• 14 oct 2020
  • Afrique
  • Communiqué de presse

Un arrêt positif relatif à la peine de mort est terni par la poursuite des exécutions

Au cours de l’année qui s’est écoulée depuis que la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a donné un nouvel élan à la campagne mondiale en faveur de l’abolition de la peine de mort en qualifiant l’imposition obligatoire de ce châtiment d’« inique » et d’échec au niveau de la procédure judiciaire, au moins quatre pays – le Botswana, l’Égypte, la Somalie et le Soudan du Sud – ont procédé à des exécutions, a déclaré Amnistie internationale le 9 octobre 2020.
 
Le 28 novembre 2019, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a statué dans un arrêt historique que l’application de la peine de mort à titre de châtiment obligatoire était manifestement inique, car elle prive la personne inculpée du droit d’être entendue et de présenter des circonstances atténuantes. En examinant l’affaire intentée par le condamné à mort tanzanien Ally Rajabu contre le gouvernement de Tanzanie, la Cour a également statué que l’imposition obligatoire de la peine de mort ne respecte pas les garanties d’une procédure régulière et viole les normes d’équité des procès, en empêchant les cours de justice de fixer une sanction proportionnelle au crime commis. 
 
« La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a fait œuvre de pionnière en soulignant l’iniquité inhérente au fait de condamner à mort des personnes sans leur accorder les garanties les plus élémentaires d’un procès équitable, a déclaré Netsanet Belay, directeur de la recherche et du plaidoyer au sein d’Amnistie internationale.
 

« Toutefois, près d’un an plus tard, la Tanzanie doit encore mettre en œuvre cet arrêt. Encore plus inquiétant, le Botswana, l’Égypte, la Somalie et le Soudan du Sud ont depuis procédé à des exécutions. Alors que le mouvement abolitionniste célèbre la Journée mondiale contre la peine de mort, nous invitons tous les États membres de l’Union africaine qui maintiennent ce châtiment dans leurs législations à le supprimer et, dans l’attente de l’abolition, à instaurer immédiatement un moratoire officiel sur les exécutions et à commuer sans délai toutes les sentences capitales en peines d’emprisonnement. »
 

En outre, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a conclu que la pendaison comme méthode d’exécution s’apparente à de la torture et à un traitement cruel, inhumain et dégradant, du fait de la souffrance inhérente à cette méthode. 
 
Amnistie internationale s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution. Elle bafoue le droit à la vie, tel que proclamé dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH). Il s’agit du châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit.
 
Depuis une quarantaine d’années, des progrès considérables ont été accomplis dans la lutte contre la peine de mort en Afrique. Si aucun pays africain ne l’avait abolie pour tous les crimes il y a 40 ans, c’est le cas de 20 d’entre eux à ce jour. Sur les pays qui maintiennent encore ce châtiment dans leur législation, 17 sont abolitionnistes dans la pratique : ils n’ont procédé à aucune exécution au cours des 10 dernières années et semblent avoir pour politique ou pour pratique établie de s'abstenir de toute exécution.

« Tous les pays dont la législation prévoit encore la peine de mort doivent respecter le droit à une assistance juridique efficace, dans l’attente de l’abolition totale de la peine de mort. C’est une garantie essentielle contre la peine de mort et un moyen de protéger les droits humains des personnes encourant ce châtiment, particulièrement leur droit à un procès équitable et leur droit à la vie », a déclaré Netsanet Belay.

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a adopté en 2015 le projet de protocole sur l’abolition de la peine de mort en Afrique, mais son examen par les États membres de l’Union africaine n’a pas progressé depuis.