L’abrogation de la peine de mort obligatoire doit être un premier pas vers l’abolition totale
L’annonce faite ce 13 mars 2019 selon laquelle l’application obligatoire de la peine de mort sera abolie pour 11 infractions devrait être considérée comme une première étape vers l’abolition totale de la peine capitale en Malaisie.
« Nous déplorons que le gouvernement n’ait pas honoré l’engagement qu’il avait pris d’abolir la peine de mort en totalité et nous l’invitons à tenir sa promesse d’abolir ce châtiment définitivement dès que l’occasion se présentera », a déclaré Shamini Darshni Kaliemuthu, directeur d’Amnistie internationale Malaisie le 13 mars 2019.
Le 13 mars, le vice-ministre en charge de de la Loi Mohamed Hanipa Maidin a annoncé au Parlement que le gouvernement proposait d’introduire une disposition laissant le choix de la peine à la discrétion des juges pour 11 infractions inscrites dans le Code pénal et la Loi de 1971 relative aux armes à feu (peines alourdies), qui emportent actuellement la peine de mort automatique. Ce changement permettrait donc aux juges de décider de prononcer ou non la peine de mort.
« Dans le cadre de cette annonce décevante, l’abolition de l’application automatique de la peine de mort apparaît comme un compromis édulcoré, et le gouvernement semble avoir cédé à la pression politique et publique en faveur du maintien de la peine de mort. Il doit reconsidérer sa décision. La peine capitale est le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit, et il n’a pas sa place dans une société civilisée », a déclaré Shamini Darshni Kaliemuthu.
Les projets de loi visant à abolir la peine de mort automatique devraient être examinés par le Parlement lors de la session en cours qui se termine le 11 avril.
« L’abolition de l’application automatique de la peine de mort représente un changement décisif dans le droit malaisien, porteur d’avancées dans la protection des droits de ceux qui encourent la peine capitale. Dotés du pouvoir de discrétion lors du prononcé du jugement, les juges pourront examiner la situation particulière de l’accusé, et de l’infraction commise, et prendre en compte d’éventuelles circonstances atténuantes – ce qui pourrait se traduire par une diminution du nombre de condamnations à mort. Cependant, cette disposition reste insuffisante pour atteindre l’objectif déclaré d’abolition et doit donc constituer un tout premier pas dans cette direction », a déclaré Shamini Darshni Kaliemuthu.
Qu’elle soit automatique ou laissée à la discrétion des juges, la peine de mort n’a pas d’effet dissuasif et ne permet pas de réduire la criminalité.
« Dans n’importe quel pays, le système judiciaire pénal n’est jamais parfait et des erreurs peuvent être et seront commises. Des cas où des innocents sont exécutés pourraient survenir – une erreur terrible, la peine de mort étant irréversible par nature. C’est un châtiment qui perpétue le cycle de la violence au sein d’une société. Elle est prononcée et appliquée par des systèmes judiciaires susceptibles d’opérer des discriminations et de commettre des erreurs, particulièrement en l’absence de garanties protégeant contre le recours à la torture ou à d’autres mauvais traitements en vue d’extorquer les aveux des accusés. Elle perpétue le cycle de la violence qu’elle est censée endiguer au sein de la société, tandis que les études montrent de manière récurrente qu’elle n’a pas d’effet dissuasif sur la criminalité », a déclaré Shamini Darshni Kaliemuthu.
Amnistie internationale Malaisie s'oppose en toutes circonstances à la peine de mort, qui constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit, et une violation du droit à la vie inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme.
« Le gouvernement doit garder le cap et abolir la peine de mort définitivement. L’abolition totale illustrerait l’engagement de la Malaisie en faveur de la promotion et de la protection des droits humains et aurait un large écho dans la région de l’Asie du Sud-Est où, nous en sommes convaincus, la Malaisie peut se démarquer en tant que chef de file dans le domaine des droits humains. »
Enfin, Amnistie internationale Malaisie demande au gouvernement et aux autorités carcérales à travers le pays de maintenir le moratoire sur toutes les exécutions instauré en juillet dernier.