Les États membres de l’UE ont été prévenus que l’inertie précipite la détérioration des droits en Hongrie
Un an après le vote historique au Parlement européen ayant déclenché la procédure de l’article 7 du Traité sur l'Union européenne contre la Hongrie, face au non-respect de cet État pour les valeurs fondatrices de l’Union européenne (UE), Amnistie internationale s’est jointe à des organisations hongroises afin de signaler aux États membres de l’UE que continuer à fermer les yeux sur les menaces croissantes dans ce pays risque de se solder sous peu par des dégâts irréversibles.
« Depuis le vote de l’an dernier, le gouvernement hongrois a resserré son contrôle sur les médias et l’appareil judiciaire, et continué à réduire les dissidents au silence et à menacer les personnes et organisations essayant d’amener le gouvernement à rendre des comptes », a déclaré Eve Geddie, directrice du bureau européen d’Amnistie internationale.
« Après une année perdue en disputes relatives à la procédure, la réunion des ministres de l’UE prévue pour la semaine prochaine doit mettre un coup d’arrêt aux tentatives du gouvernement hongrois visant à priver la population de ses libertés. »
Amnistie internationale Hongrie, le Comité Helsinki de Hongrie, l’Union des libertés civiles de Hongrie et l’observateur Mertek des médias ont diffusé une nouvelle synthèse montrant que les atteintes aux droits humains se sont multipliées et aggravées au cours de l’année écoulée en Hongrie. La synthèse décrit comment le gouvernement hongrois a intensifié ses attaques contre l’indépendance de la justice, la liberté des médias, l’égalité des genres, l’école publique, la communauté des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBTI), et les droits des demandeurs et demandeuses d’asile et des réfugié·e·s, depuis l’engagement de la procédure de l’article 7, en septembre 2018.
L’indépendance de la justice a d’autant plus été fragilisée au cours de l’année écoulée que la crise constitutionnelle prolongée entre des acteurs clés de l’appareil judiciaire a continué à entraver la supervision efficace de l’administration judiciaire. Une campagne de propagande virulente contre des magistrats ayant critiqué le pouvoir a exacerbé cette situation.
L’intensification de la concentration des médias signifie que les médias favorables au gouvernement contrôlent désormais près de 80 % des organes de presse, que les autorités hongroises ont utilisés pour mener des campagnes visant divers individus, groupes et organisations, notamment afin de véhiculer un discours homophobe. Le gouvernement et certaines figures publiques ont désigné les personnes LGBTI comme « nouvel ennemi », dans l’intention d’inciter à la haine contre elles. En 2019, on a observé en Hongrie une forte augmentation des agressions verbales et physiques contre des personnes ayant organisé des événements associés à la marche des fiertés à Budapest, ainsi que contre des participant·e·s à ces manifestations.
« Le gouvernement hongrois s’entête à essayer de présenter les organisations de la société civile comme des "ennemis de l’État", en utilisant souvent des médias pro-gouvernementaux pour répandre son message toxique. Ces organisations sont visées par des lois qui les stigmatisent et qui sont conçues pour restreindre leurs activités et les sanctionner sur le plan financier », a déclaré Eve Geddie.
Les personnes en quête d’asile et les réfugié·e·s sont eux aussi diabolisés par le gouvernement, qui rejette de manière quasi-systématique les demandes d’asile, et refuse de nourrir les adultes dont la demande a été rejetée et qui sont en attente d’expulsion dans les zones de transit à la frontière avec la Serbie.
Les ministres participant à la réunion du Conseil des Affaires générales le 16 septembre débattront de la situation en Hongrie pour la première fois depuis l’activation de l’article 7.
« Il est grand temps que le Conseil européen s’attaque à la menace existentielle pesant sur les libertés individuelles en Hongrie. Le Parlement européen a voté en faveur du déclenchement de la procédure de l’article 7 l’an dernier afin de protéger la population hongroise contre les agissements destructeurs de son gouvernement. C’est désormais au tour des ministres de défendre les principes de l’Union européenne et les droits humains », a déclaré Eve Geddie.
Complément d’information
Synthèse de janvier 2018 diffusée par des ONG : https://www.amnesty.hu/news/2570/hungary-moving-beyond-red-lines