Venezuela. La priorité de l’enquête ouverte par le procureur de la CPI doit être de rendre justice aux victimes
En réaction à l’annonce par le bureau du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) de l’ouverture d’une enquête sur des crimes contre l’humanité qui auraient été commis au Venezuela, Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques d’Amnistie internationale, a déclaré :
« La Cour pénale internationale a enfin reconnu l’urgence d’enquêter sur les crimes contre l’humanité que de nombreuses organisations de défense des droits humains, dont Amnistie internationale, ont relevé et dénoncé depuis plusieurs années au Venezuela. Le bureau du procureur doit mener une enquête exhaustive sur les atrocités commises contre le peuple vénézuélien et engager des poursuites contre les personnes qui portent principalement la responsabilité de ces crimes contre l’humanité. »
Le procureur de la CPI a annoncé avoir conclu l’examen préliminaire de la situation au Venezuela – entamé en 2018 – et estimer que l’ouverture d’une enquête était justifiée. Le bureau du procureur avait précédemment établi que des crimes contre l’humanité avaient été commis au Venezuela depuis 2017 au moins, alors que le gouvernement de Nicolas Maduro était déjà au pouvoir, y compris des détentions arbitraires, des actes de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, des viols et d’autres formes de violences sexuelles, et des persécutions.
Lors d’une déclaration publique, le procureur Karim Khan et le président Nicolas Maduro ont expliqué avoir signé une « lettre d’entente ». Karim Khan a en outre souligné l’importance de la « complémentarité positive » dans son approche de l’enquête vénézuélienne.
« C’est la première enquête de la CPI sur un pays des Amériques. Pour être efficace, la CPI doit commencer le plus tôt possible et doit enquêter de manière impartiale sur les principaux responsables de la politique systématique de répression et de contrôle social menée au Venezuela au moins depuis 2014, comme l’a relevé la mission d’établissement des faits des Nations unies dans ses rapports de septembre 2020 et septembre 2021, a déclaré Erika Guevara-Rosas.
« Si une approche coopérative des enquêtes est souhaitable, le procureur doit néanmoins écouter les appels des victimes qui attendent encore d’obtenir justice et reconnaître que l’intervention de son bureau est urgente pour qu’une enquête efficace soit menée sans délai sur les crimes contre l’humanité commis au Venezuela. Le “principe de complémentarité” enjoint au procureur d’inciter les autorités vénézuéliennes à mener elles-mêmes des enquêtes indépendantes et impartiales dans le pays. Cependant, il ne doit pas s’effacer à tout prix devant les procédures des États, surtout lorsque ceux-ci n’ont pas véritablement la volonté ou la capacité d’enquêter et d’engager des poursuites sur des crimes de droit international – notamment dans le cas d’enquêtes visant des personnes haut placées ou qui sont principalement responsables de ces crimes.
« Avant tout, l’approche du procureur doit permettre que le droit à la justice des victimes et proches de victimes de violations des droits humains dans le pays soit respecté et concrétisé par la CPI et au Venezuela. Il est également primordial que les défenseur·e·s des droits humains qui ont demandé justice auprès de la CPI soient protégés contre toute forme de représailles. »