• 14 avr 2020
  • Inde
  • Communiqué de presse

La répression de la dissidence continue durant la pandémie de COVID-19

Réagissant à l’information selon laquelle Anand Teltumbde et Gautam Navlakha, deux défenseurs des droits humains, se sont livrés à l’Agence nationale d’investigation après que la Cour suprême indienne le leur a ordonné, Avinash Kumar, directeur exécutif d’Amnistie internationale Inde, a déclaré :

« La répression de la dissidence en Inde se poursuit. Même durant une pandémie, le gouvernement indien s’en prend aux personnes qui critiquent les autorités. Lorsque les droits à la liberté d’expression et de manifestation pacifique, acquis de haute lutte, sont affaiblis, tout le monde est perdant. »

« Ces deux dernières années, ces militants ont été victimes d’une campagne de diffamation les accusant de travailler contre les intérêts de l’Inde, et essayant de saboter le travail crucial qu’ils mènent depuis des années afin de mettre en lumière des cas d’injustice. Ces arrestations s’inscrivent dans la politique de répression visant les personnes critiquant l’État. Cela inclut des défenseur·e·s des droits humains, des journalistes et des militant·e·s du droit à l’information, qui ont été menacés, harcelés et agressés pour avoir essayé d’amener l’État à rendre des comptes. L’État recourt par ailleurs à la détention provisoire comme outil de répression face à la dissidence. »

 

Complément d'information

Gautam Navlakha, 65 ans, journaliste basé à Delhi, était le secrétaire de l’Union populaire pour les droits démocratiques, et est conseiller en rédaction pour le journal Economic and Political Weekly. Il a écrit sur les violations des droits humains dans l’État de Jammu-et-Cachemire, et est un adversaire déclaré des lois répressives.

Anand Teltumbde a beaucoup écrit sur le système des castes en Inde et défend les droits des dalits (opprimés). Dans ses articles, il a critiqué le gouvernement de Narendra Modi, en particulier en ce qui concerne le système d’aide sociale et la persécution des défenseur·e·s des droits humains dans le pays.

Anand Teltumbde et Gautam Navlakha ont été inculpés pour leur implication présumée dans les émeutes de Bhima Koregaon, en vertu de diverses dispositions du Code pénal indien, ainsi que de la Loi sur la prévention des activités illicites. Si cela débouche rarement sur une condamnation, la Loi sur la prévention des activités illicites est régulièrement invoquée contre des personnes ayant simplement exprimé des opinions dissidentes, souvent en l’absence d’éléments prouvant qu’elles ont incité ou recouru à la violence, ou assisté à des organisations interdites, ce qui donne lieu à une détention prolongée avant ou pendant leur procès.

Le 17 mars 2020, la Cour suprême indienne a refusé d’accorder une libération sous caution par anticipation à Anand Teltumbde et Gautam Navlakha en relation avec cette affaire, et leur a ordonné de se livrer à la police de la ville de Pune dans les trois semaines. Anand Teltumbde est un universitaire et un militant. Le journaliste Gautam Navlakha mène lui aussi une action militante. Ces deux hommes ont été nommés par la police aux côtés de neuf autres militant·e·s pour leur rôle présumé dans les émeutes de 2018 à Bhima Koregaon.

En 2018, dans le cadre d’une opération de répression de grande ampleur contre les défenseur·e·s des droits humains en Inde, neuf militant·e·s de premier plan - Sudha Bharadwaj, Shoma Sen, Surendra Gadling, Mahesh Raut, Arun Ferreira, Sudhir Dhawale, Rona Wilson, Vernon Gonsalves et Varavara Rao - ont été arrêtés par la police de Pune. La police affirme que ces neuf personnes ont pris part aux violences ayant éclaté entre dalits et nationalistes hindous en janvier 2018 à Bhima Koregaon, dans l’État du Maharashtra.

Après les arrestations de 2018, une campagne de dénigrement a été menée contre ces militant·e·s. Le gouvernement affirme qu’ils sont hostiles à la nation et travaillent contre les intérêts du pays. L’opinion des populations auprès desquelles ces militant·e·s oeuvrent est cependant tout à fait différente. Ces personnes les saluent pour leur courage et pour leur engagement en faveur des groupes les plus pauvres et marginalisés du pays, comme les dalits et les adivasis (aborigènes).

Le 25 janvier 2020, l’Agence nationale d’investigation a repris les rênes des enquêtes relatives à l’affaire de Bhima Koregaon, confiées jusqu’alors à la police de l’État du Maharashtra. Cela est survenu après que le nouveau gouvernement de l’État du Maharashtra a soulevé quelques questions au sujet des enquêtes menées par la police, et demandé que plusieurs policiers soient interrogés sur la conduite de celles-ci. Nombreux sont celles et ceux qui considèrent que le transfert du dossier à l’Agence nationale d’investigation est lié à la campagne de répression actuellement menée par le gouvernement de Narendra Modi contre les défenseur·e·s des droits humains dans le pays.

 

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