• 24 oct 2024
  • Canada
  • Communiqué de presse

Canada. Annonce de la tenue du Tribunal permanent des peuples - Âcimowin

Un tribunal international enquêtera sur les crimes présumés commis contre les enfants autochtones dans les pensionnats canadiens.

Le Foyer pour femmes autochtones de Montréal (FFAM), en partenariat avec Amnistie internationale Canada francophone (AICF), accueillera le Tribunal permanent des peuples (TPP) sur les enfants disparus et les tombes anonymes au Canada, prévu pour le début de 2026. Ces organisations sont à la tête d'un effort international urgent visant à exiger une reddition de comptes pour les crimes présumés commis contre les enfants autochtones dans les pensionnats canadiens. 

En tant que tribunal d'opinion international, le TPP est un puissant mécanisme de justice populaire qui permet de sensibiliser l'opinion mondiale, de documenter toute l'étendue des crimes commis et de constituer un dossier international de preuves. 

Depuis plus d'un siècle, les communautés autochtones subissent de graves violations des droits humains, notamment des violences systémiques, des discriminations, des déplacements et un effacement culturel, de la part du gouvernement canadien et d'autres institutions. Malgré l’importance de la Commission de vérité et réconciliation, la grande majorité des 94 appels à l'action énumérés dans le rapport de 2015 ont été ignorés ou n'ont pas été mis en œuvre à ce jour. Les récentes découvertes de tombes anonymes à proximité de pensionnats ont mis à nu l'atroce héritage colonial de ces institutions. 

Le FFAM et AICF veulent une reddition de comptes, non seulement une rhétorique sur la réconciliation. Pour se faire, les deux organisations accueillent le Tribunal permanent des peuples pour soutenir une enquête internationale sur ces crimes présumés, et pour offrir un nouveau levier puissant pour les communautés autochtones et leurs alliés qui travaillent à faire en sorte que les gouvernements canadiens et leurs institutions rendent des comptes. 

« Les Autochtones ne peuvent plus attendre que le Canada agisse. Les familles autochtones réclament la justice, et non plus des paroles creuses », déclare Naʼkuset, directrice générale du Foyer pour femmes autochtones de Montréal. « Notre histoire a été dévalorisée par le colonisateur, mais notre vérité sera dite. Le temps est venu d’agir, et le Tribunal permanent des peuples sera porteur de la construction d'un avenir meilleur pour la prochaine génération. Début 2026, il y aura Âcimowin – une histoire vraie, un véritable compte rendu ». 

« Pendant trop longtemps, les communautés autochtones du Canada ont été laissées seules face à cette profonde injustice », ajoute France-Isabelle Langlois, directrice générale de l'AICF. « Nous sommes solidaires des communautés autochtones dans leur appel au changement systémique, à la responsabilité et à la justice. C'est ainsi que nous faisons la lumière, à l’échelle internationale, sur les atteintes aux droits humains commises par le Canada à l'encontre des Peuples autochtones. » 

 

Prochaines étapes : 

Dans la période précédant le Tribunal, le FFAM et AICF travailleront en étroite collaboration avec les survivant·e·s des pensionnats et leurs familles, des expert·e·s, des avocat·e·s spécialisé·e·s en droit internationale des droits humains, des cliniques juridiques, des archivistes, des historien·e·s et des militant·e·s pour recueillir des preuves et des témoignages qui permettront de constituer un dossier solide et légitime sur les crimes qui auraient été commis. Cette étape sera suivie par des séances publiques du Tribunal, au cours desquelles des témoignages et des arguments seront présentés. Le jury du Tribunal présentera son avis consultatif quelques mois plus tard. 

 

À propos du Tribunal permanent des peuples (TPP)

Le Tribunal permanent des peuples (TPP) est un tribunal d'opinion international créé en 1979 à Bologne, en Italie, à la suite de l’adoption de la Déclaration universelle des droits des peuples (1976). Il opère depuis Rome et est composé de 66 membres internationalement reconnus. Les origines du TPP remontent au Tribunal Russell de 1966 qui a enquêté sur les crimes de guerre commis par les États-Unis au Viêt Nam. 

Depuis sa création, le TPP a tenu plus de 50 sessions dans le monde entier, se concentrant sur un large éventail de violations des droits humains, y compris les droits des peuples, la justice environnementale, les droits du travail, les luttes pour l'autodétermination et les impacts de la mondialisation. Il joue un rôle unique en amplifiant les voix marginalisées et en recherchant la justice là où les institutions juridiques formelles ont failli à la tâche. 

Tribunal permanent des peuples : https://permanentpeoplestribunal.org/?lang=en  

Objectif et pouvoir du TPP 

Le TPP offre aux survivant·e·s, aux familles, aux défenseur·e·s des droits humains et aux communautés un forum où présenter des preuves, de témoigner et d'être entendus lorsque d'autres instances les ont laissés tomber. Son pouvoir ne réside pas dans l'autorité légale mais dans l'intégrité de son processus, la participation active des communautés affectées et la nature publique des procédures. Les conclusions et les recommandations du Tribunal sont consultatives, mais elles sont reconnues pour leur analyse juridique approfondie et ont le potentiel d'influencer le droit international, de façonner le discours et d'habiliter les mouvements populaires. 

Le Tribunal adapte sa structure en fonction des objectifs de chaque session et fonctionne comme une forme de justice de proximité. Il est conçu pour donner une voix à ceux et celles dont les droits ont été violé·e·s, en particulier dans les situations où les voies juridiques formelles n'ont pas fourni de recours adéquat. Les conclusions du Tribunal ont été citées dans d'importants rapports sur les droits humains et utilisées comme preuves dans le cadre de recherches universitaires et d'actions de plaidoyer. Bien que le TPP ne puisse pas faire appliquer ses décisions, il joue un rôle essentiel dans la sensibilisation, la responsabilisation des institutions et la promotion d'une action globale. 

Déroulement d'une session du TPP 

1. Demande et vérification : 

Le TPP reçoit des demandes de la part de mouvements, d'associations ou de communautés souhaitant qu’une enquête soit menée. Il vérifie l'autonomie des demandeurs et leur conformité avec son mandat. 

2. Enquête préliminaire: 

Le Tribunal mène une enquête indépendante sur l'affaire, en rassemblant des preuves et en convoquant des groupes d'expert·e·s. 

3. Séances publiques: 

Le TPP tient des audiences publiques au cours desquelles les témoignages de victimes, de témoins et d’expert·e·s sont présentés. Les accusé·e·s sont également invité·e·s à présenter leurs arguments. 

4. Délibération et jugement: 

Un jury de 5 à 11 juges de renommée internationale examine les preuves et émet un jugement final ou un avis consultatif. 

5. Résultat et impact: 

Le jugement est communiqué aux parties concernées, aux gouvernements et aux agences internationales, dans le but de les sensibiliser et de susciter d'autres actions juridiques ou politiques. 

Principaux domaines d'intervention 

Le TPP a abordé un large éventail de questions, notamment : 

  • Les droits des peuples et les luttes pour l’autodétermination 
  • Les droits des travailleuses et travailleurs 
  • La justice environnementale 
  • La souveraineté alimentaire 
  • La mondialisation 
  • Les migrations et les déplacements 
  • La résurgence de la guerre et des conflits dans le droit international 

Bien que le Tribunal n'ait pas de pouvoirs d'exécution formels, ses décisions peuvent façonner le droit international et sont souvent citées dans les rapports d'organisations mondiales telles qu'Amnistie internationale, Human Rights Watch, et des organes des Nations unies tels que le Conseil des droits de l'homme