Des mesures concrètes pour mettre fin à l’impunité ne peuvent plus attendre
Trop peu a été accompli depuis le rapport Mapping
Les autorités congolaises et les Nations unies n’ont pas assez fait pour amener les auteurs de violations des droits humains à répondre de leurs actes ni pour rendre justice aux victimes, une décennie après le rapport majeur du Projet Mapping portant sur la République démocratique du Congo, publié en octobre 2010, ont déclaré Amnistie internationale et Human Rights Watch aujourd’hui.
Le rapport du Projet Mapping des Nations unies recense plus de 600 cas de violations graves du droit international des droits humains et du droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la RD Congo.
« L’incapacité d’identifier et de mettre en place les mécanismes adéquats pour rendre justice et accorder réparation a laissé des milliers de victimes et leurs familles impuissants », a déclaré Deprose Muchena, directeur du programme Afrique de l’Est et Afrique australe à Amnistie internationale. « Par conséquent, l’impunité généralisée continue de régner en RD Congo et dans la sous-région, contribuant ainsi à la récurrence des tueries et d’autres crimes graves. »
Le président Félix Tshisekedi devrait faire de la lutte contre l’impunité une priorité de son administration et prendre des mesures significatives pour amener les personnes responsables de violations des droits humains – par le passé comme de nos jours – à rendre des comptes, ont déclaré les deux organisations.
Les Nations unies ont lancé le Projet Mapping en RD Congo après la découverte de trois charniers dans la province du Nord-Kivu, dans l’est du pays, en 2005. Le rapport d’enquête a été publié le 1er octobre 2010.
Le rapport du Projet Mapping décrit de graves violations du droit international des droits humains et du droit international humanitaire. Il conclut que la majorité de ces faits constituent des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité.
En référence à une série d’événements survenus entre 1996 et 1997, le rapport soulève la question de savoir si certains crimes commis par l’armée rwandaise et son allié congolais, le groupe rebelle de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre, contre des refugies hutus rwandais et des citoyens hutus congolais pourraient être qualifiés de « crimes de génocide ». Le rapport précise qu’il appartiendrait à un tribunal compétent de rendre une telle décision.
Toutes les violations et abus documentés dans le rapport ont été commis par divers acteurs, dont des armées étrangères, des groupes rebelles et les forces gouvernementales congolaises lors de vagues de violence qui ont submergé le pays entre 1993 et 2003.
Outre le fait de mettre au jour de graves violations et abus, les enquêteurs ont évalué la capacité du système judiciaire congolais à traiter de manière adéquate les crimes documentés et ont proposé des réformes et des mécanismes judiciaires alternatifs qui permettraient aux victimes d’obtenir justice et réparation. Cependant, aucune des recommandations contenues dans le rapport n’a été appliquée et la plupart des crimes documentés demeurent impunis.
Bien que des efforts aient été faits pour enquêter sur les crimes graves et engager des poursuites contre leurs auteurs présumés au cours des dix dernières années, principalement par le biais de tribunaux militaires, ceux-ci ont confirmé les profondes lacunes du système judiciaire national. Tandis que la Cour pénale internationale (CPI) a ouvert des enquêtes en 2004 sur des crimes graves commis en RD Congo après le 1er juillet 2002, de nombreux faits décrits dans le rapport du Projet Mapping se sont produits avant cette date.
Bien que la CPI ait condamné trois anciens chefs rebelles pour des atrocités commises en Ituri en 2002-2003, les hauts responsables politiques et militaires n’ont pas été poursuivis dans les affaires dont elle a été saisie au sujet de la RDC.
« Le rapport du Projet Mapping nous rappelle avec force les crimes commis en RD Congo, l’absence choquante de justice et les conséquences de l’impunité », a déclaré Thomas Fessy, chercheur principal sur la RD Congo à Human Rights Watch. « Dix ans plus tard, les autorités congolaises et leurs partenaires internationaux devraient prendre de véritables mesures pour renforcer le système judiciaire national et mettre en place un mécanisme internationalisé garantissant que justice soit rendue de manière crédible et indépendante pour les crimes faits passés et présents. »
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