Les autorités doivent protéger les droits humains face aux violences préélectorales
Réagissant à l’assassinat, le 9 août, du candidat à la présidence Fernando Villavicencio, Erika Guevara-Rosas, directrice pour les Amériques à Amnistie internationale, a déclaré :
« Amnistie internationale est extrêmement préoccupée par l’actuel climat de violence en Équateur, marqué par une forte hausse du nombre d’homicides et, ces dernières semaines, une série d’assassinats de personnes candidates à des charges publiques qui a culminé avec l’assassinat, apparemment pour des motifs politiques, de Fernando Villavicencio. Les victimes de l’actuelle vague de violence politique doivent obtenir la vérité, justice et réparation, et les autorités doivent enquêter sans délai sur ces crimes. Parallèlement, l’état d’urgence qui a été instauré à la suite de ces événements ne doit pas donner lieu à de graves violations des droits humains qui pourraient saper la sécurité de l’ensemble de la population du pays. »
Ces derniers mois, l’Équateur s’est trouvé plongé dans une crise de l’insécurité qui touche principalement les régions côtières proches des villes de Guayaquil et Esmeraldas, et qui est liée aux activités de la délinquance organisée. Le 3 mai, le chef de l’État a signé un décret permettant le déploiement des forces armées sur l’ensemble du territoire national « afin de réprimer la menace terroriste » dans le pays, sans qu’aucune limite n’ait été fixée dans le temps pour l’application de ce décret, ce qui contrevient aux dispositions des normes internationales relatives au déploiement des forces armées pour des tâches de sécurité publique, lesquelles exigent que de telles décisions soient limitées dans le temps et géographiquement.
Le 17 mai, le chef de l’État a décrété la dissolution de l’Assemblée nationale et convoqué des élections pour le 20 août. Le décret qui vient d’instaurer l’état d’urgence pour une durée de 60 jours, à la suite de l’assassinat de Fernando Villavicencio, est le dernier en date d’une série de décrets d’exception pris par le chef de l’État et il suspend plusieurs droits, notamment le droit à la liberté de réunion. De plus, ce décret élargit le mandat de la police et des forces armées en leur permettant de pénétrer dans des locaux résidentiels ou autres pour effectuer des perquisitions et confisquer des biens ; il permet également aux autorités d’accéder à la correspondance.
Au vu de l’état d’urgence et de la suspension de certains droits, Amnistie internationale rappelle aux autorités équatoriennes que certains droits ne peuvent jamais être suspendus, conformément aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et de la Convention américaine relative aux droits humains. Le droit à la vie, l’interdiction de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, le principe de légalité – c’est-à-dire que toute responsabilité pénale et tout châtiment doivent être clairement et précisément prévus par la loi –, ainsi que la reconnaissance de la personnalité juridique de toutes les personnes sont des droits qui sont tous liés au récent déploiement des forces armées dans tout le pays.
Dans le contexte actuel, les plus hautes autorités équatoriennes doivent lancer un appel à tous les fonctionnaires afin qu’ils respectent scrupuleusement les normes relatives aux droits humains, notamment les Principes de Syracuse se rapportant aux clauses du PIDCP qui autorisent des restrictions ou des dérogations, et les normes interaméricaines en la matière, afin d’éviter les risques d’actes arbitraires qui peuvent entraîner de graves violations des droits humains et des crimes de droit international.