Les années d’impunité pour des crimes xénophobes ont abouti aux dernières attaques en date
En Afrique du Sud, les attaques commises de façon persistante et qui se multiplient contre les personnes migrantes et réfugiées et des commerces tenus par des personnes étrangères résultent directement de l’impunité et des carences du système judiciaire qui depuis des années laissent ces personnes exposées au danger et sans protection, a déclaré Amnistie internationale le 4 septembre.
La mort de cinq personnes a été confirmée dans un contexte d’escalade de la violence entre des locaux et des étrangers à Johannesburg et dans d’autres régions du pays.
« Les autorités sud-africaines ne peuvent pas dire qu’elles n’ont pas vu arriver cette violence persistante. Depuis de nombreuses années, les réfugiés, les demandeurs d'asile et les migrants sont pris pour cible en raison de leur identité et de leur apparence. Ils sont aussi utilisés comme boucs émissaires par des représentants politiques peu scrupuleux qui promeuvent des discours insidieux reprochant aux étrangers de voler les emplois et d’être la cause de tout ce qui ne va pas dans le pays, a déclaré Shenilla Mohamed, directrice d’Amnistie internationale Afrique du Sud.
« La première grande flambée de violence xénophobe observée il y a plus de 11 ans, qui a causé la mort de plus de 60 personnes, aurait dû alerter les autorités et les inciter à éradiquer la haine à l’égard des réfugiés et des migrants et à amener les responsables de ces agissements à rendre des comptes. Leur inaction a conduit aux attaques récurrentes qui sont depuis observées. »
En Afrique du Sud, les commerces appartenant à des étrangers sont depuis des semaines systématiquement pillés et incendiés, surtout à Pretoria et à Johannesburg. Les commerces appartenant à des Nigérians et à d’autres étrangers ont été vandalisés dans ces deux villes, et des biens et des stocks d’une valeur de plusieurs millions ont été réduits en cendre.
Les violences se sont encore intensifiées la semaine dernière, à la suite d’affrontements entre des locaux et des étrangers marqués par de terribles attaques et homicides.
Le gouvernement s’est largement abstenu de remédier aux violentes flambées de violence xénophobe observées dans le passé dans tout le pays, préférant souvent continuer d’imputer aux étrangers la responsabilité des forts taux de criminalité et leur reprochant de mettre les services publics sous pression et de tenir des commerces illégaux.
« Les autorités sud-africaines doivent cesser de favoriser la xénophobie avec des discours visant désespérément à gagner des soutiens politiques. Elles devraient plutôt s’efforcer de bâtir un pays fondé sur le respect des droits humains et de l’état de droit, protégeant toutes les personnes sur son territoire, a déclaré Shenilla Mohamed.
« Les autorités sud-africaines doivent mettre en place un plan de protection de tous les réfugiés et migrants, et prendre les mesures nécessaires pour mettre fin une fois pour toutes à ces attaques. Cela implique dans un premier temps d’amener les responsables présumés des crimes xénophobes qui ont été commis à répondre de leurs actes, et de briser le cycle de l’impunité. »
Complément d’information
Depuis 2008, l’Afrique du Sud a été le théâtre de nombreuses flambées de violence visant les réfugiés, les migrants et les demandeurs d'asile.
Dans certains cas, la xénophobie a été attisée par les discours remplis de haine des autorités et de représentants politiques.
Par exemple, en décembre 2016, le maire de Johannesburg, Herman Mashaba, a qualifié les étrangers vivant dans sa commune de « criminels » ayant fait main basse sur la ville. Il leur imputait le taux de criminalité élevé.
En novembre 2018, le ministre de la Santé de l’époque, qui occupe à présent les fonctions de ministre de l’Intérieur, Aaron Motsoaledi, a accusé les ressortissants « étrangers » d’avoir, selon lui, surchargé le système de santé du pays.