Afghanistan | Le maintien de la mission de l’ONU est essentiel afin de pouvoir effectuer un suivi des violations et les dénoncer
Le Conseil de sécurité des Nations unies doit prolonger la Mission d’assistance des Nations unies en Afghanistan (MANUA), et l’ONU doit lui allouer les personnels et les ressources dont elle a besoin pour effectuer un suivi, des enquêtes et des signalements sur les violations des droits humains commises sur le terrain dans ce pays, a déclaré Amnistie internationale en prévision du vote du 17 septembre sur le renouvellement du mandat de la mission, qui est censé expirer ce jour-là.
Présente dans le pays depuis 2002, la MANUA joue notamment un rôle essentiel en matière de suivi de la situation des droits humains dans le pays et de supervision, par le biais du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.
« La prise du pouvoir par les talibans représente de graves risques pour les groupes vulnérables, en particulier les journalistes, les minorités ethniques, les femmes et les filles, et les personnes ayant travaillé avec l’ancien gouvernement, des États étrangers et des prestataires », a déclaré Lawrence Moss, responsable du plaidoyer auprès de l'ONU à Amnistie internationale.
« Il est essentiel que des observateurs des droits humains déployés par les Nations unies restent sur le terrain et montrent leur soutien aux droits des Afghan·e·s en cette période dangereuse. »
Dans une résolution adoptée le 30 août, le Conseil de sécurité des Nations unies a demandé aux talibans de :
- respecter les droits fondamentaux, notamment ceux des femmes, des mineur·e·s et des minorités
- garantir la participation pleine, égale et significative des femmes dans le cadre d’une solution politique inclusive
- respecter l’état de droit
- permettre aux Afghan·e·s de se rendre à l’étranger, de quitter l’Afghanistan dès qu’ils le souhaitent, et de sortir de l’Afghanistan par n’importe quelle frontière, qu’elle soit terrestre ou aérienne
- respecter le droit international humanitaire, notamment la protection des civil·e·s
« Afin de concrétiser ses propres objectifs, le Conseil de sécurité a besoin de toute urgence de la fonction de suivi et de signalement que remplit cette mission qu’il a lui-même établie », a déclaré Lawrence Moss. « La MANUA doit faire rapport de la situation des droits humains en Afghanistan au Conseil au moins tous les mois. »
Amnistie internationale demande par ailleurs aux Nations unies de fournir les personnels et ressources supplémentaires requis pour que la MANUA puisse amplifier son activité de suivi des droits humains. Le personnel international de la MANUA spécialisé dans les droits humains se trouve désormais hors du pays, principalement à Almaty, au Kazakhstan, et le travail de son personnel afghan présent sur place est fortement restreint par la crainte de représailles. Les Nations unies ont permis au personnel humanitaire et politique de rester en Afghanistan, mais pas aux observateurs des droits humains.
« Les Nations unies doivent témoigner leur soutien à la population afghane, en ramenant leurs observateurs internationaux des droits humains dans le pays et en les faisant bénéficier des mêmes protocoles de sécurité que le personnel humanitaire, et le Conseil de sécurité des Nations unies doit demander que les talibans respectent le travail qu’accomplit le personnel afghan des Nations unies sur le terrain des droits humains, et de s’abstenir d’exercer des représailles », a déclaré Lawrence Moss.
La situation dans la vallée du Panjshir illustre la nécessité d’un suivi des droits humains
Des informations alarmantes nous parviennent de la vallée du Panjshir, où les affrontements entre talibans et combattants de la résistance se poursuivent. BBC Persian a partagé une vidéo montrant semble-t-il un homicide intentionnel commis dans cette zone, et la BBC affirme par ailleurs que les talibans ont tué des civil·e·s. Selon des sources interrogées par Amnistie internationale dimanche 12 septembre, les talibans empêchent en outre l’approvisionnement en nourriture et en produits de première nécessité dans la région.
« C’est une image de plus en plus sinistre qui émerge de la vallée du Panjshir. Ces séquences filmées très perturbantes et d’autres violations des droits humains recensées dans la région soulignent à quel point il est nécessaire que la communauté internationale supervise véritablement ce qui se passe actuellement en Afghanistan », a déclaré Lawrence Moss.
Complément d’information
Amnistie internationale demande aussi au Conseil des droits de l'homme des Nations unies de mettre sur pied une mission d'établissement des faits complémentaire ou un autre mécanisme d’enquête indépendant similaire pour l’Afghanistan. Une session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme à Genève en août n’a pas débouché sur l’autorisation d’un tel mécanisme, et Amnistie internationale s’est jointe à plus de 50 organisations nationales, régionales et internationales afin d’exhorter les États membres des Nations unies à le faire lors de sa 48e session ordinaire, qui se déroule du 13 septembre au 8 octobre 2021.