Pakistan. Il faut libérer immédiatement et sans condition une défenseure pachtoune des droits humains
Les autorités pakistanaises doivent libérer immédiatement et sans condition Gulalai Ismail, une défenseure pachtoune des droits humains arrêtée à son arrivée à l'aéroport d'Islamabad le 12 octobre 2018, a déclaré Amnistie internationale.
Gulalai Ismail est une sympathisante du Mouvement pour la protection des Pachtounes (PTM, Pashtun Tahaffuz Movement), mouvement pacifique qui milite à travers le Pakistan contre les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires et la discrimination à l'égard de la minorité ethnique pachtoune.
« Gulalai Ismail doit être libérée immédiatement et sans condition. Rien ne justifie en aucune façon de la maintenir en détention ou de lui interdire de voyager. Elle est détenue uniquement en raison de son action pacifique en faveur des droits humains », a déclaré Rabia Mehmood, chercheuse sur l'Asie du Sud à Amnistie internationale.
Gulalai Ismail, fondatrice du réseau Seeds of Peace et lauréate du prix Anna Politkovskaïa 2017, a été arrêtée à l'aéroport d'Islamabad à son retour de Londres.
Dès son arrivée à Islamabad, elle a été informée que son nom avait été inscrit sur la liste des personnes dont la sortie du territoire est soumise à contrôle par le Pakistan, ce qui lui interdit de sortir du territoire.
Au cours de l'année, les rassemblements pacifiques organisés par le Mouvement pour la protection des Pachtounes (PTM) ont été interdits et certains de ses principaux membres ont été arbitrairement arrêtés et se sont vus interdire de se rendre à l'étranger. Certains ont été inculpés d'une série d'accusations portant sur la sédition et les cybercrimes.
Hayat Preghal, militant actif sur les réseaux sociaux et sympathisant du PTM, a été libéré sous caution le 3 octobre, après plus de deux mois passés en prison uniquement parce qu’il était accusé d’avoir publié des posts sur les réseaux sociaux jugés critiques envers les autorités pakistanaises.
Gulalai Ismail a adressé un message audio sur WhatsApp à des amis et sympathisants depuis les locaux de la police judiciaire fédérale du Pakistan, dans lequel elle a déclaré qu'elle était sur le point d'être arrêtée. « J'ai été placée en garde à vue à l'aéroport, dit-elle dans ce message audio. J'ai été conduite à la division principale de la police judiciaire fédérale, où la police va venir m'arrêter pour avoir fait un discours pour le PTM lors du [rassemblement] à Swabi. »
Gulalai Ismail figurait parmi 19 personnes citées dans une plainte de la police pour avoir organisé et pris la parole lors d'un rassemblement du PTM dans la ville de Swabi, dans le nord-ouest du pays, le 12 août. Les militants du PTM sont notamment accusés de « rassemblement illégal », « sanction pour émeute » et « sanction pour contrainte injustifiée ».
Dans son message, Gulalai Ismail affirmait que son arrestation était le dernier signe indiquant l'ampleur du rétrécissement de l'espace civique au Pakistan. « Ce n'est pas une attaque contre Gulalai Ismail, ni contre le PTM, a-t-elle ajouté. Il s'agit d'une attaque contre nos droits civiques. D'une attaque contre notre liberté d'expression. D'une attaque contre notre liberté de parole. »
« Cette mesure est extrêmement inquiétante. Le nouveau gouvernement du Premier ministre Imran Khan avait déclaré qu'il protègerait les droits humains et engagerait le dialogue avec les membres du PTM pour s'attaquer à des questions telles que les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires, a déclaré Rabia Mehmood.
« L'arrestation de Gulalai Ismail remet gravement en cause ces engagements. Au lieu de chercher à faire taire les défenseurs des droits humains, le nouveau gouvernement doit créer un cadre sécurisé et porteur pour ceux qui font entendre leur voix en faveur de la justice. »
Voici le message audio de Gulalai Ismail :
« Je m'appelle Gulalai Ismail. Des acteurs étatiques et non-étatiques se livrent à une répression illégale à mon encontre, parce que je milite en faveur des droits humains et que je m’exprime en faveur de la construction de la paix. Aujourd'hui, mon nom a été inscrit sur la liste des personnes dont la sortie du territoire est soumise à contrôle par le Pakistan. À mon retour de Londres, au service d'immigration de l'aéroport, j'ai appris que mon nom avait été ajouté à cette liste. J'ai été placée en garde à vue à l'aéroport. J'ai été conduite à la division principale de la police judiciaire fédérale, où la police vient m'arrêter pour avoir pris la parole, pour avoir fait un discours pour le PTM à Swabi. Alors la police vient m'arrêter. Cela illustre la manière dont l’État réduit l'espace dédié aux organisations de la société civile. L'espace se réduit et les voix civiques, les voix qui s'élèvent pour la paix ont de moins en moins de place. Nous prônons la construction de la paix... Ce n'est pas une attaque contre Gulalai Ismail, ni contre le PTM. Il s'agit d'une attaque contre nos droits civiques. D’une attaque contre notre liberté d'expression. D’une attaque contre notre liberté de parole. »