Il faut des mesures décisives pour faire cesser la torture et les homicides imputables aux forces de sécurité
Il faut que les autorités malgaches prennent des mesures décisives pour éliminer la culture bien ancrée de l’impunité qui entoure les homicides, la torture et les autres formes de mauvais traitements perpétrés par les forces de sécurité, a déclaré Amnistie internationale le 26 juin 2019 à l’occasion de la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture.
Les actes de torture et les autres mauvais traitements imputables à la police et à l’armée sont une pratique courante, qui s’inscrit souvent dans le contexte de la lutte contre les voleurs de bétail.
« Depuis quelques années, nous constatons une multiplication des actes de torture infligés à des voleurs de bétail, et nous observons parfois des homicides odieux. Cependant, les responsables ne sont pas inquiétés, ce qui nourrit le climat d’impunité, a déclaré Deprose Muchena, directeur du programme Afrique australe à Amnistie internationale.
« Les autorités malgaches doivent s’attaquer sans délai à l’impunité dont jouissent les auteurs d’actes de torture et d’autres mauvais traitements. Il faut commencer par mener des enquêtes efficaces sur tous les cas connus ou signalés et démettre immédiatement de leurs fonctions officielles les auteurs présumés en attendant les conclusions des investigations. Ces personnes doivent être traduites en justice dans le cadre de procès équitables.
« Il faut que les victimes et leur famille aient accès à des recours efficaces et à la justice. »
Dans le cadre de la recherche de voleurs de bétail présumés, il est fréquent que les forces de sécurité pillent des villages, incendient des maisons et torturent ou tuent des villageois. En janvier 2019, Amnistie internationale a vérifié l’authenticité d’images atroces montrant les corps de huit hommes de Betroka (sud de Madagascar) criblés de balles après une opération de police. Ces hommes étaient accusés d’avoir tenté de voler des marchandises dans un magasin.
Dans une autre affaire récente, trois hommes accusés d’avoir volé des armes à feu ont été retrouvés morts, ligotés dans la rivière Onive au niveau de la ville d’Ampitatafika, le 31 mai. Ils avaient été arrêtés par l’armée le 20 mai. Leurs corps portaient des cicatrices indiquant qu’ils avaient été roués de coups avant leur mort.
En avril, un étudiant de 19 ans a été retrouvé mort après avoir passé la nuit en garde à vue à Maroantsetra. Il avait été arrêté la veille pour un cambriolage présumé. Selon le rapport d’un médecin, le jeune homme a été battu à mort.
« Il faut que les autorités malgaches prennent immédiatement des mesures pour que toute personne soupçonnée d’une quelconque infraction soit protégée de la torture et de toute autre forme de mauvais traitements au moment de son arrestation et en détention, a déclaré Deprose Muchena.
« Il s’agit notamment de veiller à ce qu’elle puisse bénéficier pleinement d’une représentation juridique. Toute information à charge extorquée sous la torture ne saurait être considérée comme une preuve recevable. »
Complément d’information
En février 2017, des policiers ont incendié cinq villages de la commune d’Antsakabary (nord de Madagascar) et infligé des actes de torture et d’autres mauvais traitements à des villageois après que deux policiers qui étaient venus arrêter des personnes accusées du vol d’un canard ont été tués par une foule.
Une femme âgée, incapable de s’enfuir, a succombé à ses brûlures lors de l’attaque. Plus de deux ans après, personne n’a été amené à répondre de ces actes.
Dans un rapport publié en 2018, Amnistie internationale a indiqué que les conditions de détention dans les prisons malgaches s’apparentent également à des actes de torture et se caractérisent par un surpeuplement et l’absence de séparation entre les personnes en détention provisoire et les personnes condamnées. Par ailleurs, la nourriture et les soins médicaux sont insuffisants.
Bien que l’organisation se félicite du nouveau plan gouvernemental pour l’alimentation des détenus, elle appelle les autorités à résoudre le problème du surpeuplement en limitant le recours à la détention provisoire et en veillant à ce que les conditions carcérales soient conformes aux normes internationales.