Inde. La protection des droits humains de la population de Jammu-et-Cachemire doit être au cœur des prochaines étapes
En réaction au jugement de la Cour suprême confirmant la décision prise par le gouvernement central en 2019 d’abroger l’article 370 de la Constitution indienne, qui accordait un statut particulier au territoire de Jammu-et-Cachemire, Aakar Patel, président du conseil exécutif d’Amnistie internationale Inde, a déclaré :
« Pendant des décennies, la population du territoire de Jammu-et-Cachemire a subi des violations graves de ses droits à l’intégrité physique et mentale, notamment des détentions arbitraires et des homicides illégaux, ainsi que de sa liberté d’expression et de mouvement et de son droit à la non-discrimination. Cette situation s’est encore aggravée après l’abrogation de l’article 370 de la Constitution indienne en 2019. Des dirigeant·e·s politiques de la région auraient été assignés à résidence en amont du jugement de ce lundi 11 décembre 2023, ce qui nous rappelle de manière brutale à quel point la peur et l’incertitude persistent sur le territoire.
« Dans ce contexte, bien que la décision rendue aujourd’hui par la Cour suprême laisse espérer un rétablissement de l’inclusion des voix cachemiries, toute initiative devra respecter pleinement les droits humains de la population de Jammu-et-Cachemire, notamment l’accès à la justice, à la vérité et aux réparations.
« À cet égard, l’appel à la mise en place d’une “commission de vérité et de réconciliation impartiale” afin d’enquêter sur les atteintes aux droits humains commises par des acteurs étatiques et non étatiques dans le territoire de Jammu-et-Cachemire depuis les années 1980 offre au gouvernement indien une occasion de réparer les injustices. Le gouvernement doit répondre à cet appel et faire preuve d’une forte volonté politique pour garantir la mise en place d’un processus transparent et consultatif, visant à créer une commission indépendante, dotée de fondements juridiques solides, ainsi que de financements et de pouvoirs conformes au droit international et aux normes internationales.
« Les droits humains de la population doivent être placés au cœur des mesures prises à l’avenir dans le territoire de Jammu-et-Cachemire. »
Complément d’information
Le 11 décembre 2023, un comité constitutionnel dirigé par le président de la Cour suprême Dhananjaya Yeshwant Chandrachud a confirmé, à l’unanimité, la décision prise par le gouvernement central en 2019 d’abroger l’article 370 de la Constitution indienne. La révocation de 2019 a été suivie d’une abolition du statut d’État du Jammu-et-Cachemire au sein du territoire indien, et de sa division en deux territoires de l’Union indienne distincts, directement régis par l’administration centrale.
Par ailleurs, la Cour suprême a ordonné lundi 11 décembre 2023 le rétablissement du statut d’État du Jammu-et-Cachemire dès que possible et a ordonné à la Commission électorale indienne d’organiser des élections pour l’Assemblée législative de l’État de Jammu-et-Cachemire avant le 30 septembre 2024.
Dans un avis concordant, le juge Sanjay Kishan Kaul a recommandé « la mise en place d’une commission de vérité et de réconciliation impartiale afin d’enquêter et de faire un rapport sur les atteintes aux droits humains » commises par des acteurs étatiques et non étatiques depuis les années 1980, et sur de possibles « mesures de réconciliation ».
Deux anciens Premiers ministres de l’État de Jammu-et-Cachemire et dirigeant·e·s de grands partis politiques du Cachemire, Omar Abdullah et Mehbooba Mufti, ont déclaré avoir été assignés à résidence sur le territoire. Pourtant, le lieutenant-gouverneur et la police du territoire de Jammu-et-Cachemire ont nié avoir placé quiconque en résidence surveillée.
Amnistie internationale a recueilli des informations sur la répression continue des droits au sein du territoire de Jammu-et-Cachemire depuis son changement de statut en 2019, après l’abrogation de l’article 370, et a appelé le gouvernement indien à mettre fin à l’utilisation de mesures illégales et d’obstacles injustes à l’exercice de plusieurs droits humains dans la région.