Chine. Il faut libérer une militante de Wuhan incarcérée, « proche de la mort » après une grève de la faim
Une journaliste citoyenne chinoise incarcérée pour avoir couvert les premiers jours de la pandémie de COVID-19 à Wuhan risque de mourir si elle n’est pas libérée d’urgence pour recevoir des soins médicaux, a déclaré Amnistie internationale le 4 novembre 2021.
Zhang Zhan, condamnée à quatre ans de prison en décembre dernier pour avoir posté sur les réseaux sociaux des messages sur la gestion de l’épidémie par la Chine, observe une grève de la faim pour protester contre son incarcération. Sa famille assure s'attendre à ce qu’elle ne passe pas l’hiver si elle n’est pas libérée pour raisons médicales.
« Il semble désormais que Zhang Zhan, qui n’aurait jamais dû être incarcérée, risque de mourir en prison. Les autorités chinoises doivent la libérer immédiatement afin qu’elle mette un terme à sa grève de la faim et reçoive les soins médicaux appropriés dont elle a désespérément besoin, a déclaré Gwen Lee, chargée de campagne sur la Chine à Amnistie internationale.
« Les poursuites engagées par le gouvernement chinois contre Zhang Zhan, uniquement parce qu’elle a tenté de découvrir ce qui se passait à Wuhan et de percer le secret dont le gouvernement entourait l’épidémie, est une attaque honteuse contre les droits humains. »
Ancienne avocate, Zhang Zhan s’est rendue à Wuhan en février 2020 pour couvrir sur le terrain ce qui s’y passait. Elle a publié sur les réseaux sociaux des informations dénonçant l’arrestation par des représentants du gouvernement de journalistes indépendants et le harcèlement des familles de patients atteints de la COVID-19.
Elle a « disparu » à Wuhan en mai 2020. Il est apparu par la suite qu’elle avait été arrêtée par les autorités chinoises et détenue à Shanghai, où elle a été reconnue coupable d’« avoir cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public » à l’issue d’une parodie de procès.
En juin 2020, Zhang Zhan a entamé une grève de la faim pour protester contre sa détention. En décembre, elle était si affaiblie qu’elle a dû assister à son procès en fauteuil roulant.
Avant l’audience, les autorités l'ont soumise à une alimentation forcée et l’ont immobilisée pendant des jours d’affilée pour l’empêcher d’enlever sa sonde d'alimentation. Elles l’ont également forcée à porter des entraves aux pieds et aux mains 24 heures sur 24 pendant plus de trois mois pour la punir de sa grève de la faim.
Le 31 juillet 2021, elle a été admise à l’hôpital pour malnutrition aigüe. Cependant, elle a été renvoyée en prison et continue d’observer une grève de la faim partielle, malgré les risques graves pour sa santé, qui continue de se détériorer à une vitesse très inquiétante.
Depuis son procès, les autorités refusent de la laisser parler à son avocat ou de rencontrer sa famille en personne. Elle est autorisée à les appeler au téléphone ou en visio, occasionnellement et sous surveillance.
Dans un message sur Twitter daté du 30 octobre, son frère Zhang Ju a écrit : « Je ne pense pas qu’elle vive encore longtemps. Si elle ne passe pas l’hiver qui arrive, j’espère que le monde se souviendra d’elle telle qu’elle était. »
Zhang Zhan figure parmi les cas de la campagne d’Amnistie internationale Écrire, ça libère 2021 et nous demandons sa libération.
« Zhang Zhan est victime de la politique de tolérance zéro du gouvernement chinois vis-à-vis des critiques et des opinions dissidentes. Elle est incarcérée uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression et doit être libérée immédiatement et sans condition, a déclaré Gwen Lee.
« Dans l’attente de sa libération, elle doit pouvoir communiquer régulièrement et sans restrictions avec sa famille et les avocats de son choix, et ne doit pas être soumise à d’autres mauvais traitements. Si Zhang Zhan meurt en prison, le gouvernement chinois aura son sang sur les mains. »
Les journalistes citoyens sont une source essentielle d’informations directes, non censurées, sur l’épidémie de COVID-19 en Chine. Parce qu’ils travaillent de manière indépendante vis-à-vis des médias contrôlés par l’État, les journalistes citoyens sont en butte à un harcèlement constant, parce qu’ils révèlent des informations que le gouvernement chinois préférerait garder secrètes.
Il est inquiétant de constater le nombre de décès parmi les militant·e·s chinois incarcérés, soit en détention, soit après qu’ils aient bénéficié tardivement d’une libération conditionnelle pour raisons médicales.
En juillet 2017, le militant des droits humains et lauréat du prix Nobel Liu Xiaobo est mort en détention. Les autorités avaient refusé ses demandes et celles de sa famille s’agissant de recevoir des traitements à l’étranger pour son cancer.
La même année, l’écrivain chinois et détracteur du gouvernement Yang Tongyan (de son nom de plume Yang Tianshui) est décédé trois mois après sa libération conditionnelle pour raisons médicales et son opération d’une tumeur au cerveau.
Cao Shunli, militante et chargée de campagne à Pékin, est morte d’une défaillance organique après des mois passés en détention en mars 2014. Elle s’est vu refuser des soins médicaux adaptés pendant son séjour en prison.