NON À L'EXECUTION DE SHARIFEH MOHAMMADI !

La défenseure iranienne des droits humains Sharifeh Mohammadi risque d’être exécutée, un tribunal révolutionnaire de Rasht, dans la province du Gilan, l’ayant de nouveau condamnée à mort en février 2025. Elle a été déclarée coupable de « rébellion armée contre l'État » (baghi) uniquement en raison de ses activités pacifiques en faveur des droits humains, notamment des droits des femmes et des travailleurs et travailleuses. En octobre 2024, la Cour suprême avait annulé sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort prononcées en juin 2024, et renvoyé l'affaire devant une juridiction inférieure pour réexamen. Sharifeh Mohammadi a été rejugée dans le cadre d'un procès des plus iniques en décembre 2024 ; aucune enquête n’a été menée sur ses allégations de torture et de mauvais traitements.
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Complément d'information
Le premier procès de Sharifeh Mohammadi, qui s’est résumé à une audience de 30 minutes le 9 juin 2024 devant la première chambre du tribunal révolutionnaire de Rasht, fut d’une iniquité flagrante. Son avocat n’a eu que 10 minutes pour présenter sa défense. Le jugement, rendu public le 30 juin 2024 et consulté par Amnistie Internationale, retient des activités pacifiques de défense des droits humains comme « preuves » que Sharifeh Mohammadi a commis des actes « contre les fondements de la République islamique d’Iran ». Les « preuves » citées étaient son soutien à l’abolition de la peine de mort en Iran, ses documents relatifs aux cas de femmes emprisonnées pour des motifs politiques dans la province du Gilan, le fait qu’elle détenait des informations sur la participation des travailleurs et travailleuses au soulèvement « Femme. Vie. Liberté » qui a eu lieu entre septembre et décembre 2022, et les coordonnées du Comité de coordination pour la création d’organisations de travailleurs, dont elle a été membre jusqu’en 2011. Le jugement affirmait en outre qu’il existait un lien entre le Comité de coordination pour la création d’organisations de travailleurs et le Komala, un groupe d’opposition kurde basé au Kurdistan, une affirmation maintes fois démentie par le Comité. D’après une source bien informée, lors du deuxième procès de Sharifeh Mohammadi fin 2024, le juge présidant le tribunal l’a interrogée pour savoir pourquoi elle n’avait pas fait suite à une convocation pour interrogatoire en 2023, ce à quoi elle a répondu qu’elle n’avait jamais reçu cette convocation et avait été arrêtée sans avertissement. Le 19 février 2025, dans une interview accordée aux médias, Amir Raesian, l’un de ses avocats, a noté plusieurs points sur le caractère biaisé de ce nouveau procès. Il a expliqué qu'une fois le procès terminé, le tribunal a communiqué avec les agents chargés des interrogatoires qui lui ont soumis le rapport d'enquête, sans en informer les avocats de la défense : ceux-ci n'ont donc pas eu la possibilité d'examiner ni de contester les nouveaux éléments de preuve présentés.
Le 5 décembre 2023, des agents ont arrêté arbitrairement Sharifeh Mohammadi à son domicile à Rasht et ont saisi ses appareils électroniques et d’autres affaires personnelles avant de l’emmener dans un centre de détention du ministère du Renseignement situé dans la même ville. Selon une source bien informée, elle y a été soumise à la torture et à des mauvais traitements, notamment des coups de pied répétés dans les jambes, au cours d'interrogatoires sans assistance d’un avocat, et elle a été privée de tout contact avec sa famille, alors qu'elle avait également les yeux bandés et qu'elle était interrogée en boucle. Elle a été questionnée au sujet de son militantisme en faveur des droits fondamentaux, en particulier sur son opposition à la peine de mort et son soutien à des personnes détenues pour des motifs politiques. Au bout de quelques jours, elle a été placée à l’isolement dans la prison de Lakan, où les interrogatoires concernant son militantisme ont continué. Le 28 décembre 2023, après son transfert soudain dans un centre de détention du ministère du Renseignement à Sanandaj, elle a encore été interrogée et, selon une source bien informée, des agents l’ont à nouveau soumise à des actes de torture et d’autres mauvais traitements, notamment en la frappant plusieurs fois au visage. Des agents ont tenté de lui faire « avouer » de force qu’elle avait des liens avec le Komala, un groupe d’opposition kurde interdit basé au Kurdistan irakien, ce qu’elle a nié à maintes reprises. Fin janvier 2024, Sharifeh Mohammadi a été transférée à l’isolement dans la prison de Sanandaj et elle a déposé une plainte pour les traitements subis dans le centre de détention du ministère du Renseignement de Sanandaj, mais aucune enquête n’a été menée. Quatre semaines après, des représentants du parquet ont exercé des pressions sur elle pour qu’elle retire sa plainte. À ce moment-là, les traces de coups visibles sur son visage avaient disparu et ils lui ont dit que, si elle voulait qu’une enquête ait lieu, elle serait maintenue en détention à la prison de Sanandaj au lieu d’être ramenée à celle de Lakan, plus proche de sa famille. Fin février 2024, après avoir retiré sa plainte sous la pression, elle a été reconduite à la prison de Lakan, où elle demeure détenue. Jusqu’à son transfert dans l’aile générale de cette prison fin mars 2024, elle n’a été autorisée à passer que quelques appels de courte durée à ses proches. Sirous Fattahi, son époux, est la cible de représailles de la part des autorités, notamment de mesures d’arrestation arbitraire, uniquement parce qu’il fait campagne pour sa libération.
À la suite du mouvement « Femme. Vie. Liberté », les autorités iraniennes ont renforcé leur recours à la peine capitale dans le but de répandre la peur au sein de la population et de resserrer leur emprise sur le pouvoir. Dans le cadre de cette escalade, la peine de mort est souvent utilisée contre des femmes pour des accusations à caractère politique. Au moins deux autres femmes, l’opposante kurde Verisheh Moradi et la travailleuse humanitaire kurde Pakhshan Azizi, sont aussi sous le coup d’une condamnation à mort après avoir été déclarées coupables par des tribunaux révolutionnaires de « rébellion armée contre l’État » (baghi) dans des affaires distinctes. En 2024, les autorités ont poursuivi leur frénésie d'exécutions, mettant à mort des centaines de personnes, dont un grand nombre de manière arbitraire à l’issue de procès manifestement inéquitables qui s’étaient déroulés devant des tribunaux révolutionnaires. Amnistie Internationale s’oppose catégoriquement à la peine de mort, en toutes circonstances. La peine capitale est une violation du droit à la vie tel qu’il est proclamé par la Déclaration universelle des droits de l’homme, et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit.