• 23 Juil 2024
  • Syrie
  • Communiqué de presse

Syrie. Une nouvelle loi ouvre la voie à la justice pour les détenu·e·s condamnés à l’issue de procès entachés d’irrégularités dans le nord-est de la Syrie

En réaction à la décision récente de l’Administration autonome de la Syrie du Nord et de l’Est (autorités autonomes) d’adopter la Loi d’amnistie n° 10 de 2024, source d’espoir pour certaines personnes condamnées pour des infractions au titre des lois antiterroristes très générales de la région, ou pour celles qui se rendent dans les 90 jours de l’entrée en vigueur de la loi d’amnistie, Aya Majzoub, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnistie internationale, a déclaré : 

« La loi d’amnistie générale pourrait réduire les peines prononcées contre des Syrien·ne·s déclarés coupables à l’issue de procès iniques par les tribunaux de défense du peuple ou, dans certains cas, leur offrir la chance d’être libérés et de reprendre leurs vies. Des détenu·e·s ont été privés de la possibilité de consulter un avocat et, bien souvent, soumis à la torture et aux mauvais traitements dans le but de leur extorquer des « aveux ». En outre, les autorités autonomes doivent élargir la portée de la loi pour y inclure le petit nombre d’Irakien·ne·s également poursuivis devant les tribunaux de défense du peuple.

« Amnistie internationale salue cette mesure, mais demeure vivement préoccupée par la situation des dizaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants détenus par l’Administration autonome de la Syrie du Nord et de l’Est, la plupart depuis plus de cinq ans sans inculpation ni jugement.

« Les Nations Unies doivent rapidement se coordonner avec les autorités autonomes et la coalition militaire dirigée par les États-Unis, formée pour vaincre le groupe armé se désignant sous le nom d’État islamique, pour procéder sans délai à un filtrage en vue d’identifier ceux qui doivent faire l’objet d’une enquête et de poursuites pour des crimes relevant du droit international ou des crimes graves de droit national, et pour libérer tous les autres, et en priorité les groupes vulnérables comme les enfants et les victimes de la traite. » 

Complément d’information

Au cours des cinq années qui ont suivi la défaite territoriale du groupe armé État islamique (EI) en 2019 face aux Forces démocratiques syriennes et à la coalition militaire dirigée par les États-Unis pour vaincre l’EI, les autorités autonomes ont poursuivi devant leurs tribunaux de défense du peuple plus de 9 600 Syrien·ne·s et un petit nombre d’Irakien·ne·s qui seraient liés à l’EI. Elles ont également placé en détention arbitraire et pour une durée indéterminée – sans inculpation ni jugement – des dizaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants soupçonnés d’être affiliés à l’EI dans au moins 27 centres et deux camps de détention. 

En avril 2024, Amnistie internationale a publié un rapport intitulé Aftermath: Injustice, Torture and Death in Detention in North-east Syria, qui recense les violations d’ampleur et systématiques des droits des personnes piégées dans ce système de détention. La plupart sont détenues dans des conditions inhumaines et soumises à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements. Des hommes, des femmes et des enfants jugés par les tribunaux de défense du peuple sont confrontés à de nombreuses violations des droits à un procès équitable, et sont notamment soumis à la torture dans le but de leur extorquer des aveux et privés d’assistance juridique.

Au regard de ces violations du droit à un procès équitable devant les tribunaux de défense du peuple, Amnistie internationale avait déjà demandé aux autorités autonomes d’envisager une amnistie ciblée pour toutes les personnes condamnées en vertu des lois antiterroristes en vigueur dans le nord-est de la Syrie, chaque fois que les éléments de preuve sont insuffisants pour les soupçonner raisonnablement d’avoir commis un crime relevant du droit international ou un crime grave relevant du droit national.