Pérou. Cent jours après le début des manifestations, la répression raciste se poursuit et les enquêtes peinent à avancer
Cent jours après le début des manifestations sociales au Pérou, Erika Guevara-Rosas, directrice pour les Amériques à Amnistie internationale, a déclaré :
« Bien que toute la communauté internationale ait appelé à maintes reprises les autorités péruviennes à mettre un terme aux attaques généralisées empreintes de racisme contre les personnes manifestant dans le pays, et visant particulièrement les membres de communautés autochtones et paysannes, nous constatons que la répression reste la seule stratégie face aux revendications populaires. Les autorités sont responsables des événements qui se produisent sous leur commandement et ont l’obligation de veiller à ce que les personnes qui manifestent ne risquent pas de mourir ou d’être gravement blessées pour avoir simplement exprimé leur mécontentement. »
Marina Navarro, directrice d’Amnistie internationale Pérou, a par ailleurs déclaré :
« Cent jours se sont écoulés depuis le début de cette période très douloureuse pour le pays. Des dizaines de familles sont en deuil ou cherchent des moyens d’aider leurs proches qui ont été gravement blessés. Ensemble, elles ont trouvé le courage et la force d’exiger une conduite professionnelle de la part de plusieurs institutions qui ne semblent avoir ni les outils ni la volonté nécessaires pour assurer la vérité, la justice et les réparations. Aujourd’hui plus que jamais, il est nécessaire que le ministère public fasse en sorte que des enquêtes impartiales et approfondies avancent véritablement, en veillant à ce que les ressources et le personnel nécessaires soient déployés pour que l’impunité ne soit pas tolérée. »
Complément d’information
Depuis le 7 décembre 2022, le Pérou traverse une nouvelle intensification de la crise politique qui touche le pays depuis plusieurs années en raison du conflit de pouvoir entre la présidence, le Congrès et le Tribunal constitutionnel, qui avait abouti à l’arrestation de l’ancien président Pedro Castillo et à l’investiture de la vice-présidente Dina Boluarte comme nouvelle présidente.
À la suite de ces événements, des manifestations ont eu lieu dans différentes régions du pays et ont été violemment réprimées par la police et l’armée. À ce jour, 48 personnes auraient été tuées par les forces de sécurité et des milliers de personnes ont été blessées, dont plusieurs grièvement, principalement dans les régions méridionales d’Ayacucho, d’Apurímac et de Puno.
Le 16 février, après avoir déployé une équipe régionale de réponse aux crises dans le pays, Amnistie internationale a dénoncé la violence meurtrière et raciste employée contre les manifestant·e·s, la grande majorité des personnes tuées et gravement blessées étant des membres de communautés autochtones et paysannes.
L’organisation a appelé les autorités à changer de tactique pour la gestion des manifestations, à mettre fin à l’utilisation d’armes meurtrières et à éviter l’utilisation illégale d’armes à létalité réduite pour disperser des manifestations, à faire en sorte que des enquêtes approfondies avancent rapidement, à éviter la stigmatisation des manifestant·e·s et à apporter une assistance économique et psychologique aux personnes touchées par la violence de l’État et leurs familles. Elle a en outre demandé que la communauté internationale joue un rôle plus actif, en appelant le Pérou à mettre fin à la répression et à assurer l’obligation de rendre des comptes pour les atteintes aux droits humains commises.