• 7 mai 2018
  • Thaïlande
  • Communiqué de presse

Quatre ans après la disparition d’un défenseur des droits humains, sa famille attend toujours d’obtenir justice

Cela fait quatre ans que Pholachi Rakchongcharoen, défenseur des droits humains également connu sous le nom de Billy, a été vu pour la dernière fois alors qu’il se trouvait aux mains d’un fonctionnaire du parc national de Kaeng Krachan, dans l’ouest de la Thaïlande. Amnistie internationale déplore le fait que les autorités n’ont fourni aucune information à sa famille au sujet de son sort et du lieu où il se trouve, et condamne les obstacles officiels que sa famille doit surmonter dans sa quête pour la justice.

L’anniversaire de la disparition de Billy est un rappel brutal que les autorités thaïlandaises doivent de toute urgence mettre en place un cadre légal et institutionnel empêchant les disparitions forcées et involontaires, facilitant l’octroi de réparations et reconnaissant les droits de ses victimes, dont les proches des disparus et les autres parties touchées par leur disparition, pour qui une disparition est une violation durable de leurs droits et une source de souffrance.

Les obstacles auxquels sa famille se heurte vont de l’absence d’enquête convenable sur sa disparition forcée à des retards dans l’adoption d’un projet de loi érigeant en infraction les disparitions forcées. Les autorités ont également introduit récemment des amendements à ce projet de loi qui, s’ils ne sont pas modifiés, mettraient en péril la protection future contre les disparitions et supprimeraient des garanties juridiques importantes contre cette violation.

Amnistie internationale appelle une nouvelle fois les autorités à veiller à ce qu’une enquête indépendante, impartiale, efficace et approfondie sur cette disparition soit menée, notamment par le Service des enquêtes spéciales, jusqu’à ce que l’on sache où cet homme se trouve. L’organisation leur demande également de veiller à ce que des réparations complètes soient accordées à sa famille et aux autres personnes touchées, notamment en amenant les responsables présumés à rendre des comptes. L’organisation demande également aux autorités de donner la priorité au projet de loi relative à la prévention et à la suppression de la torture et des disparitions forcées, afin que celui-ci respecte les obligations juridiques internationales de la Thaïlande, dont la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, et à l’adopter sans délai. La Thaïlande doit également assurer le suivi de la résolution prise par son Assemblée législative nationale de mars 2017 visant à ratifier cette Convention, qu’elle a déjà signée.

Pholachi Rakchongcharoen, également connu sous le nom de Billy, avait 30 ans quand il a disparu dans le parc national de Kaeng Krachan le 17 avril 2014, après avoir été placé en détention le même jour par des fonctionnaires du parc, qui ont déclaré qu’ils l’avaient arrêté pour « possession illégale de miel sauvage » et l’avaient libéré plus tard dans la journée. On pense qu’il a été soumis à une disparition forcée et involontaire, une grave violation des droits humains et un crime aux termes du droit international.

Au moment de sa disparition, il rassemblait des informations, avec d’autres militants et villageois karens résidant dans le parc de Kaeng Krachan, en vue de poursuites judiciaires concernant l’incendie des domiciles et d’autres biens de villageois en 2010 et 2011, qui aurait été commis par des fonctionnaires du parc national.

Ses proches ont demandé à ce qu’une enquête soit menée par le Service des enquêtes spéciales mais ils se sont heurtés à des détails techniques – les autorités n’ont notamment pas reconnu le droit de Pinnapha Prueksapan, concubine de Billy et mère de ses cinq enfants, d’intervenir en son nom car ils n’étaient pas mariés légalement. Les autorités auraient également déclaré que le Service des enquêtes spéciales ne pouvait pas mener d’enquête sur une disparition forcée car aucun corps n’avait été retrouvé, ce qui est contraire aux normes internationales en matière d’enquête sur les morts illégales.

Amnistie internationale appelle les autorités à rectifier sans délai cette réponse tardive et inappropriée concernant l’enquête sur la disparition de Billy, qui souligne le fait que la Thaïlande ne fournit pas de recours et de réparations effectifs aux victimes de violations des droits humains. Cela exacerbe également le risque grave et inacceptable de futures violations des droits des défenseurs des droits humains impliqués dans des activités légitimes visant à aborder publiquement le problème des violations des droits humains et à les empêcher en Thaïlande.