Il faut libérer un défenseur des droits humains condamné à 32 ans de réclusion
Des porte-parole sont disponibles pour donner des interviews
Il faut que les autorités burundaises annulent la peine de 32 ans de réclusion prononcée à l’encontre du défenseur des droits humains Germain Rukuki et le libèrent, a déclaré Amnistie internationale après le procès en appel, qui s’est ouvert le 26 novembre.
« Germain a été jugé et emprisonné uniquement parce qu’il travaillait pour une organisation de défense des droits humains. Par conséquent, il faut que la cour d’appel annule sa peine et le libère immédiatement et sans condition, a déclaré Joan Nyanyuki, directrice du programme Afrique de l’Est, Corne de l’Afrique et Grands Lacs à Amnistie internationale.
« L’État burundais doit aussi libérer tous les autres prisonniers et prisonnières d’opinion et permettre aux défenseur·e·s des droits humains de mener leurs activités sans craindre de représailles. »
Germain Rukuki a été arrêté le 13 juillet 2017 à Bujumbura, la capitale, et inculpé le 1er août. Les charges retenues contre lui reposaient sur son appartenance passée à l’ACAT-Burundi, une organisation contre la torture qui a été suspendue pendant la dernière partie de l’année 2015 puis fermée de façon permanente en octobre 2016.
Germain Rukuki a été jugé par le tribunal de grande instance de Ntahangwa à la prison de Ngozi, où il avait été transféré deux semaines après son arrestation. Ni ses avocat·e·s ni lui n’étaient présents lorsque le tribunal a prononcé son jugement, le 26 avril 2018. La décision était attendue pour début mai.
Germain Rukuki a été déclaré coupable de « rébellion », d’« atteinte à la sûreté de l’État », d’« atteinte à l’autorité de l’État » et de « participation à un mouvement insurrectionnel ». En revanche, il a été relaxé des chefs d’« assassinat » et de « destruction de bâtiments publics et privés ».
En juin 2018, il a été hospitalisé et opéré d’une fracture à la cheville droite à la suite d’un accident survenu en prison. Il a aussi été blessé à l’épaule et la jambe droites. Après son retour en cellule, il a fait une demande de liberté provisoire afin de pouvoir bénéficier de soins médicaux adaptés et d’une rééducation complète à l’hôpital. Aucune décision à ce sujet n’a été communiquée pour l’instant.
« Les autorités sont tenues d’assurer la prise en charge médicale de Germain Rukuki tant qu’elles le détiennent et de veiller à ce qu’il bénéficie de tous les soins nécessaires pour ses blessures, y compris les soins postopératoires dont il a besoin, a déclaré Joan Nyanyuki.
Nestor Nibitanga, un autre défenseur des droits humains emprisonné, a été déclaré coupable d’« atteinte à la sûreté de l’État » et condamné à cinq ans d’emprisonnement le 13 août 2018. Observateur au sein de l’Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH) avant la fermeture forcée de celle-ci, il a été arrêté en novembre 2017.
Parmi les autres personnes emprisonnées à cause de leurs activités en faveur des droits humains figurent Aimé Constant Gatore, Marius Nizigama et Emmanuel Nshimirimana, qui travaillaient à Parole et action pour le réveil des consciences et l’évolution des mentalités (PARCEM). Ils ont été arrêtés en juin 2017 et condamnés à 10 ans d’emprisonnement le 8 mars 2018 pour « atteinte à la sûreté de l’État ».
Amnistie internationale considère tous ces hommes comme des prisonniers d’opinion, détenus uniquement pour avoir défendu les droits humains.
Complément d’information
Au Burundi, l’espace civique ne cesse de diminuer depuis le début de la crise politique en avril 2015, autrement dit depuis que le président Pierre Nkurunziza a décidé de se présenter pour un troisième mandat, ce qui a déclenché des manifestations de grande ampleur.
Les autorités burundaises ont réprimé l’opposition, la société civile indépendante et les médias. De nombreux défenseur·e·s des droits humains et journalistes ont fui le pays et beaucoup de celles et ceux qui sont restés sont victimes de menaces et de représailles, y compris d’arrestations, de poursuites fondées sur des charges controuvées et de disparitions forcées présumées.
L’APRODH et l’ACAT-Burundi, ainsi que plusieurs autres organisations de la société civile, ont été fermées en octobre 2016 sur ordre du ministre de l’Intérieur, Pascal Barandagiye, après avoir été suspendues en 2015. Elles étaient accusées de « ternir l’image du pays » et de « susciter la haine et des divisions au sein de la population ».
En octobre 2018, toutes les organisations non gouvernementales (ONG) internationales, à l’exception de celles qui gèrent des écoles et des hôpitaux, ont été suspendues. L’État les accuse de ne pas appliquer la nouvelle législation concernant les quotas ethniques en matière de recrutement et les règles financières, entre autres.