Les autorités militaires doivent mettre un terme aux arrestations arbitraires et enquêter sur l’homicide illégal de quatre personnes
Au lendemain du coup d’État militaire au Mali, au cours duquel des soldats du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) ont fait irruption au domicile du président Ibrahim Boubacar Keita et l’ont arrêté, ainsi que plusieurs hauts responsables, Samira Daoud, directrice pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale à Amnistie internationale, a déclaré :
« Nous sommes préoccupés par l’arrestation de plusieurs membres du gouvernement, notamment du président Ibrahim Boubacar Keita et du Premier ministre Boubou Cissé, par la junte militaire. Toutes les personnes appréhendées dans le cadre du coup d’État doivent être relâchées immédiatement ou inculpées d'infractions prévues par la loi. Nous demandons aux leaders de ce coup d’État de veiller à protéger les droits de l’ensemble de la population, y compris des personnes arrêtées, notamment en leur permettant de consulter les avocats de leur choix et de contacter leur famille, et en clarifiant sur quelle base légale repose leur détention.
« Nous avons recensé quatre morts le 18 août au soir et 15 blessés. Toutes les victimes ont été touchées par balles, dans des circonstances floues, et ont été conduites à l’hôpital Gabriel Touré, dans la capitale Bamako.
« Nous appelons le Comité national pour le salut du peuple (CNSP) à enquêter sur les circonstances entourant ces violences et, si des éléments attestent de crimes et de violations des droits humains, à amener les responsables présumés à rendre des comptes dans le cadre de procès équitables.
« Amnistie internationale suit de près la situation au Mali et exhorte les autorités militaires à respecter et défendre les droits humains et le droit international relatif aux droits humains, et à révéler le sort réservé aux personnes arrêtées durant le coup d’État. »
Complément d’information
Depuis le mois de juin, le Mali est ébranlé par un vaste mouvement de contestation réclamant la démission du président Ibrahim Boubacar Keita, à l’initiative du Mouvement du 5 Juin-Front patriotique de résistance (M5-RFP). Les manifestations du 10 juillet ont été violemment réprimées par les forces de sécurité, se soldant par au moins 14 morts et 300 blessés.
La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a servi de médiateur auprès des parties concernées pour trouver une solution à la crise politique, qui a suivi la proclamation des résultats des élections législatives en avril 2020. C’est dans ce contexte politique tendu que s’est déroulé le coup d’État.
Une mutinerie a éclaté à la caserne de Soundiata-Keïta le 18 août. Dans le milieu de l’après-midi, les mutins ont arrêté le président Ibrahim Boubacar Keita chez lui, à Sébénikoro, quartier de Bamako, ainsi que le Premier ministre Boubou Cissé. Tous deux ont été conduits à Kati.
D’après certaines informations, plusieurs hauts responsables ont également été arrêtés dans la matinée, notamment le ministre des Finances Abdoulaye Daffé, le ministre des Affaires étrangères Tiébilé Dramé et le ministre de la Défense, le général Ibrahim Dahirou Dembelé.
Au cours de la soirée, le président Ibrahim Boubacar Keïta a annoncé à la télévision la dissolution du gouvernement, de l’Assemblée nationale et sa démission, déclarant : « Je ne souhaite qu'aucun sang ne soit versé pour mon maintien aux affaires. »
Si la CEDEAO, l’Union africaine et l’ONU ont condamné le coup d’État, les putschistes ont appelé de leurs vœux un gouvernement de transition civile et de nouvelles élections.
Dans une déclaration, la CEDEAO a suspendu le Mali de tous ses organes de prises de décision, annoncé la fermeture des frontières avec le Mali et appelé à la mise en place immédiate de sanctions contre les leaders du coup d’État et leurs collaborateurs.
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