Israël/TPO. Après quasiment deux années passées à l’isolement, Ahmad Manasra n’est pas en état d’assister à son audience
Le tribunal de district de Lod, en Israël, a reporté l’audience prévue le 20 septembre 2023 concernant la prolongation de la détention à l’isolement d’Ahmad Manasra, au motif que ce Palestinien âgé de 21 ans qui se trouve à l’isolement depuis novembre 2021 n’était pas en état d’y assister.
Khulood Badawi, chargé de campagne d’Amnistie Internationale sur Israël et les territoires palestiniens occupés, a déclaré :
« Ahmad Manasra a été conduit à l’unité de santé mentale de la prison d’Ayalon, après avoir passé près de deux ans à l’isolement. Les Services pénitentiaires israéliens ont demandé le renouvellement de son placement à l’isolement pour six mois supplémentaires, en violation flagrante du droit international. L’isolement prolongé, défini comme une période excédant 15 jours consécutifs, constitue une violation de l’interdiction absolue de la torture et de toute autre forme de traitement cruel, inhumain ou dégradant. Les autorités israéliennes font preuve d’une grande cruauté à l’égard d’Ahmad Manasra, dans le but de le pousser à bout. Il est aujourd’hui dans un tel état qu’il ne peut pas assister à sa propre audience. Pourtant, lorsqu’il a été autorisé à quitter la clinique, les autorités carcérales l’ont renvoyé à l’isolement et ont reprogrammé l’audience. Son cauchemar se répète, encore et encore.
« Ahmad Manasra a été diagnostiqué comme souffrant de graves troubles mentaux, notamment de schizophrénie et de grave dépression, qui lui ont déjà valu d’être hospitalisé. Les autorités israéliennes continuent d’ignorer les avertissements de psychiatres indépendants, selon lesquels sa vie est en danger s’il reste en prison. Pis encore, elles le condamnent à passer des années à l’isolement malgré ses problèmes de santé, montrant une fois encore leur mépris pour les droits, la santé et la vie des Palestinien·ne·s.
« Ahmad Manasra a vu son enfance s’évaporer alors qu’il se trouvait derrière les barreaux. C’est aujourd’hui un jeune homme et sa vie est définie par les violations qui contribuent à entretenir le système d’apartheid à l’égard des Palestinien·ne·s. Il est profondément traumatisé, mais il n’est pas trop tard pour reconstruire son avenir. Ahmad Manasra doit être libéré immédiatement, afin de pouvoir démarrer son processus de guérison avec le soutien de sa famille et de sa communauté. »
Il a été arrêté en 2015 en lien avec l’agression de deux jeunes Israéliens âgés de 20 et 13 ans, dans Jérusalem-Est occupée. Ils avaient été blessés par des coups de couteau. Alors que les tribunaux israéliens ont conclu qu’il n’avait pas participé à cette attaque au couteau, il purge une peine de neuf ans et demi de prison pour tentative de meurtre.
Complément d’information
Hassan, le cousin d’Ahmad, âgé de 15 ans, a été abattu sur les lieux de l’attaque en 2015, et Ahmad a été percuté par une voiture et grièvement blessé à la tête. Alors qu’il était étendu par terre, en sang, une foule nombreuse s’est rassemblée pour le huer et l’injurier. Sur les vidéos de son interrogatoire, on peut voir trois policiers israéliens lui crier des menaces et des insultes, alors qu’il est assis en sanglots, un bandage autour de la tête.
Ahmad Manasra a enduré plusieurs périodes d’isolement prolongé, en violation du droit international. Le 24 octobre 2021, il a été examiné par un psychologue clinicien israélien indépendant qui a diagnostiqué de graves troubles psychiatriques apparus, selon le rapport médical, depuis l’incarcération du jeune homme.
La demande de libération anticipée d’Ahmad Manasra pour raisons médicales a été rejetée par le tribunal de district de Beersheba pendant l’été 2022.