Égypte. Des Érythréen·ne·s risquent d’être expulsés de manière imminente
Les autorités égyptiennes doivent immédiatement mettre un terme à toutes les expulsions de ressortissants érythréens vers l’Érythrée, où ils risqueraient de subir de graves violations des droits humains, notamment des actes de torture, a déclaré Amnistie internationale.
Au cours des deux dernières semaines seulement, les autorités égyptiennes ont expulsé 31 Érythréen·ne·s, en violation de l'interdiction du refoulement inscrite dans le droit international. Un groupe de 50 personnes, dont un bébé et trois enfants de moins de sept ans, détenues dans la ville d'Assouan, dans le sud du pays, risquent désormais d'être expulsées. Elles n’ont pas pu solliciter l’asile ni contester les arrêtés d'expulsion.
« Ces expulsions constitueraient une grave violation des obligations de l'Égypte en vertu du droit international et doivent cesser immédiatement. Selon de nombreuses informations, les personnes renvoyées de force en Érythrée sont interrogées, détenues arbitrairement et torturées. Les autorités égyptiennes doivent accorder à ce groupe l'accès aux procédures d'asile et cesser de renvoyer des gens vers le danger, a déclaré Philip Luther, directeur des recherches et des actions de plaidoyer pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à Amnistie internationale.
« Nous appelons également les autorités égyptiennes à mettre fin à la détention arbitraire prolongée d'Érythréen·ne·s et à veiller à ce que, dans l'attente de leur libération, ceux qui sont enfermés soient détenus dans des conditions conformes aux normes internationales. »
Les Érythréen·ne·s détenus arbitrairement, y compris les enfants, le sont sans inculpation ni jugement dans des conditions cruelles et inhumaines, et sont privés de soins médicaux adéquats, de produits d'hygiène personnelle, notamment de serviettes hygiéniques, de vêtements et d’une nourriture suffisante.
En outre, il est fréquent que les autorités refusent d'accorder aux Érythréen·ne·s détenus l'accès au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), entravant ainsi leur droit de bénéficier d’une procédure d'asile.
Amnistie internationale a noté qu’avant de les expulser, les autorités égyptiennes les emmènent de force à leur ambassade pour obtenir des documents de voyage, avant de leur faire passer des tests PCR en vue de leur expulsion. Beaucoup sont détenus avec peu ou pas de contact avec le monde extérieur, ce qui rend difficile la vérification des informations sur les projets d'expulsion.
Une hausse inquiétante des expulsions
Ces derniers mois, Amnistie internationale a observé une hausse inquiétante du nombre d’expulsions depuis l'Égypte : 31 ressortissants érythréens, dont des enfants, ont été expulsés entre le 15 et le 17 mars ; au moins 40 ont été expulsés entre octobre et décembre 2021.
Ces expulsions violent le principe de non-refoulement, qui garantit qu’aucune personne ne soit renvoyée dans un pays où elle risque d'être victime de persécution, de torture, de traitements ou châtiments cruels, inhumains ou dégradants, ou d’autres formes de dommages irréparables.
L'une des principales raisons qui poussent les Érythréens à fuir leur pays est d'échapper aux atteintes aux droits humains et à une dure conscription militaire d’une durée indéterminée. L'ONU a constaté que ceux qui sont renvoyés de force chez eux courent un risque élevé de torture, de mauvais traitements et de disparition forcée.
En novembre 2021, des experts des droits humains de l'ONU ont publié une déclaration condamnant les expulsions depuis l'Égypte, et expliquant que les personnes renvoyées sont considérées comme des « traîtres » et sont souvent « arrêtées à leur arrivée en Érythrée, interrogées, torturées, détenues dans des conditions extrêmement punitives ou portées disparues ».
Complément d’information
En novembre 2021, 20 778 demandeurs·euses d'asile et réfugié·e·s érythréens étaient enregistrés auprès du HCR en Égypte. Le nombre de personnes ayant besoin de protection est probablement beaucoup plus élevé car tous les Érythréen·ne·s en Égypte n’ont pas de papiers ou ne sont pas enregistrés auprès du HCR.
Les autorités égyptiennes arrêtent régulièrement des Érythréens entrés illégalement dans le pays par ses frontières méridionales. Selon Refugees Platform, une ONG indépendante, des dizaines d’entre eux ont été détenus dans des postes de police dans les gouvernorats d'Assouan et de la mer Rouge en 2021.