Mali. Les libertés d’opinion, d'expression et de presse : des droits fondamentaux en danger au Mali
Avocats sans frontières Canada (ASFC), Amnistie internationale (AI), Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), Women in Law and Development in Africa (WILDAF), Tribune Jeunes pour le Droit au Mali (TRIJEUD-Mali), Association des juristes maliennes (AJM), Association Noyau-Dur pour la promotion de la Justice transitionnelle au Mali (AND-Mali), Association pour le Développement des Droits de la Femme (APDF), Groupe de Recherches et d’Applications Techniques (GRAT-Sikasso), Collectif Cri de Coeur (CCC) et le Réseau des jeunes pour une justice transitionnelle inclusive au Mali (R2JTIM) sont fortement préoccupées par la recrudescence récente des atteintes aux libertés d’opinion,d’expression et de presse au Mali. Nos organisations appellent les autorités maliennes à agir pour protéger ces droits fondamentaux, prescrits aux articles 4 et 7 de la Constitution de la République du Mali de 1992.
Le 3 novembre 2022, la chaîne de télévision privée Joliba TV News a été suspendue pour deux mois en raison de propos qui mettaient en cause les actions de la Haute autorité de la communication malienne (HAC) et du gouvernement de transition. Malick Konaté, un journaliste et blogueur malien, a aussi subi à la même période des menaces sur les réseaux sociaux pour avoir contribué à un reportage de BFMTV sur la société militaire privée russe Wagner « Wagner, les mercenaires de Poutine1». Les faits mentionnés participent au rétrécissement de l’espace civique malien constaté des mois auparavant par plusieurs organisations internationales de droits humains.
Dans une note2 déposée lors de la 71ème session ordinaire (virtuelle) de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples tenue du 21 avril au 13 mai 2022, ASFC, la FIDH et AI sonnaient l’alarme face au rétrécissement progressif des espaces de libre expression au Mali, à la suite de la suspension de Radio France Internationale en ondes courtes et FM, de la chaîne de télévision France 24 et de l’expulsion d’un journaliste de Jeune Afrique pour non-respect des procédures.
En outre, dans un communiqué de presse des Nations unies publié en août 2022, après la visite à Bamako de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’Homme au Mali, Alioune Tine, ce dernier s’est dit
« consterné par le rétrécissement continu de l'espace civique, y compris la censure des médias et l'autocensure des journalistes, des professionnels des médias et des acteurs de la société civile par crainte de représailles » et a «recommandé aux autorités maliennes, à la communauté africaine et à la communauté internationale de maintenir un dialogue constructif pour garantir la stabilité et la sécurité du Mali, renforcer les efforts de protection de la population civile et éviter l'isolement du pays. »
Nos organisations s’inquiètent des potentielles dérives que pourraient engendrer cette série de sanctions, qui remet en cause le principe d’indépendance journalistique, pourtant vital à un État de droit respectueux des droits humains.
Nos organisations rappellent au gouvernement de transition son rôle de garant de la Constitution malienne et des traités et accords internationaux protégeant les libertés et droits fondamentaux.
Nos organisations exhortent la HAC et le gouvernement de transition de respecter les droits des individus à la liberté d’expression et de protéger les journalistes pour qu’ils puissent librement exercer leur travail.