La libération de militants est bienvenue, mais il faut aller plus loin
La libération de militants incarcérés à tort en Azerbaïdjan est un pas en avant dans la bonne direction, mais il faut faire davantage pour transformer le climat de peur et de répression qui règne dans le pays, a déclaré Amnistie internationale le 18 mars 2019.
Le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev a signé un décret le 16 mars à l’occasion de la fête de Norouz (nouvel an perse), accordant la grâce à plus de 400 détenus, dont de jeunes militants et des opposants politiques, incarcérés à tort pour des accusations forgées de toutes pièces. Parmi les personnes libérées figurent des prisonniers d’opinion de longue date détenus uniquement pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression : Ilkin Rustamzade, membre du mouvement de jeunesse NIDA, incarcéré depuis 2013 pour avoir critiqué le gouvernement, et les jeunes militants Bayram Mammadov et Giyas Ibrahimov, incarcérés depuis 2016 en raison d’un graffiti critique réalisé sur la statue de l’ancien président azerbaïdjanais Heydar Aliyev.
Fuad Garhamanli, prisonnier d’opinion et vice-président du Front populaire d'Azerbaïdjan, un parti d'opposition, a lui aussi été libéré. Incarcéré depuis 2017, il était notamment accusé d’avoir appelé à des violences de masse, uniquement en raison d’un commentaire publié sur Facebook dans lequel il critiquait la gestion par les autorités des opérations de sécurité menées dans le village de Nardaran.
Si Amnistie internationale se réjouit de voir ces militants injustement incarcérés retrouver leurs familles, cette mesure ne suffira pas à modifier le climat général de répression qui règne en Azerbaïdjan. Selon des organisations locales de défense des droits humains, la grâce accordée cette année à l’occasion de Norouz concerne 51 prisonniers incarcérés pour des accusations purement politiques. Or, elles précisent qu’au moins 74 autres militants, journalistes et opposants injustement emprisonnés demeurent derrière les barreaux. L’Azerbaïdjan conserve une législation répressive qui est un vrai frein au travail des organisations de la société civile, notamment des obligations très lourdes pour les ONG en matière d’enregistrement et de financement. Le pays reste fermé à tout examen en matière de droits humains et les observateurs internationaux, dont Amnistie internationale, ne sont toujours pas autorisés à s’y rendre.
L’Azerbaïdjan doit veiller à ce que toutes les personnes incarcérées et condamnées à l’issue de procès iniques voient leurs condamnations annulées et soient immédiatement libérées ou, lorsqu’il existe des preuves suffisantes pour les inculper d’une infraction pénale dûment reconnue par le droit international, bénéficient d’un nouveau procès respectant les normes internationales d’équité. L’Azerbaïdjan doit aussi réformer sa législation et autoriser les organisations de la société civile à fonctionner librement, notamment en supprimant les obligations très lourdes en matière d’enregistrement et de financement. Enfin, les autorités à Bakou doivent accueillir des observateurs internationaux de la situation des droits humains, dont Amnistie internationale.
Quant aux partenaires internationaux de l’Azerbaïdjan, particulièrement l’Union européenne, il leur revient de faire pression sur les autorités afin que ces libérations s’accompagnent de réformes plus générales en matière de droits humains, en vue d’en finir avec le climat de peur et de répression qui règne dans le pays.