Les accusations de sédition servent à faire taire les détracteurs
En réaction aux informations selon lesquelles la police nationale des Philippines a porté plainte contre 36 personnalités de haut rang pour sédition et autres accusations liées, Butch Olano, responsable d’Amnistie internationale Philippines, a déclaré :
« Le timing et les personnes visées par cette plainte présentent les caractéristiques du harcèlement judiciaire. Juste après la décision de l’ONU d’examiner les milliers d’homicides commis dans le cadre de la violente campagne antidrogue menée par le gouvernement, les autorités semblent vouloir porter de fausses accusations contre des détracteurs bien connus au niveau national.
« Cette plainte illustre la façon dont des lois draconiennes telles que celle sur la sédition sont mises en œuvre de manière arbitraire pour réduire au silence ceux qui critiquent le gouvernement. À moins que les autorités des Philippines puissent produire des preuves crédibles pour étayer cette longue liste de suspects, cette plainte devrait être rejetée d’emblée. »
Complément d’information
Le 18 juillet, le Service d'enquêtes criminelles et de détection des crimes de la police (PNP-CIDG) a porté plainte pour sédition contre 36 personnes, dont la vice-présidente Leni Robredo, la sénatrice Leila de Lima, qu’Amnistie internationale considère comme une prisonnière d’opinion, le sénateur Risa Hontiveros, les ex-sénateurs Antonio Trillanes IV et Bam Aquino, des évêques catholiques et des prêtres, des avocats et d’autres personnalités publiques.
Dans le cadre de cette plainte, les personnes visées sont accusées de sédition, incitation à la sédition, diffamation et entrave à la justice, et d’avoir engagé Peter Joemel Advincula, alias Bikoy, pour « diffuser des mensonges à l’égard du président, de sa famille et de ses proches collaborateurs, les faisant passer pour des protecteurs du trafic illicite de stupéfiants ».
En avril 2019, un mois avant les élections nationales de mi-mandat, une série de vidéos appelées les « vidéos Bikoy » ont été diffusées en ligne, relatant l’implication présumée du président Rodrigo Duterte et de sa famille dans le trafic de drogue. Peter Joemel Advincula était le narrateur de ces cinq vidéos.
Ce n’est pas la première fois que des inculpations sont prononcées contre des détracteurs du gouvernement, particulièrement contre ceux qui s’opposent à la « guerre contre la drogue » que mène le gouvernement de Rodrigo Duterte. La sénatrice Leila de Lima, qu’Amnistie internationale a adoptée en tant que prisonnière d’opinion, est incarcérée depuis trois ans pour des accusations liées aux stupéfiants. Le sénateur Antonio Trillanes IV, lui aussi virulent critique de Rodrigo Duterte, est actuellement en liberté sous caution après avoir été arrêté pour diffamation et rébellion, dans le cadre d’une affaire remise au goût du jour après que le président eut révoqué son amnistie. Le site d’information sur Internet Rappler, sa directrice exécutive Maria Ressa, ses directeurs et un ancien chercheur sont tous poursuivis devant les tribunaux dans le cadre d’au moins neuf affaires.