• 27 fév 2019
  • Türkiye
  • Communiqué de presse

Des ONG s’unissent pour défendre la société civile et la protéger de la destruction

Des ONG de premier plan en Turquie se sont unies pour demander que soient retirées les allégations absurdes proférées à l’encontre d’Osman Kavala et de 15 autres éminents représentants de la société civile, et qu’il soit mis fin à la répression et à l’incrimination croissantes de la société civile.

La lettre ouverte signée par ces 10 organisations, parmi lesquelles figurent Amnistie internationale et Human Rights Watch, demande qu’il soit mis fin à la campagne d’intimidation et de harcèlement judiciaire des militants de la société civile en Turquie.

Texte intégral de la lettre

Nous opposons un front uni contre les mesures de destruction de la société civile

Réagissant aux allégations absurdes proférées à l’encontre d’Osman Kavala et de Yiğit Aksakoğlu, qui sont tous les deux maintenus en détention dans l’attente de leur procès, et de 14 autres éminents représentants de la société civile, qui sont tous accusés de « tentative de renversement du gouvernement », les ONG soussignées demandent qu’il soit mis fin à la répression et à l’incrimination croissante de la société civile.

Au cours des cinq derniers jours, des informations qui sont sensées concerner l’inculpation de ces 16 représentants de la société civile ont été divulguées par les médias grand public en Turquie dans le cadre d’une campagne coordonnée de désinformation. Selon des informations qui auraient été divulguées concernant leur inculpation, que les avocats représentant les personnes mises en cause n’ont toujours pas vue, les accusations portent sur les manifestations de 2013 dans le parc Gezi – il s’agit d’un mouvement de protestation très majoritairement pacifique qui a été réprimé par le gouvernement avec de nombreuses violences policières.

Un groupe plus nombreux encore d’éminents représentants de la société civile continue de faire l’objet d’investigations dans le cadre de la même enquête. Les personnes faisant l’objet d’une enquête et celles qui sont inculpées n’ont aucune responsabilité dans les manifestations du parc Gezi, qui devraient être considérées comme une question de liberté d'expression, ni dans quelque infraction que ce soit. Le tribunal devrait rejeter toute inculpation fondée sur d’absurdes allégations de conspiration sans aucune preuve valable, et Osman Kavala et Yiğit Aksakoğlu, qui sont incarcérés depuis 16 et trois mois respectivement, doivent être immédiatement remis en liberté.

Cette dernière attaque en date contre la société civile intervient à un moment où les défenseurs des droits humains et les autres militants de la société civile font de plus en plus l’objet d’arrestations, de poursuites judiciaires et d’un emprisonnement uniquement parce qu’ils ont dénoncé des violations des droits humains ou demandé la vérité, la justice et des possibilités d'obtenir réparation.

La septième audience du procès dit « de Büyükada » de 11 défenseurs des droits humains se tiendra le mois prochain. Aucun élément de preuve n’a été produit lors de ce procès à l’appui des fausses accusations de terrorisme, qui sont basées uniquement sur les activités de défense des droits humains des accusés.

Aujourd’hui, les défenseurs des droits humains Şebnem Korur Fincancı, Erol Önderoğlu et Ahmet Nesin comparaissent devant la justice parce qu’ils sont accusés d’avoir fait de la « propagande terroriste » en participant à une action de solidarité avec le journal, à présent fermé, Özgür Gündem. Les journalistes qui travaillaient pour Özgür Gündem font eux aussi l’objet d’une campagne de harcèlement judiciaire. Il y a deux mois, Şebnem Korur Fincancı a été déclarée coupable de « propagande terroriste » et condamnée à deux ans et demi d’emprisonnement pour avoir signé la « Pétition pour la paix ». Un recours a été formé contre cette décision devant la cour d’appel régionale. Or, dans d’autres affaires, ces cours d’appel n’ont absolument pas fait preuve d’indépendance à l’égard du gouvernement. La défenseure des droits humains Eren Keskin, qui a pris les fonctions de corédactrice en chef d’Özgür Gündem pour manifester sa solidarité avec le journal, comparaît elle aussi devant la justice avec plus de 100 autres accusés. Parallèlement à cela, 129 membres d’Universitaires pour la paix ont été condamnés à des peines d’emprisonnement. Vingt-cinq d’entre eux seront incarcérés si la cour d’appel régionale confirme leur peine d’emprisonnement. Leurs recours sont en cours d’examen.

Les actions de solidarité avec les journalistes d’Özgür Gündem et avec les membres d’Universitaires pour la paix qui ont été déférés à la justice font partie des initiatives dont le gouvernement se sert pour réprimer et réduire au silence des centaines de militants de la société civile en Turquie. Cela se produit alors que les tribunaux prononcent des peines d’emprisonnement de plus en plus lourdes pour des actes similaires de dissidence légitime et pacifique.

Les traités internationaux auxquels la Turquie est partie insistent tout particulièrement sur l’importance du rôle que jouent les défenseurs des droits humains, la société civile et la presse libre pour le respect des droits humains et des libertés fondamentales. La protection efficace de la liberté, de la sécurité, de la dignité et de l’intégrité physique des défenseurs des droits humains est indispensable pour garantir le droit de défendre les droits humains.

Le droit international insiste également sur le fait que les États ont la responsabilité fondamentale de protéger les défenseurs des droits humains. L’État a la responsabilité ultime de protéger tous les droits dont disposent les défenseurs des droits humains, notamment les droits à la liberté de pensée et d’expression et les droits à la liberté d’association et de réunion pacifique.

Nous, organisations soussignées, opposons un front uni aux tentatives de destruction de la société civile indépendante en Turquie, appelons à ce qu’il soit mis fin à la campagne d'intimidation et de harcèlement judiciaire des militants de la société civile en Turquie et rappelons une fois de plus aux autorités qu’elles ont l’obligation de protéger les défenseurs des droits humains au titre du droit international.

Civil Rights Defenders

Association pour la surveillance de l’égalité des droits (Eşit Haklar İçin İzleme Derneği)

Centre pour la mémoire (Hakikat Adalet Hafıza Merkezi)

Initiative pour les droits (Hak İnisiyatifi Derneği)

Association pour les droits humains (İnsan Hakları Derneği)

Association pour le programme des droits humains (İnsan Hakları Gündemi Derneği)

Reporters sans frontières (Sınır Tanımayan Gazeteciler)

Fondation de droits humains en Turquie (Türkiye İnsan Hakları Vakfı)

Rassemblement des citoyens (Yurttaşlık Derneği)

Amnistie internationale (Uluslararası Af Örgütü)