Nigeria. Les autorités doivent garantir la libération et le retour en toute sécurité de plus de 680 personnes enlevées cette semaine
Les enlèvements collectifs au Nigeria cette semaine de plus de 400 personnes déplacées dans l’État de Borno et de 287 étudiant·e·s et enseignant·e·s dans l’État de Kuriga Kaduna illustrent avec force l’incapacité persistante des autorités à protéger les populations contre les attaques des groupes armés qui ont fait des milliers de morts depuis les cinq dernières années, a déclaré Amnistie internationale le 8 mars 2024.
L’organisation demande au gouvernement nigérian de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la libération et le retour en toute sécurité des personnes enlevées à leurs familles. Il doit mener dans les meilleurs délais des enquêtes approfondies, impartiales, indépendantes, efficaces et transparentes sur les cas récurrents d’enlèvements dans de nombreuses régions du pays, rendre les conclusions de ces investigations publiques et veiller à ce que les responsables présumés soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables.
Le 3 mars 2024, des combattants présumés de Boko Haram ont enlevé au moins 400 personnes, en majorité des femmes et des enfants, dans les camps pour personnes déplacées à l’intérieur du pays de Babban Sansani, de Zulum et d’Arabic à Gamboru Ngala, dans l’État de Borno. Le 7 mars, au moins 287 étudiant·e·s et leurs enseignant·e·s ont été kidnappés par des hommes armés dans l’État de Kuriga Kaduna. Des centaines d’assaillants sont arrivés à moto dans l’école avant de s’emparer des étudiant·e·s et des enseignant·e·s et de les emmener dans la brousse, selon les informations reçues par Amnistie internationale.
« Les derniers enlèvements de masse montrent clairement que le président Bola Tinubu et son gouvernement n’ont pas de plan efficace pour mettre un terme à des années d’atrocités commises par des groupes armés et des hommes armés qui ont de plus en plus le champ libre dans de nombreuses régions du Nigeria. Il est clair que les mesures de sécurité mises en œuvre par le président Bola Tinubu et son gouvernement ne fonctionnent pas, a déclaré Isa Sanusi, directeur d’Amnistie internationale Nigeria.
« Étant donné le niveau croissant d’insécurité au Nigeria actuellement, il est évident que la protection des vies et des biens figure en bas de la liste des priorités du gouvernement. Pourtant, il ne doit pas laisser les gens vivre dans la peur de la prochaine attaque ou du prochain enlèvement. Les autorités nigérianes se montrent incapables de protéger la population : c’est totalement inacceptable et il est temps que cela cesse. »
Amnistie internationale demande que les responsabilités en termes de sécurité dans les zones où ont eu lieu les enlèvements soient établies pour les manquements avérés qui mettent la vie de centaines de personnes en danger.
Au cours des 10 années qui ont suivi le kidnapping par Boko Haram de 276 lycéennes à Chibok, plusieurs enlèvements collectifs ont eu lieu, sur lesquels les autorités nigérianes n’ont pas dûment enquêté. Ainsi, les responsables présumés n’ont pas été déférés à la justice.
En outre, il n’existe pas de plans de sécurité pour les écoles situées dans des zones vulnérables, malgré l’enlèvement de centaines d’élèves – ce qui a entraîné une baisse de la scolarisation, un revers majeur pour l’éducation des filles. Les autorités nigérianes doivent garantir un environnement d’apprentissage sûr pour les enfants et pallier les risques de nouveaux enlèvements dans le pays.
Le gouvernement nigérian est tenu de respecter la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, texte auquel il est partie. Les enfants ont le droit de bénéficier d’une protection et d’une éducation. Les autorités doivent prendre des mesures immédiates et concrètes pour empêcher les enlèvements qui deviennent progressivement la norme au Nigeria.
Complément d’information
En avril 2014, 276 lycéennes ont été enlevées dans un lycée public à Chibok, une localité de l’État de Borno. Certaines sont parvenues à s’échapper et d’autres ont finalement été relâchées au prix d’une campagne intense menée par des organisations de la société civile et de négociations engagées par les autorités. Parmi les lycéennes initialement enlevées, 98 sont cependant toujours en captivité. En 2018, 110 lycéennes de l’établissement scientifique et technique public de filles de la ville de Dapchi, dans l’État de Yobe, ont été enlevées par des combattants de Boko Haram.