La réponse des autorités face aux militants qui ont grimpé sur le pont Jacques-Cartier est préoccupante
La réaction des autorités du Québec aux actes non-violents commis par trois militant·e·s pour la justice climatique, le 22 octobre à Montréal, soulève des inquiétudes quant au respect de leurs droits à la liberté d'expression et de rassemblement pacifique.
Selon les groupes Last Generation Canada et le collectif Antigone, la manifestation des militants climatiques visait à dénoncer l'inaction du gouvernement canadien face aux changements climatiques et à exiger la fin de l'extraction des combustibles fossiles.
Les deux militants qui ont grimpé sur le pont ont été inculpés de méfait et d'obstruction à la justice et ont été placés en détention provisoire. L'un a été libéré quelques jours plus tard sous caution et le second est toujours détenu. La Couronne s’est opposée à leur libération pour « des raisons de sécurité et pour maintenir la confiance du public dans le système judiciaire ». L'agente de liaison qui était restée au sol a été accusée de méfait et a également été libérée sous caution.
La désobéissance civile implique l'utilisation d'une variété de tactiques visant à induire un changement, incluant souvent une transgression délibérée de la loi. « Même si ces actes enfreignent les lois d'un pays, » explique France-Isabelle Langlois, directrice générale d'Amnistie internationale Canada francophone, « ils sont protégés par les droits à la liberté d'expression, de conscience et de rassemblement pacifique. » Les États doivent tenir compte du motif de conscience qui motive ces actes, ainsi que du fait que les militant·e·s exercent pacifiquement leurs droits humains.
« Toute restriction ou sanction en réponse à des actions protégées par ces droits doit être établie par la loi et être nécessaire et proportionnelle à l’atteinte d’un objectif légitime, tel que la protection des droits d'autrui. Ces militants ne devraient pas faire l'objet de charges trop lourdes et les raisons qui ont motivé leurs actes devraient être prises en compte par les autorités. », ajoute Mme Langlois.
Amnistie internationale s'inquiète des conditions de détention des militants. D'après les informations dont elle dispose, les deux militants n'ont pas reçu de vêtements de rechange, n'ont eu qu'un accès limité à l'eau potable et n'ont pas pu quitter leur cellule pendant plusieurs jours pendant leur détention.
Amnistie internationale est aussi préoccupée par le recours à la détention provisoire dans ce cas, car elle ne semble pas être motivée par un risque de fuite ou d'interférence avec l'enquête qui n'aurait pas pu être résolu par une mesure moins intrusive.
Les conditions imposées à l'agente de liaison et au militant qui ont été libérés sous caution semblent aussi exagérées. Il leur est interdit de s'adresser aux médias et de publier des messages sur les réseaux sociaux, conditions qui sont en contradiction directe avec l'article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont le Canada est partie.
Amnistie internationale est solidaire de toutes les personnes qui attirent pacifiquement l'attention sur l’urgence climatique. Si les autorités veulent vraiment s'attaquer à la crise climatique, elles doivent reconnaître, protéger et faciliter le rôle important joué par les militant·e·s des droits humains et environnementaux, qui exigent des mesures urgentes et vigoureuses pour que nous puissions tous vivre dans un environnement sain.