La Cour constitutionnelle blanchit des universitaires accusés sans fondement de « propagande terroriste »
Dans un arrêt du 26 juillet 2019, la Cour constitutionnelle turque a conclu que la condamnation de plusieurs universitaires accusés de « propagande pour une organisation terroriste » parce qu'ils avaient signé une pétition en faveur de la paix en 2016 était une violation de leur droit à la liberté d'expression. En réaction à cette nouvelle, Milena Buyum, chargée de campagne d'Amnistie internationale sur la Turquie, a déclaré :
« La Cour constitutionnelle a confirmé ce que nous avons toujours su : la pétition des universitaires appelant à la paix ne constituait en rien une infraction. Il s'agissait de l'expression d'une opinion légitime, protégée par le droit à la liberté d'expression, et l'appel pacifique des universitaires a toujours été parfaitement clair pour toutes les personnes qui l'ont lu.
« Les universitaires qui ont signé cette pétition en faveur de la paix n'auraient jamais dû être poursuivis, et encore moins condamnés à des peines d'emprisonnement. Cette décision de la juridiction suprême du pays doit mettre un terme aux poursuites grotesques engagées contre eux.
« L'annonce de la Cour constitutionnelle est une bonne nouvelle mais elle n'efface pas les actions en justice inéquitables et arbitraires visant des centaines d'universitaires qui avaient donné leur signature pour soutenir la paix. Cette décision doit entraîner l'arrêt immédiat des poursuites et l'annulation des condamnations déjà prononcées. »
Complément d'information
Cette pétition avait été lancée le 11 janvier 2016 et appelait à la reprise de négociations de paix entre le gouvernement et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), critiquant les opérations militaires engagées dans le sud-est de la Turquie, à population majoritairement kurde. Elle avait été signée au total par 2 212 universitaires.
Plus de 700 d'entre eux ont été inculpés de « propagande pour une organisation terroriste », et plusieurs ont été reconnus coupables et condamnés à des peines allant jusqu'à trois ans de prison. Le 3 mars 2019, une cour d'appel régionale a confirmé la condamnation à un an et trois mois d'emprisonnement d'une des signataires, la professeure Zübeyde Füsun Üstel. Elle a été libérée le 22 juillet, après une décision de justice suspendant l'exécution de sa peine en attendant qu'il soit statué sur son recours. Elle fait partie des personnes qui avaient saisi la Cour constitutionnelle, donnant lieu à l'arrêt du 26 juillet 2019.
Plusieurs centaines de signataires ont aussi été arbitrairement licenciés ou contraints de démissionner de leur poste dans diverses universités publiques et privées de Turquie. Parmi les personnes révoquées, 406 ont également été exclues à vie de la fonction publique pour des « liens » non spécifiés « avec des organisations terroristes », en application de décrets gouvernementaux pris pendant les deux années d’état d'urgence.