L’ONU doit agir pour que la Chine mette un terme aux détentions massives dans le Xinjiang
Une mission d’enquête internationale est cruciale pour faire face à la crise des droits
Genève, 4 février 2019 – Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies doit adopter une résolution portant création d’une mission d’enquête internationale pour la région autonome ouïghoure du Xinjiang, en Chine, où jusqu’à un million de musulmans turcophones sont détenus de manière arbitraire, ont déclaré plusieurs organisations non-gouvernementales (ONG) dans une déclaration conjointe adressée aux États membres de l’ONU le 4 février 2019.
Au cours de la prochaine session du Conseil des droits de l’homme, du 25 février au 22 mars 2019, le Conseil examinera le rapport final de l’Examen périodique universel sur la Chine de novembre 2018, au cours duquel les responsables chinois ont nié les allégations de graves violations des droits humains dans le Xinjiang.
« L’ampleur des atteintes aux droits humains qui semblent se dérouler dans cette région appelle un examen intransigeant de la part du Conseil des droits de l’homme, a déclaré Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch. Afin de garantir l'intégrité du Conseil, les États ne doivent pas laisser la Chine s’abriter derrière son statut de membre ou sa puissance économique pour échapper à l'obligation de rendre des comptes. »
Les autorités chinoises détiennent des Ouïghours et autres musulmans turcophones en dehors de toute procédure légale dans des « camps d’éducation politique » en raison de leur manque de loyauté présumé envers le gouvernement et le Parti communiste chinois. Dans ces camps, ils sont soumis à un endoctrinement politique forcé, contraints de renoncer à leur foi, soumis à des mauvais traitements et parfois torturés. De nombreux experts de l’ONU, des organes de suivi des traités et le haut-commissaire aux droits de l’homme ont exprimé leur vive inquiétude quant à la situation dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang et ont demandé à pouvoir s’y rendre librement.
Le gouvernement chinois n’a pas donné de réponse favorable à ces demandes. En décembre et janvier, il a organisé des visites pour certains journalistes et diplomates dans des « centres de formation professionnelle » – selon la terminologie officielle. À l’issue de ces visites, les médias d’État chinois ont affirmé que les visiteurs avaient trouvé les conditions « impressionnantes » et les détenus « en bonne forme ».
« L’an dernier, la Chine a eu de multiples occasions de répondre aux questions concernant la terrible situation dans le Xinjiang et à chaque fois, elle a fourni des réponses qui heurtent le bon sens, a déclaré Kumi Naidoo, secrétaire général d’Amnistie internationale. Elle devrait reconnaître que seule une mission d’enquête internationale pourra séparer les faits de la fiction et mettre les choses au clair. »
Dans le cadre de cette résolution, le haut-commissaire aux droits de l’homme enverrait une mission d’enquête afin d’évaluer la situation et d’en rendre compte au Conseil des droits de l’homme lors de sa prochaine session. En outre, la résolution devrait saluer la volonté exprimée par la Chine d’autoriser la venue d’experts internationaux et insister sur le fait qu’ils doivent bénéficier d’un accès indépendant, libre et non surveillé. Il importe de rappeler à la Chine ses obligations en tant que membre du Conseil des droits de l’homme « d’observer les normes les plus strictes en matière de promotion et de défense des droits de l’homme » et de « coopérer pleinement avec le Conseil ».
Cette déclaration a été publiée par Amnistie internationale, Human Rights Watch, International Service for Human Rights et le Congrès mondial ouïghour, et a reçu le soutien d’un large éventail d’organisations au niveau régional et international.
« La détérioration de la situation des droits humains en Chine, depuis longtemps préoccupante, arrive à un point critique. Aucun pays au monde ne devrait pouvoir s’abstenir de rendre des comptes alors qu’il détient de manière arbitraire jusqu’à un million de ses citoyens, a déclaré Philip Lynch, directeur de l’ONG International Service for Human Rights. Le strict minimum que puissent faire les membres du Conseil des droits de l’homme s’ils prennent au sérieux leur obligation de promouvoir ces droits, c’est d’adopter une résolution portant création d’une mission d’enquête.
« Depuis trop longtemps, les Ouïghours et d’autres musulmans subissent une répression flagrante aux mains des autorités chinoises, a déclaré Dolkun Isa, président du Congrès ouïghour mondial. Nous nous tournons désormais vers le Conseil des droits de l’homme pour qu’il agisse et fasse éclater la vérité. »