Inde. Les autorités doivent immédiatement abroger les nouvelles dispositions pénales répressives
Alors que trois nouvelles lois pénales, intitulées Bharatiya Nyaya Sanhita (BNS), Bharatiya Nagarik Suraksha Sanhita (BNSS) et Bharatiya Sakshya Adhiniyam (BSA), entrent en vigueur lundi 1er juillet pour remplacer trois textes datant de l’époque britannique en Inde, Aakar Patel, président du conseil exécutif d’Amnistie internationale Inde, a déclaré :
« Les dispositions des modifications et des révisions de lois pénales en Inde auraient des conséquences délétères sur la pleine réalisation du droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique et du droit à un procès équitable.
« Les affirmations du gouvernement indien selon lesquelles c’en est fini des lois relatives à la sédition sont fausses ; celles-ci ont au contraire été rétablies après avoir été suspendues en 2022 par la Cour suprême indienne. La loi BNS ajoute un nouvel article rendant passibles de poursuites les “actes mettant en péril la souveraineté, l’unité et l’intégrité de l’Inde”, formulé dans des termes identiques à ceux de l’ancienne loi sur la sédition. De plus, la peine minimale encourue est alourdie à sept ans d’emprisonnement selon cette nouvelle loi.
« Le nouveau Code de procédure pénale, ou BNSS, permet à la police de demander le placement en détention d’une personne pendant 15 jours à tout moment avant la fin du délai de 40 à 60 jours autorisé pour le placement en détention provisoire, au lieu de seulement les deux premières semaines après l’arrestation. Ce manque de clarté offre un terrain propice à la torture et aux autres mauvais traitements.
« Comme la Loi relative à l’administration de la preuve, la loi BSA admet la recevabilité des enregistrements électroniques comme éléments de preuve. En l’absence de dispositions solides protégeant les données, et au vu de l’utilisation abusive des éléments de preuve électroniques constatée dans l’affaire de Bhima Koregaon et celle de Newsclick, cette nouvelle loi se prête à des abus.
« Dans leur forme actuelle, ces lois serviront de prétexte pour bafouer les droits de toutes les personnes qui osent tenir tête aux autorités. Les trois nouvelles lois pénales de l’Inde doivent être immédiatement abrogées et révisées pour les rendre conformes aux normes internationales relatives aux droits humains, afin d’empêcher qu’elles ne soient encore instrumentalisées de façon flagrante pour réprimer la dissidence pacifique dans le pays. »
Complément d’information
Le 11 août 2023, le ministère indien de l’Intérieur a présenté les projets de lois BNS, BNSS et BSA au Parlement en vue de remplacer respectivement le Code pénal indien de 1860, le Code de procédure pénale de 1973 et la Loi de 1872 relative à l’administration de la preuve.
En 2020, ce ministère avait constitué une commission nationale chargée de procéder à une révision de la législation pénale en Inde, dont les recommandations ont servi de base à l’élaboration de ces projets de lois. Bien que le gouvernement indien ait affirmé qu’un processus de consultation approfondie avait été entrepris, la commission a été critiquée notamment pour son manque de représentation de la société civile, des femmes et des minorités de genre, et son rapport final n’a jamais été rendu public.