• 22 Sep 2020
  • Irlande
  • Communiqué de presse

Amnistie internationale demande une loi qui protège les travailleuses et travailleurs du sexe au lieu de leur porter préjudice

Amnistie internationale Irlande a présenté vendredi 18 septembre 2020 une communication dans le cadre de l'évaluation au bout de trois ans de la Loi pénale de 2017 relative aux infractions à caractère sexuel, qui a érigé en infraction l'achat de services sexuels.

Elle souligne dans cette communication que cette loi, officiellement destinée à protéger les travailleuses et travailleurs du sexe, pourrait en réalité les mettre en danger. Partout dans le monde, il est de plus en plus prouvé que la criminalisation de l'achat de services sexuels expose les travailleuses et travailleurs du sexe à un plus grand risque d'atteintes aux droits humains, notamment aux mains de leurs clients. Dans sa communication, Amnistie internationale demande que soit évaluées les répercussions de cette loi sur les droits humains des personnes se livrant au commerce du sexe en Irlande, y compris les hommes et les personnes transgenres, ainsi que ses conséquences spécifiques sur les travailleuses et travailleurs du sexe migrants.

« Une loi destinée à protéger les travailleuses et travailleurs du sexe doit leur apporter une réelle protection. La criminalisation de l'achat de services sexuels visait peut-être à éviter que l'action policière ne soit concentrée sur les personnes qui vendent ces services, mais en réalité elle peut les contraindre à prendre encore plus de risques », a déclaré Colm O'Gorman, directeur d'Amnistie internationale Irlande.

« Une étude récente portant sur les deux années précédant et les deux années suivant l'adoption de la loi montre une augmentation de 92 % des crimes violents signalés par des travailleuses et travailleurs du sexe. L'an dernier, le ministère de la Justice d'Irlande du Nord a confirmé que sa propre loi similaire n'avait pas donné lieu à une baisse de la demande mais avait en revanche accru les préjugés et les violences à l'égard des personnes se livrant au commerce du sexe.

« L'évaluation de la loi ne doit pas s'intéresser uniquement à l'infraction d'achat de services sexuels. La loi de 2017 a aussi alourdi la peine pour « tenue de maison close » au lieu d'abolir cette infraction, alors que celle-ci avait été utilisée contre des travailleuses et travailleurs du sexe qui se regroupaient simplement sur un même lieu de travail pour des questions de sécurité. Comme prévu, des personnes exerçant des métiers du sexe ont continué d'être prises pour cible en vertu de cette disposition législative. D'autre part, les travailleuses et travailleurs du sexe eux-mêmes doivent bien entendu avoir la possibilité de s'exprimer à propos de la manière dont ils vivent cette législation, et leurs points de vue doivent être pris en compte dans les conclusions de l'évaluation.

« Il existe par ailleurs un amalgame préjudiciable entre le travail du sexe consenti et la traite et l'exploitation, que des lois préexistantes érigent en infractions. Nous restons préoccupés par le manque de condamnations et d'autres mesures efficaces pour combattre cette atteinte abominable aux droits humains. L'évaluation de la loi doit s'interroger sur le pourquoi de cette situation, et se demander si la loi de 2017 contribue à prévenir la violence et l'exploitation. »

 

Notes aux rédacteurs et rédactrices 

Amnistie internationale n'utilise les termes « travail du sexe » et « travailleuses et travailleurs du sexe » que dans le contexte d'échanges entre adultes consentants.

La loi de 2017 a érigé en infraction l'achat de services sexuels entre adultes consentants en modifiant l'article 7 de la Loi pénale de 1993 relative aux infractions à caractère sexuel.

L'article 27 de la Loi pénale de 2017 relative aux infractions à caractère sexuel prévoit une évaluation de la mise en œuvre de sa partie 4 (portant sur l'interdiction de l'achat de services sexuels) dans les trois ans suivant son entrée en vigueur, avec notamment des informations sur le nombre d'arrestations et de condamnations pour les nouvelles infractions, et « une évaluation des conséquences de l'application de cette disposition sur la sécurité et le bien-être des personnes exerçant une activité sexuelle contre rémunération ».

La Loi pénale de 2008 relative à la traite des êtres humains et la Loi pénale de 2013 portant modification de la Loi relative à la traite des êtres humains érigent en infraction la traite des adultes et des enfants, notamment à des fins d'exploitation sexuelle ou d'exploitation par le travail.

En vertu de l'article 9 de la Loi pénale de 1993 relative aux infractions à caractère sexuel, il est interdit de « contraindre ou forcer une personne à se prostituer ».

“Crime has almost doubled in the two years since new law came in”, Ugly Mugs, 26 mars 2019

“Report published on impact of sex purchase offence”, communiqué de presse du ministère de la Justice d'Irlande du Nord, 18 septembre 2019. Le ministère avait chargé la Queen's University de Belfast de mener une évaluation de l'impact de la loi. Le rapport de cette université et celui du ministère.

 

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