« J’aurais voulu que la COP26 soit celle des droits humains »
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Samuel est professionnel sur les dossiers autochtones en milieu universitaire. En 2021, Amnistie internationale lui a décerné le prix du Fonds Benenson-Humphrey pour sa contribution à la défense des droits des Autochtones. Un montant de 2 500 dollars lui a été remis afin de contribuer à financer sa participation à la Conférence des Parties (COP 26) de l’Organisation des Nations unies sur les changements climatiques qui se tenait à Glasgow, en Écosse, en novembre 2021. Il nous livre ses impressions concernant le rôle de la COP26 sur l’urgence climatique et son impact sur les droits humains, notamment pour les peuples autochtones.
Q: Quelles étaient tes attentes de la COP26 ?
Samuel Rainville : C’était ma première participation à une COP et j’avais la perception d’un lieu difficile d’accès, avec des négociations politiques nichées et restreintes et en effet, c’est très cloisonné. Il est difficile de participer aux négociations et quand on parle de changements climatiques, malheureusement les attentes ne sont jamais hautes vis-à-vis de nos élu·e·s. Toutefois, j’avais l’espoir d’une grande présence autochtone à la COP et j’ai été comblé car j’ai rencontré des Autochtones venant de partout à travers le monde.
Ce qui m’a le plus marqué c’est le dynamisme dans les corridors, les manifestations et les activités hors des lieux de négociations. C’est là qu’avaient lieu les conversations sur l’urgence climatique, les droits des humains et les peuples autochtones, malheureusement plus que dans les lieux de décisions.
Q: Qui as-tu rencontré à la COP26 ?
Samuel Rainville : J’ai rencontré de nombreux acteurs et actrices de la société civile canadienne et j’ai été surpris de la bonne organisation et de la complicité entre les différentes organisations qui en font partie : syndicats, organisations environnementales ou encore universités. Ça me donne beaucoup d’espoir pour le travail qui est fait au Canada. Beaucoup d’élu·e·s de tous les partis au Québec et au Canada étaient présent·e·s et très ouvert·e·s à dialoguer avec les jeunes.
J’ai assisté à des événements rassemblant plusieurs peuples autochtones, notamment en hommage aux femmes autochtones assassinées et disparues et à des discours de leaders autochtones. J’ai aussi discuté avec de nombreux militant·e·s dont plusieurs associé·e·s à Amnistie international
Q: Quelles sont tes impressions sur les résultats de la COP26 ?
Samuel Rainville : Les résultats ne sont pas suffisants. J’aurais voulu que la COP26 soit celle des droits humains, notamment dans les mécanismes d’évaluation des impacts des changements climatiques. J’aurais aussi souhaité une présence plus forte des perspectives autochtones dans l’approche des solutions aux changements climatiques. Le pacte de Glasgow est davantage axé sur un développement économique durable alors que l’urgence climatique devrait être au cœur de la conversation.
Q: En quoi la COP26 pourrait apporter davantage aux peuples autochtones ?
Samuel Rainville: J’aimerais que toutes les conversations sur le climat commencent par la parole et la perspective des peuples autochtones car ce sont les peuples qui subissent le plus les conséquences des changements climatiques. Cela ancrerait aussi la conversation sur nos émotions et notre responsabilité de protection de la planète et nous permettrait de parler différemment de notre relation avec notre milieu de vie et nos territoires.
Q: Quelle est ton appréciation de la position du Canada ?
Samuel Rainville: À l’international, le Canada a la réputation d’être un grand défenseur des droits humains en matière de changements climatiques. Pourtant, la rareté des échanges à ce sujet montre que le Canada n’a pas réussi à orienter la conversation vers l’impact des changements climatiques sur les droits humains et sur la juste part du Canada. On va dans la bonne direction mais il reste un bon bout de chemin à faire.
Q: Que souhaites-tu à l’occasion de la COP27 ?
Samuel Rainville: Pour la COP27, j’espère que les droits des Peuples autochtones seront placés au cœur des conversations.Je fais partie de ceux et celles qui croient que d’offrir systématiquement la parole aux leaders autochtones du monde transforme le ton et les valeurs du dialogue sur les changements climatiques. Il faut continuer de réaffirmer que la défense des droits humains est intimement liée à l’établissement d’une relation respectueuse avec notre planète et la biodiversité. De plus, je souhaiterais voir à la COP27 encore plus de jeunes des Premiers Peuples accompagnés d’aînés autochtones, car leur regard culturel est une expertise précieuse pour la communauté internationale, notamment sur la question de l’adaptabilité. J’espère surtout que le travail de protection du territoire puisse se poursuivre à l’année longue, ici chez nous, en réelle collaboration avec les Nations autochtones.