Il faut empêcher l'exécution imminente d'un jeune homme condamné à mort à l'âge de 16 ans
Les autorités iraniennes doivent intervenir de toute urgence pour empêcher l'exécution d'Amirhossein Pourjafar, 18 ans, qui doit avoir lieu demain, le 4 janvier 2018, et commuer sa condamnation à mort en une peine d'emprisonnement, a déclaré Amnistie internationale le mercredi 3 janvier 2018. Amirhossein Pourjafar avait 16 ans lorsque le meurtre et le viol dont il a été déclaré coupable ont eu lieu ; or, le droit international interdit catégoriquement l'application de la peine de mort aux personnes qui étaient âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés.
À la lumière de cette obligation, Amnistie internationale appelle plus largement les autorités iraniennes à mettre fin immédiatement à la pratique odieuse consistant à exécuter des personnes qui étaient âgées de moins de 18 ans au moment où a été commis le crime dont elles ont été reconnues coupables, et à instaurer un moratoire sur toutes les exécutions dans l'attente de l'abolition totale de la peine capitale.
Les autorités iraniennes avaient précédemment fixé la date de l'exécution d'Amirhossein Pourjafar au 19 octobre 2017, mais elles l'avaient suspendue la veille, après de vastes pressions internationales. Amirhossein Pourjafar avait alors 17 ans.
Hier, le 2 janvier 2018, sa famille lui a rendu une dernière visite dans la prison de Rajai Shahr, dans la ville de Karaj.
Lors d'une interview donnée à l'Agence de presse des étudiants iraniens (ISNA) depuis la prison, le 30 décembre 2017, Amirhossein Pourjafar a dit qu'il regrettait ses actes et que ses facultés intellectuelles étaient gravement altérées au moment du crime parce qu'il avait bu de l'alcool. Au cours de cet entretien, il a indiqué que pendant son procès, les autorités lui avaient dit à maintes reprises qu'il avait atteint son plein développement mental et sa pleine maturité, et qu'il serait exécuté.
Amirhossein Pourjafar a été arrêté et placé en détention en avril 2016. Il a été condamné à mort en septembre 2016, après avoir été reconnu coupable du viol et du meurtre d’une fillette de six ans, Setayesh Ghoreyshi, membre de la communauté afghane d’Iran, qui est marginalisée. La 7e chambre du tribunal pénal n° 1 de Téhéran a prononcé deux condamnations à mort contre Amirhossein Pourjafar, l’une pour meurtre au titre du principe islamique de « réparation » (qisas) et l’autre pour viol. Elle l’a en outre condamné à recevoir 74 coups de fouet pour avoir mutilé le corps de la victime. Le tribunal a estimé qu'il avait atteint la « maturité mentale » au moment des faits et qu'il comprenait la nature et les conséquences de ses actes. Pour justifier cette conclusion, le tribunal a invoqué des avis de l’institut médico-légal d’État, l’Organisation iranienne de médecine légale, qui attestaient de la « bonne santé mentale » d'Amirhossein Pourjafar, ainsi que des éléments tendant à prouver selon lui que le jeune homme avait tenté de dissimuler le crime.
Le tribunal a éhontément affirmé que son raisonnement était conforme à la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, à laquelle l’Iran est partie. Pourtant, ce texte proclame sans équivoque l’interdiction totale de l’application de la peine de mort lorsque l’accusé avait moins de 18 ans au moment des faits qui lui sont reprochés.
La Cour suprême a confirmé les deux condamnations à mort contre Amirhossein Pourjafar en janvier 2017.
Complément d’information
L’Iran est partie à la Convention relative aux droits de l’enfant et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), deux traités qui prohibent l’application de la peine de mort aux personnes âgées de moins de 18 ans au moment du crime dont elles sont accusées, sans exception. Cependant, les autorités iraniennes continuent d'imposer la peine de mort à cette catégorie de personnes et, dans le cas des personnes condamnées alors qu'elles sont encore âgées de moins de 18 ans, retardent fréquemment l'exécution jusqu'à ce qu'elles atteignent cet âge.
En vertu du droit iranien, les garçons âgés de plus de 15 années lunaires et les filles âgées de plus de neuf années lunaires sont présumés coupables au même titre que les adultes dans les cas d’homicide ou de certains autres crimes passibles de la peine capitale, comme le viol. Toutefois, depuis l’adoption du Code pénal islamique de 2013, cette présomption peut être réfutée s’il est démontré qu’il existe un doute sur « le développement mental et la maturité » de l'intéressé au moment des faits. Les critères d’évaluation de ce « développement mental » et de cette « maturité » sont flous et arbitraires. Les juges peuvent solliciter l’avis de l’Organisation iranienne de médecine légale ou s’en remettre à leur propre évaluation, à leur entière discrétion.
Dans les cas récents sur lesquels Amnistie internationale a effectué des recherches, les juges s'attachaient souvent à déterminer si l'accusé savait distinguer le bien du mal et pouvait dire, par exemple, qu'il était mal de tuer un être humain. Parfois, les juges confondaient et associaient la question de la responsabilité atténuée des mineurs due à leur manque de maturité avec la responsabilité atténuée des personnes souffrant de graves troubles mentaux, concluant que tel mineur délinquant était « sain d’esprit » et méritait par conséquent la mort.
Cette approche est en contradiction totale avec les principes de la justice pour mineurs, selon lesquels les personnes de moins de 18 ans sont par définition moins matures et responsables que les adultes et ne devraient donc jamais se voir infliger les mêmes sanctions qu’eux.
Amnistie internationale s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, sans exception, quelles que soient la nature du crime commis, les particularités de son auteur présumé ou la méthode d’exécution utilisée par l’État, car il s’agit d’une violation du droit à la vie ainsi que du châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit.