Chine. Le capotage du vote sur le Xinjiang trahit la mission fondamentale du Conseil des droits de l'homme de l’ONU
Réagissant au rejet par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies – par 19 voix contre 17 et 11 abstentions – du projet de décision visant à tenir un débat sur la question de la région chinoise du Xinjiang, la secrétaire générale d’Amnistie internationale, Agnès Callamard, a déclaré :
« Le vote du 6 octobre protège les auteurs de violations des droits humains plutôt que les victimes ; avec ce résultat consternant, cet organe de défense des droits humains se retrouve dans une position grotesque puisqu’il ne s’aligne pas sur les conclusions du bureau des Nations unies chargé des droits humains.
« Le récent rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur le Xinjiang a représenté une importante avancée pour la lutte contre les crimes contre l’humanité et les autres graves violations des droits humains commis par le gouvernement chinois au Xinjiang, mais aujourd’hui, l’ONU a fait deux pas en arrière.
« Le fait que les États membres du Conseil des droits de l'homme décident avec leur vote de ne même pas discuter de la situation dans cette région alors que l’ONU elle-même dit que des crimes contre l’humanité pourraient y avoir été perpétrés tourne en ridicule tout ce que le Conseil est censé faire.
« Le silence des États membres – pire encore, leur décision de bloquer le débat – face aux atrocités commises par le gouvernement chinois ne fait que ternir davantage encore l’image du Conseil des droits de l'homme. Les intérêts politiques et économiques ne devraient pas faire barrage aux graves préoccupations relatives aux droits humains, et aucun État ne devrait échapper à la surveillance du Conseil des droits de l'homme.
« Le Conseil des droits de l'homme a aujourd’hui failli à sa mission première, qui est de protéger les victimes des violations des droits humains partout dans le monde, y compris dans des régions comme le Xinjiang.
« Malgré le résultat extrêmement décevant de ce vote, le combat pour la vérité et la justice pour les victimes et leurs familles continue. La proposition a été rejetée à une courte majorité et il est absolument nécessaire que les États membres du Conseil des droits de l'homme de l’ONU reconsidèrent ce vote et poursuivent leurs efforts visant à mettre en avant la situation des droits humains au Xinjiang sans tarder.
« Amnistie internationale va continuer d’exiger le respect de l’obligation de rendre des comptes même quand de nombreux gouvernements s’en abstiennent, et nous espérons que les experts de l’ONU ainsi que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme continueront de surveiller la situation. »
Informations complémentaires
Malgré les conclusions du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) publiées en août signalant que des crimes contre l’humanité pourraient avoir été commis dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, en Chine, les États membres du Conseil des droits de l'homme de l’ONU ont aujourd’hui voté contre l’adoption d’une décision visant à discuter de la situation des droits humains au Xinjiang (17 voix pour, 19 voix contre et 11 abstentions). Les débats auraient dû avoir lieu lors de la prochaine session ordinaire du HCDH en mars 2023.
Le rapport du HCDH fait état d’une pratique bien établie de la torture et d’autres mauvais traitements ainsi que de cas de violences sexuelles et liées au genre, entre autres violations des droits humains, et indique que les nombreux cas de détention arbitraire et discriminatoire de membres de la communauté ouïghoure et d’autres communautés majoritairement musulmanes pourraient constituer des crimes contre l’humanité. »
Depuis 2017, de nombreuses informations ont été recueillies sur la répression qu’exerce la Chine contre les Ouïghours, les Kazakhs et les autres minorités ethniques à majorité musulmane dans le Xinjiang, sous couvert de lutte contre le terrorisme. En 2021, Amnistie internationale a publié un rapport étoffé montrant que l’emprisonnement, la torture et la persécution – systématiques, de masse et organisés par l’État chinois – s’apparentaient à des crimes contre l’humanité.
La campagne d’Amnistie internationale Libérez les détenus du Xinjiang a, à ce jour, dressé le profil de 126 hommes et femmes qui font partie du million de personnes peut-être se trouvant en détention arbitraire dans des camps d’internement et des prisons dans le Xinjiang.