Au mépris de la décision de la Cour européenne, les autorités jettent des dizaines de Roms à la rue
En réaction à l'expulsion forcée par les autorités italiennes, le 26 juillet, de dizaines de familles roms du campement de Camping River, à Rome, au mépris d'une décision de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), Catrinel Motoc, responsable de campagne pour l'Europe à Amnesty International, a déclaré :
« En expulsant les habitants de ce campement, en faisant fi de la décision de la Cour européenne, l'Italie démolit les habitations de ces gens et détruit leurs vies, mais piétine également ses obligations régionales et internationales en termes de droits humains.
« Mettre à la rue des dizaines de familles roms, y compris des nourrissons, est un acte cruel et insensible visant une minorité qui fait les frais depuis des décennies des politiques discriminatoires en matière de logement.
« Ces expulsions forcées sont la dernière attaque des autorités italiennes contre les Roms. Le ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini, s'est félicité de cette expulsion, y voyant un pas vers " la légalité, l'ordre et le respect " – en réalité, c'est tout le contraire.
« La Commission européenne, qui enquête sur les infractions à la législation européenne contre la discrimination commises par l'Italie vis-à-vis de la communauté rom, doit se décider à intenter une action juridique tant différée contre l'Italie et veiller à ce que justice soit enfin rendue aux Roms. »
Complément d’information
Près de 300 Roms, enfants et adultes, vivent à Camping River, à Rome, depuis 2005.
L'Associazione 21 Luglio, une ONG installée à Rome, a fait appel à la Cour européenne des droits de l'homme pour qu'elle ordonne des mesures provisoires afin de suspendre l'expulsion imminente et de garantir une véritable consultation et des solutions de relogement convenable pour les 300 habitants de longue date du camp. Après avoir examiné la requête, la Cour a ordonné cette semaine aux autorités italiennes de suspendre l'expulsion au moins jusqu'au 27 juillet.
Néanmoins, les autorités de Rome ont poursuivi leur démarche, invoquant des motifs d'hygiène. Selon l'Associazione 21 Luglio, une centaine de personnes se retrouvent sans logement décent.
Les expulsions forcées sont prohibées au titre du droit international en toutes circonstances, quelles que soient les motivations. L'Italie est tenue au titre de plusieurs traités internationaux et régionaux, dont le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) et la Convention européenne des droits de l’homme, de ne pas procéder à des expulsions forcées et de ne pas les favoriser.
L'histoire de l'Italie est marquée par la discrimination et la ségrégation des Roms en matière d'accès au logement. Des centaines d'expulsions forcées ont eu lieu ces dernières années et des milliers de personnes se sont retrouvées à la rue ou ont été placées dans des logements de remplacement inadaptés.
Depuis 2012, la Commission européenne enquête sur les allégations de discrimination et de ségrégation systématiques et généralisées à l’égard d’adultes et d’enfants roms, imputables aux autorités italiennes, en lien avec de nombreuses expulsions forcées, sur la discrimination en matière d'accès au logement et sur le maintien de camps spécifiques du fait de l'appartenance ethnique.
Le mois dernier, le ministre de l'Intérieur, Matteo Salvini, a demandé que les Roms soient recensés et que ceux qui n'ont pas la nationalité italienne soient expulsés.