Les autorités empêchent un directeur de média de rejoindre sa famille
Mi-novembre, le gouvernement du Vanuatu a annulé le permis de séjour de Dan McGarry, directeur du média Daily Post, et a refusé de lui renouveler son permis de travail. Le samedi 16 novembre 2019, après avoir assisté à une conférence à Brisbane, Dan McGarry n’a pas été autorisé à embarquer à bord de l’avion qui devait le ramener auprès de sa famille au Vanuatu.
Le Daily Post est le seul journal quotidien du pays. L’association des médias du Vanuatu a appelé les autorités à réexaminer leur décision d’annuler les permis de séjour et de travail de Dan McGarry. Elle a par ailleurs constaté que ces mesures avaient eu un impact sans précédent et dissuasif sur la liberté de la presse dans le pays. Amnistie internationale se fait l’écho de ces préoccupations.
Dan McGarry est convaincu que le refus des autorités de renouveler son permis de travail et l’annulation de son permis de séjour sont la conséquence directe d’une série d’articles publiés dans le Daily Post qui soulignaient l’influence croissante de la Chine dans le pays.
Dan McGarry est un citoyen canadien qui vit et travaille au Vanuatu depuis 16 ans. Sa demande de résidence permanente au Vanuatu était en cours au moment où son permis de séjour a été annulé. La conjointe de Dan McGarry et leurs deux enfants sont toujours au Vanuatu. Il avait prévu de rentrer avec un visa de touriste (non de travail) pour voir sa famille pendant que la décision d’annulation de son permis de travail faisait l’objet d’un recours, mais il a été refoulé par la compagnie aérienne, semble-t-il sur instruction du gouvernement du Vanuatu.
Le Vanuatu a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantit le droit à la liberté d’expression (article 19). De surcroît, la Convention relative aux droits de l’enfant (à laquelle le Vanuatu est partie) dispose que toute demande faite en vue d’entrer dans un pays aux fins de réunification familiale doit être considérée par les États parties dans un esprit positif, avec humanité et diligence, en veillant à ce qu’il n’y ait aucune conséquence fâcheuse pour la famille (article 10). Dan McGarry devrait au moins être autorisé à rejoindre sa famille au Vanuatu pendant que la décision d’annulation de son permis de travail est réexaminée par un tribunal indépendant et impartial.
Amnistie internationale appelle le gouvernement du Vanuatu à respecter le droit à la liberté d’expression et à la liberté de la presse dans le pays, et notamment la liberté de critiquer les politiques et les mesures du gouvernement sans crainte de représailles. Les journalistes et les professionnel·le·s des médias ne doivent pas être sanctionnés ou soumis à d’autres manœuvres d’intimidation uniquement pour avoir exprimé leurs opinions de façon pacifique.
Conformément aux obligations internationales qui lui incombent au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant, le gouvernement du Vanuatu doit aussi veiller à ce que M. McGarry retrouve immédiatement sa famille au Vanuatu.
Ces attaques grossières contre les médias, bien que rares au Vanuatu, ne sont pas inhabituelles dans d’autres pays insulaires du Pacifique. Dans les années qui ont suivi le coup d’État militaire de 2006 aux Fidji, plusieurs journalistes ont été expulsés du pays, ont été arrêtés ou placés en détention de façon arbitraire, ou ont fait l’objet de poursuites judiciaires uniquement pour avoir exercé de manière pacifique leur droit à la liberté d’expression. Le 30 novembre 2019, deux journalistes australiens ont été expulsés de Kiribati pour avoir tenté de publier des informations sur les relations diplomatiques du pays avec la Chine.