Hong Kong. Le simulacre de procès de Jimmy Lai est une nouvelle atteinte à la liberté de la presse
Avant l’ouverture, lundi 18 décembre, du procès de Jimmy Lai, militant hongkongais en faveur de la démocratie et fondateur du défunt journal Apple Daily, accusé d’atteinte à la sécurité nationale, Sarah Brooks, directrice régionale adjointe d’Amnistie internationale pour la Chine, a déclaré :
« Cette affaire est depuis le début une attaque contre la liberté de la presse et la liberté d’expression. Les autorités de Hong Kong doivent libérer Jimmy Lai immédiatement et sans condition, et effacer les condamnations pénales prononcées contre lui. Personne ne devrait être poursuivi uniquement pour avoir exercé ses droits fondamentaux.
« Les poursuites engagées contre Jimmy Lai montrent comment la loi répressive de Hong Kong relative à la sécurité nationale est utilisée pour étouffer la liberté de la presse et écraser la société civile. Il a déjà été arrêté pour les activités journalistiques de sa publication, on lui a refusé le droit de demander une libération sous caution et on l’a empêché de choisir son propre avocat. Il est désormais soumis à un simulacre de procès présidé par un juge sélectionné par le chef de l’exécutif de Hong Kong.
Cette affaire vient s’ajouter à des condamnations distinctes, motivées par des considérations politiques, pour « rassemblements non autorisés » et fraude, et après plus d’un an de retards qui ont porté la date d’ouverture de ce procès au-delà du 76e anniversaire de Jimmy Lai.
« Jimmy Lai est la personnalité publique la plus médiatisée à être poursuivie en vertu de la loi hongkongaise relative à la sécurité nationale, et le monde entier suivra l’affaire avec intérêt. Son procès illustre le déclin rapide de l’état de droit à Hong Kong.
« Il semble évident que Jimmy Lai et Apple Daily ont été pris pour cible en raison des critiques de ce journal contre les gouvernements chinois et hongkongais - il s’agit là d’une restriction injustifiable du droit à la liberté d’expression. »
Complément d’information
Le procès de Jimmy Lai pour atteinte à la sécurité nationale doit s’ouvrir le 18 décembre, plus de trois ans après son inculpation.
Le 11 décembre 2020, Jimmy Lai a été accusé de deux charges de « complot en vue d’entrer en collusion avec des pays étrangers ou des éléments extérieurs » et d’une charge de « collusion avec des pays étrangers ou des éléments extérieurs », en vertu de la loi relative à la sécurité nationale.
Les autorités de Hong Kong ont déclaré que ces accusations étaient en relation avec la publication d’articles dans Apple Daily, un quotidien appartenant à Jimmy Lai, qui appelaient les pays étrangers à imposer des sanctions, ainsi qu’avec ses réunions avec des figures politiques américaines et ses entretiens accordés à des médias étrangers. Les autorités ont également cité des publications de Jimmy Lai sur Twitter (désormais X) et la liste des personnes qui le suivent sur ce réseau, parmi lesquelles figuraient des personnalités politiques et ONG étrangères de premier plan qui soutiennent le mouvement en faveur de la démocratie à Hong Kong.
Il est détenu depuis le 31 décembre 2020, la libération sous caution lui ayant été refusée en février 2021 lorsque la plus haute instance judiciaire de Hong Kong a estimé que les affaires relevant de la loi sur la sécurité nationale constituaient une exception à la présomption en faveur de la libération sous caution. Le gouvernement de Hong Kong a également interdit à Timothy Owen, l’avocat britannique de Jimmy Lai, de le représenter, après que les législateurs ont adopté une modification donnant au chef de l’exécutif de la ville le pouvoir d’interdire aux avocat·e·s étrangers de travailler sur des affaires de sécurité nationale.
Jimmy Lai a fondé le journal Apple Daily en 1995. Peu après l’introduction de la loi relative à la sécurité nationale, le 30 juin 2020, près de 200 policiers ont fait une descente au siège du journal. C’était la première fois que cette loi était invoquée dans le but de perquisitionner les locaux d’un média, et Jimmy Lai a été arrêté avec ses deux fils et plusieurs responsables du journal.
Apple Daily a cessé ses activités en juin 2021, après que les mêmes responsables ont de nouveau été arrêtés lors d’une autre descente de police et après le gel de ses avoirs, ce qu’Amnistie internationale avait alors qualifié d’« atteinte flagrante à la liberté de la presse ».
Jimmy Lai encourt une peine maximale de réclusion à perpétuité s’il est reconnu coupable. Il a par ailleurs été inculpé de « sédition » dans la même affaire ; cette infraction est passible d’une peine maximale de deux ans.
Les tribunaux de Hong Kong ont déjà condamné Jimmy Lai dans quatre affaires distinctes concernant des « rassemblements non autorisés » et des accusations de fraude, et ont prononcé contre lui des peines d’emprisonnement d’une durée totale de plus de sept ans.