Il faut abandonner les poursuites « paralysantes » contre les dirigeants des manifestations pro-démocratie
* Le procès de neuf dirigeants du « mouvement des parapluies » doit s'ouvrir lundi 19 novembre.
Le gouvernement de Hong Kong doit abandonner les poursuites motivées par des considérations politiques intentées contre neuf dirigeants des manifestations pro-démocratie du « mouvement des parapluies » de 2014, car il s'agit d'une atteinte à la liberté d'expression et de réunion pacifique, a déclaré Amnistie internationale à la veille de l'ouverture de leur procès le 19 novembre.
Parmi les neuf militants jugés au tribunal de première instance de West Kowloon figurent les cofondateurs du mouvement « Occupy Central » - Benny Tai Yiu-ting, professeur de droit, Chan Kin-man, professeur de sociologie, et Chu Yiu-ming, pasteur à la retraite - qui encourent chacun une peine maximale de sept ans de prison. Les six autres coaccusés sont des leaders étudiants, des parlementaires et des dirigeants de partis politiques.
« Ce procès est un acte de représailles visant à bâillonner le mouvement pro-démocratie. Les accusations portées contre les neuf militants doivent être abandonnées, car le gouvernement fonde son dossier uniquement sur l'exercice légitime des droits à la liberté d'expression et de manifestation pacifique, a déclaré Man-kei Tam, responsable d'Amnistie internationale Hong Kong.
« Le parquet utilise des charges délibérément vagues et ambiguës, ce qui aura de graves conséquences pour la liberté d'expression et de réunion pacifique à Hong Kong. »
Dans une synthèse publiée le 16 novembre, Amnistie internationale explique pourquoi les accusations portées contre les neufs militants constituent une atteinte aux droits humains et souligne les conséquences importantes des poursuites liées au mouvement des parapluies.
Les poursuites contre les trois leaders d’« Occupy Central » sont axées sur la planification et la mise en œuvre d'une campagne pro-démocratie, notamment sur une action directe non violente visant à bloquer les routes à Central, un quartier de Hong Kong. Appelant à élire démocratiquement le chef du gouvernement de la ville, cette campagne est devenue partie intégrante des vastes manifestations en faveur de la démocratie du « mouvement des parapluies », qui se sont déroulées de manière généralement pacifique pendant 79 jours entre septembre et décembre 2014.
Les six autres militants poursuivis sont deux dirigeants étudiants, Tommy Cheung Sau-yin et Eason Chung Yiu-wah, deux parlementaires, Tanya Chan et Shiu Ka-chun, et deux dirigeants politiques, Raphael Wong Ho-ming et Lee Wing-tat.
Fait inhabituel, les procureurs ont décidé de fonder les charges portées contre ces neuf personnes sur l'infraction de « trouble à l'ordre public » en vertu de la common law (droit coutumier), ce qui rend les accusations encore plus ambiguës et entraîne des sentences plus lourdes que des charges similaires en vertu de la loi écrite.
Ils présentent comme éléments de preuve majeurs des conférences de presse, des interviews dans les médias et des réunions publiques au cours desquelles les leaders pro-démocratie ont débattu de leur campagne de désobéissance civile non-violente.
Autres piliers du dossier de l'accusation, les vidéos filmées par la police où l'on voit les neuf militants participer pacifiquement aux deux premiers jours du mouvement des parapluies, y compris en orientant les manifestants vers différentes rues devant le siège du gouvernement ou en incitant d'autres personnes à l'aide de mégaphones à se joindre aux manifestations.
« Si le ministère public obtient gain de cause, le danger est réel que les citoyens soient de plus en plus inculpés pour des activités pacifiques. Les autorités semblent vouloir museler tout débat sur les questions sensibles à Hong Kong, notamment les questions relatives à la démocratie et à l'autonomie », a déclaré Man-kei Tam.
Complément d’information
Il s’agit des dernières poursuites en date engagées par le gouvernement de Hong Kong contre des manifestants du « mouvement des parapluies » depuis la condamnation de trois dirigeants étudiants en 2017. Plus de quatre ans après le début du mouvement, des centaines de manifestants sont toujours dans un vide juridique, ne sachant pas si la police va engager des poursuites à leur encontre.
Ce procès s'ouvre dans un contexte très inquiétant quant à l'érosion des droits à la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique à Hong Kong. Le 9 novembre, le rédacteur en chef du Financial Times Asia, Victor Mallet, s'est vu refuser l'entrée à Hong Kong. Ce refus lui a été signifié un mois après que les autorités de Hong Kong ont refusé de renouveler son visa de travail, semble-t-il à titre de représailles, car Victor Mallet avait organisé un débat avec un militant favorable à l'indépendance au local du Club des correspondants étrangers en août.
Début novembre, l'artiste chinois dissident Badiucao a annulé sa première exposition à Hong Kong, invoquant les menaces pour sa sécurité formulées par les autorités chinoises.