Les déclarations d’un ministre minimisant les attaques contre les personnes albinos alimentent ces actes
Les remarques du ministre de la Sécurité intérieure, selon lesquelles les attaques visant des personnes albinos n’ont pas atteint un niveau critique, ne peuvent qu’enhardir les auteurs de tels actes et soulignent de façon inquiétante l’inaction du gouvernement sur ce problème, a déclaré Amnistie internationale jeudi 21 février.
Le Malawi connaît une résurgence des attaques commises contre les personnes porteuses d’albinisme, dont deux ont été tuées et trois enlevées depuis le 31 décembre 2018. Deux des victimes d’enlèvement ont été sauvées par des habitants, mais la troisième n’a pas été retrouvée.
« Les dernières déclarations du ministre Nicholas Dausi montrent une nouvelle fois que les personnes albinos vivant au Malawi ne peuvent compter que sur elles-mêmes pour leur sécurité, a déclaré Muleya Mwananyanda, directrice régionale adjointe pour l’Afrique australe à Amnistie internationale.
« Depuis des années, ces personnes sont à la merci de bandes criminelles qui les attaquent pour vendre des parties de leur corps. La récente hausse du nombre d’actes de ce type prouve que le gouvernement, malgré les modifications de la Loi relative à l’anatomie et du Code pénal visant à assurer des peines plus sévères pour leurs auteurs, n’a pas tenu ses engagements de protection des albinos. »
Les dernières attaques
Dans la soirée du 31 décembre, huit personnes sont entrées par effraction au domicile de Yasin Phiri, un homme albinos de 54 ans, à Kande (district de Nkhata Bay), pendant son sommeil. Elles l’ont alors saisi avant de le tuer avec brutalité sous les yeux horrifiés de son fils de neuf ans, George.
Selon des témoins, cette bande criminelle a tranché les deux bras de Yasin Phiri, arraché ses dents du bas, coupé ses organes génitaux et prélevé un de ses poumons.
Dans une autre affaire, six hommes masqués se sont introduits chez Goodson Makanjira, âgé de 14 ans, le 13 février. Son corps a été retrouvé dans la rivière Dyamphi à Dedza, à 85 km au sud de Lilongwe. Ses agresseurs avaient prélevé ses dents, ses mains et ses organes génitaux.
Le 22 janvier, la petite Eunice Nkhonjera, âgée d’un an et demi, a été enlevée chez elle, dans le village de Lulanga (district de Karonga, région Nord). Elle et sa mère, Loveness Nkhonjera, dormaient quand des inconnus ont forcé la porte et se sont introduits dans leur maison en pleine nuit. Sa mère s’est réveillée vers 4 heures du matin et s’est aperçue que sa fille avait disparu. Eunice n’a pas encore été retrouvée. Deux autres enlèvements ont été contrés par des habitants.
« Les autorités doivent enquêter dans les meilleurs délais de manière approfondie et efficace sur les récentes attaques visant des personnes albinos et veiller à ce que les auteurs présumés soient traduits en justice dans le cadre de procédures équitables pour ces actes épouvantables. Les personnes porteuses d’albinisme ne peuvent pas continuer de vivre dans la peur dans leur propre pays. »
Complément d’information
Amnistie internationale a constaté et dénoncé dans un rapport une vague sans précédent d’homicides et d’autres atteintes aux droits fondamentaux visant des personnes albinos, victimes d’enlèvements et de vols notamment, au Malawi depuis novembre 2014.
Les personnes albinos sont visées en raison de croyances, selon lesquelles certaines parties de leur corps ont des pouvoirs magiques. On estime que la population d’albinos au Malawi est actuellement comprise entre 7 000 et 10 000 habitants, ce qui représente 1 personne sur 1 800.