ONU. Amnistie salue les nouvelles propositions visant à lutter contre le commerce de la torture
L’ONU a fait un grand pas en avant dans la lutte contre le commerce honteux des outils de torture, a déclaré Amnistie internationale le 30 mai 2022, à la suite de la publication d'un rapport d'experts qui pourrait ouvrir la voie à un traité juridiquement contraignant.
Il n'existe actuellement aucun contrôle lié aux droits humains au niveau mondial sur le commerce d’équipements utilisés pour torturer, maltraiter ou exécuter des personnes. En 2021, l'Assemblée générale des Nations Unies a chargé un groupe d'experts gouvernementaux (GGE) d'explorer de nouvelles options afin de réglementer ce commerce ; ils publient leurs propositions dans un rapport dévoilé le 30 mai.
Amnistie internationale, ainsi que ses partenaires de l'Omega Research Foundation et de la Clinique internationale de défense des droits humains de la faculté de droit de Harvard (IHRC), saluent tout particulièrement la proposition faite à l'Assemblée générale des Nations Unies d'entamer des négociations sur un instrument juridiquement contraignant.
« La torture et les autres mauvais traitements ont été interdits par le droit international il y a des décennies, mais il n'existe toujours pas de réglementation mondiale du commerce des équipements utilisés pour infliger ces violences. Ce rapport est un jalon important dans le travail de l'ONU pour combler cette lacune fondamentale, a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d'Amnistie internationale.
« Il marque une avancée majeure dans la maîtrise de ce commerce ignoble, qui sape l'interdiction mondiale de la torture et des mauvais traitements et permet aux entreprises de tirer profit de douleurs et de souffrances inimaginables. »
Proposition visant à interdire les équipements intrinsèquement abusifs
Amnistie internationale, l'Omega Research Foundation et l'IHRC demandent l’interdiction pure et simple des biens dont le seul but pratique est la torture ou les mauvais traitements, tels que les matraques à pointes, les entraves lestées pour les jambes et les ceintures à impulsions électriques. Elles se félicitent de ce que le rapport recommande que toute future norme internationale comporte une interdiction de la production et du commerce des équipements destinés au maintien de l'ordre intrinsèquement abusifs. Le groupe d'experts gouvernementaux assure qu'une telle interdiction constituerait « une mesure proactive afin de prévenir les violations des droits humains ».
Autre avancée positive, la recommandation visant à mettre en place des contrôles sur le commerce des équipements destinés au maintien de l'ordre « lorsqu'il existe des motifs raisonnables de croire » qu'ils seront utilisés pour infliger des actes de torture ou d'autres mauvais traitements. Cela pourrait se traduire par l’instauration de contrôles sur des produits standard tels que les gaz lacrymogènes, les menottes, les balles en caoutchouc et les matraques, qui peuvent avoir un but légitime mais sont régulièrement utilisés à mauvais escient. Amnistie internationale, l'Omega Research Foundation et l'IHRC appellent à des contrôles stricts fondés sur les droits humains sur le commerce de ces types d’équipements.
La faisabilité des contrôles sur le commerce des équipements liés à la peine de mort donne lieu à diverses opinions.
Michael Crowley, de l’Omega Research Foundation, a déclaré :
« Les précédentes investigations d’Amnistie internationale et d’Omega ont révélé la nature internationale de ce commerce. Un traité international juridiquement contraignant visant à mettre fin au commerce de biens utilisés pour infliger des tortures est le seul moyen de garantir que les entreprises faisant la promotion de matraques à pointes, de ceintures à impulsions électriques et autres équipements intrinsèquement abusifs ne seront plus en mesure de commercialiser leurs produits sur un marché mondial.
« Un tel traité garantirait également que les entreprises commercialisant des équipements destinés au maintien de l’ordre, où qu'elles opèrent, soient soumises à des réglementations communes les empêchant de fournir des forces de police et de sécurité aux comportements violents à travers le monde. »
Anna Crowe, de la Clinique internationale de défense des droits humains de la faculté de droit de Harvard (IHRC), a déclaré :
« Le rapport du groupe d'experts gouvernementaux montre pourquoi il est si urgent et essentiel de réglementer le commerce de la torture au niveau international. Les États peuvent désormais se mettre à élaborer un traité visant à établir des normes mondiales en vue d’éradiquer ce commerce. »
Amnistie internationale et l'Omega Research Foundation ont travaillé en étroite collaboration avec l'UE et le Conseil de l'Europe pour élaborer des réglementations régionales sur le commerce des outils de torture et ont soumis des recommandations aux délibérations en cours de l’ONU. Avec l’IHRC, elles appellent les États à se montrer audacieux et ambitieux afin de négocier un traité juridiquement contraignant permettant de lutter contre le commerce de la torture à l'échelle mondiale.