Mozambique. Les autorités doivent enquêter sur les violences policières commises contre des manifestant·e·s
En réaction au recours illégal à la force par la Police de la République du Mozambique (PRM) pour réprimer les manifestations pacifiques qui ont suivi les élections municipales du 11 octobre, et notamment à l’homicide d’un adolescent de 16 ans dans la commune de Chiúre (province de Cabo Delgado), Tigere Chagutah, directeur régional pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnistie Internationale, a déclaré :
« Le recours illégal et injustifié de la police à la force contre des manifestant·e·s pacifiques constitue une violation du droit international relatif aux droits humains et ne respecte pas les normes régionales et internationales concernant l’usage de la force. Les actions que nous avons recensées, notamment l’utilisation injustifiée de gaz lacrymogène et les tirs à balles réelles, s’inscrivent dans un schéma inquiétant de tactiques dangereuses et illégales employées par la police du Mozambique contre les protestataires.
« Il est évident que l’intention de la police était de créer un climat d’intimidation visant à dissuader quiconque de tenter d’exercer son droit de manifester pacifiquement contre les autorités de l’État.
« Les autorités doivent ouvrir immédiatement une enquête approfondie et impartiale sur les policiers qui ont causé la mort d’un adolescent de 16 ans à Chiúre et blessé deux autres personnes qui manifestaient à Nampula et Gurúe, ainsi que sur tous les autres cas de recours illégal à la force, en veillant à ce que les responsables présumés soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables. »
Amnistie Internationale demande également la libération immédiate des centaines de sympathisant·e·s du principal parti d’opposition, la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO), qui ont été arrêtés arbitrairement pour avoir participé aux manifestations.
Complément d’information
Le 11 octobre 2023, des élections municipales se sont déroulées dans 65 communes du Mozambique. À la suite des manifestations pacifiques et des célébrations de victoires non confirmées par des membres et des sympathisant·e·s de la RENAMO, la police a répondu par la violence en ciblant les bastions de l’opposition.
Au Mozambique, il arrive régulièrement que des policiers tuent, blessent et arrêtent des manifestant·e·s en ayant recours à une force excessive et injustifiée. Depuis le début de l’année, la police a déjà réprimé au moins trois manifestations pacifiques et arrêté arbitrairement au moins 29 personnes qui n’avaient fait qu’exercer leur droit de réunion pacifique.
Le 25 janvier, la police antiémeutes (UIR) et la brigade canine ont empêché une marche rassemblant 130 employé·e·s de la municipalité de Namaacha, dans la province de Maputo, qui voulaient manifester contre un retard de paiement de cinq mois de leurs salaires.
Le 18 mars, la Police de la République du Mozambique (PRM) a tiré du gaz lacrymogène sur des centaines d’habitant·e·s des villes de Maputo et Beira qui s’étaient réunis pour rendre hommage à Edson da Luz (alias Azagaia), un rappeur mort le 9 mars 2023. Un jeune homme, Inocêncio Manhique, a perdu un œil, une femme, Belarmina, est morte et des dizaines de personnes ont été blessées lors de cette intervention policière. Vingt-deux personnes ont été arrêtées dans les deux villes. Le 14 août, la PRM a bloqué le passage d’un camion à plateforme ouverte qui transportait des sympathisant·e·s de Joaquim Quinito Vilanculo, candidat municipal de la RENAMO à Vilankulo, dans la province d’Inhambane.
Ces personnes avaient prévu de présenter leur candidat au public. Le 20 juillet, le Service national d’enquêtes judiciaires (SERNIC) a arrêté Macassar Bacar (alias Cebolinha) dans le quartier de Malhangalene à Maputo, la capitale du Mozambique. Celui-ci a ensuite été conduit au troisième poste de police de la ville. Le 21 juillet, on l’a retrouvé mort dans ce poste de police. Le 6 août, le SERNIC a arrêté Armando Munhequeia (alias Doppaz), un musicien, en l’accusant d’incitation à la violence et de diffamation envers le président de la République et sa famille. Doppaz a été détenu cinq jours avant d’être libéré sous caution.