sur cette situation pendant la session en cours du Conseil des droits de l’homme. »