• 24 oct 2023
  • Canada
  • Communiqué de presse

Canada. Après de longues batailles juridiques, qu’en est-il de l’accès aux services de garde ?

Le gouvernement provincial a mené des consultations publiques de trois semaines avec l'objectif de permettre au public, aux experts et aux organisations de se prononcer sur un sujet plus qu'essentiel: l'immigration. Au-delà d'un simple débat de chiffre, les consultations qui se terminaient le 28 septembre ont aussi permis de rappeler les failles et lacunes quant à l'accès aux droits et services réels pour les personnes migrantes sur notre sol.

Depuis 2018, le gouvernement provincial a retiré le droit aux services de garde subventionnés pour les familles demandeuses d'asile. Cette décision est préjudiciable au développement de l'enfant et contraire aux obligations relatives à l'intérêt supérieur de l'enfant. De plus, elle contribue aux inégalités de genre en empêchant le plus souvent les femmes demandeuses d'asile d'intégrer le marché du travail, ce qui a un impact négatif sur leurs droits économiques et sociaux, en plus de porter atteinte à leur droit au travail. Nous rencontrons tous les jours des parents incapables de travailler ou d'étudier le français sans ce service essentiel: depuis 2018, notre comité a mené sans relâche plusieurs initiatives pour attirer l'attention sur l'illogisme économique et social, mais aussi l'inhumanité de cette décision. Devant l'inaction du gouvernement du Québec, notre comité a emmené la cause devant la Cour supérieure du Québec et a gagné en 2022: nous pensions enfin voir ces parents pouvoir intégrer le marché du travail et apprendre le français, et ces enfants socialiser et avoir accès aux services de dépistage essentiels en petite enfance.

Le gouvernement a annoncé en juin 2022 refuser d'appliquer la décision de la Cour supérieure et faire appel au jugement, et les familles demandeuses d'asile ont dû se résigner à attendre encore plus leurs services de garde. Après plus de 5 ans de batailles juridiques, nous venons enfin d'obtenir la convocation tant attendue à la Cour d'appel du Québec, prévue le jeudi 2 novembre 2023.

Entre temps, la situation des familles demandeuses d'asile sans services de garde ne fait que devenir plus inquiétante. Une famille demandant l'asile au Québec attend environ deux ans pour avoir son audience afin d'être reconnue comme réfugiée, ce qui lui permet de demander un Certificat de sélection du Québec (CSQ). Malgré la réception d'une attestation au fédéral du statut de réfugié, c'est ce document qui leur permettra enfin de s'inscrire sur les listes d'attente des services de garde. Cependant, il a été révélé que les présents seuils définis par Québec pourraient faire que les familles attendent de plus en plus le CSQ. Résultat, un enfant né au Québec de parents demandeurs d'asile pourrait très bien ne jamais aller en services de garde jusqu'à ses 5 ans: nous voyons régulièrement ces familles et pouvons attester que cette situation hypothèque lourdement les enfants, les parents, mais aussi le système scolaire et le marché de l'emploi.

Évidemment, nous espérons que la Cour d'appel nous donne à nouveau raison pour que les familles demandeuses d'asile - après 5 ans de discrimination - puissent comme toutes les familles du Québec s'inscrire sur les listes d'attente pour les services de garde subventionnés. Pourtant, donner accès aux services de garde abordables à toutes les familles qui vivent sur notre territoire pour permettre à tous et à toutes de contribuer à la société, est un choix que nous avons fait depuis longtemps au Québec, et dont nous devrions être fiers. Il nous semble inacceptable de devoir faire appel aux tribunaux pendant des années pour que ce choix de société soit appliqué sans discrimination: nous sommes absolument confiant.es que notre société ne peut que profiter que tous et toutes aient accès non seulement à l'école, mais aussi aux services de garde.

Nous sommes convaincu.es que le Québec souhaite et est capable d'être une terre d'accueil qui s'adapte aux multiples réalités des personnes migrantes qui s'y établissent. Sil est vrai que la migration économique contribue à bien des égards à la société, les personnes issues de l'immigration humanitaire peuvent et souhaitent également y apporter du leur, si tant qu'elles n'en soient exclues par aucune discrimination. Nous travaillons tous les jours avec ces personnes demandeuses d'asile et réfugiées qui sont nos voisin.es, nos collègues de travail et notre personnel de première ligne dans tous les secteurs (agroalimentaire, santé, transports, commerce, etc.), et ce, partout au Québec. Les deux principaux sujets qui retiennent l'attention en matière d'immigration semblent être la langue et le nombre: n'oublions pas que ces personnes sont des sujets de droits et qu'il est essentiel de mettre en place les conditions pour permettre leur participation à la vie collective.