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LES DÉTENTIONS ET LES ATTAQUES VISANT DES DÉFENSEUR·E·S DES DROITS HUMAINS DOIVENT CESSER

CONTEXTE

Après avoir caché le sort d’Eduardo Torres et le lieu où il se trouvait depuis le 9 mai, de hauts responsables vénézuéliens ont confirmé sa détention le 13 mai et révélé qu’il était incarcéré dans la tristement célèbre prison d’El Helicoide, à Caracas. D’autres défenseur·e·s des droits humains sont également détenus dans cette prison, notamment Javier Tarazona, Rocío San Miguel, Carlos Julio Rojas et Kennedy Tejeda. Ces détentions et les crimes de droit international qui y sont liés s’inscrivent dans une attaque généralisée visant l’espace civique et les personnes qui défendent les droits humains. Nous appelons le président Nicolás Maduro à libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement et à garantir le respect de leurs droit à la vie, à l’intégrité physique et à un procès équitable.

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La politique de répression du gouvernement de Nicolás Maduro, mise en place de longue date pour réduire au silence toute forme de dissidence réelle ou présumée, a atteint un sommet historique après l’élection du 28 juillet 2024, avec plus de 2 000 personnes détenues arbitrairement pour des raisons politiques, dont beaucoup ont été accusées de terrorisme et d’incitation à la haine, apparemment sans fondement, y compris parmi des catégories vulnérables de la population telles que les enfants et les personnes en situation de handicap. Selon l’organisation locale Foro Penal, au 9 mai 2025, au moins 894 personnes demeuraient détenues arbitrairement pour des raisons politiques, dont 89 femmes, cinq adolescent·e·s et 66 personnes dont on ne connaissait ni le sort, ni le lieu où elles se trouvaient. 

Dans le cadre de cette politique, le gouvernement n’a cessé de harceler, de poursuivre et de censurer les militant·e·s et les organisations de la société civile qui s’efforcent de protéger les droits des Vénézuélien·ne·s dans une situation complexe d’urgence humanitaire et de profonde crise des droits humains qui les fait fuir en nombre sans précédent, en quête de sécurité et de protection. Au mois de mai 2025, plus de 7,9 millions de personnes avaient fui le Venezuela. 

Comme l’a dénoncé Amnistie Internationale à maintes reprises, les défenseur·e·s des droits humains au Venezuela sont constamment exposés à un risque de harcèlement, d’agressions et d’arrestations. Le gouvernement de Nicolás Maduro mène actuellement plusieurs initiatives visant à contrôler et réduire au silence les organisations de défense des droits humains et de la société civile. La loi adoptée en août 2024, baptisée « Loi relative à l’audit, à la régularisation, à l’action et au financement des organisations non gouvernementales et associées », surnommée « loi anti-ONG », impose des contrôles stricts nécessitant de remettre la liste de leurs membres et de leur personnel, celle de leurs avoirs, celle de leurs donateurs et d’enregistrer tous les mouvements financiers. En cas de non-respect de ces obligations, les organisations de la société civile pourraient être fermées et faire l’objet de poursuites pénales. Cette loi est entrée en vigueur en février 2025. 

Depuis 2020, plusieurs rapports de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela ont fourni des informations détaillées sur des centaines de cas d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, de détentions arbitraires, d’actes de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants commis dans le pays depuis 2014, ainsi que d’exemples d’instrumentalisation de la justice par le gouvernement dans le cadre de sa politique répressive, en concluant que certains de ces crimes de droit international et violations des droits humains pourraient constituer des crimes contre l’humanité. Dans l’un de ceux publiés en 2024, elle a indiqué avoir « des motifs raisonnables de croire que le crime de persécution a été commis en République bolivarienne du Venezuela tout au long de la période considérée ». 

Depuis novembre 2021, le Bureau du procureur de la Cour pénale internationale mène une enquête pénale sur la situation au Venezuela, précisément pour « [c]rimes contre l’humanité de privation de liberté ou toute grave privation de liberté physique (…) ; torture (…) ; viol et/ou autres formes de violence sexuelle d’une gravité comparable (…) ; et persécution à caractère politique contre des personnes détenues (…), qui ont été commis depuis au moins avril 2017, par des membres des forces de sécurité de l’État, des autorités civiles et des personnes pro-gouvernementales (ou groupes appelés “collectifs”) ». 

LETTRE À ENVOYER


 

Monsieur le Président,

Nous avons pris note de la confirmation de la détention d’Eduardo Torres le 13 mai, qui avait été annoncée de manière informelle sur les réseaux sociaux par le procureur général. Les déclarations des autorités indiquent aussi qu’il est détenu au centre de détention du Service bolivarien de renseignement national (SEBIN) d’El Helicoide, à Caracas, mais nous demeurons vivement préoccupés par sa sécurité.

Nous restons également inquiets du sort et du respect des droits des autres défenseur·e·s des droits humains détenus en raison de leur travail et de leur militantisme à El Helicoide, notamment Javier Tarazona, détenu depuis le 2 juillet 2021, Rocío San Miguel, qui a été arrêtée le 9 février 2024 et a besoin d’une opération chirurgicale urgente et d’une rééducation, Carlos Julio Rojas, détenu depuis le 15 avril 2024, et Kennedy Tejeda, arrêté le 2 août 2024.

Près de 900 autres personnes détenues arbitrairement pour des raisons politiques, dont certaines originaires d’Espagne, des États-Unis, de Colombie, d’Ukraine et d’autres pays, sont actuellement incarcérées injustement dans des centres de détention vénézuéliens où elles subissent de multiples autres violations des droits humains. Parmi ces violations figurent, sans s’y limiter, la disparition forcée dans les jours qui ont suivi leur arrestation, des actes de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, la privation du droit d’être défendu par un·e avocat·e de confiance, l’absence de soins médicaux, des périodes de détention au secret et des accusations sans fondement.

Il est par ailleurs extrêmement préoccupant que ces détentions s’accompagnent de campagnes de dénigrement et de la criminalisation des organisations de défense des droits humains et de leurs dirigeant·e·s, comme dans le cas d’Oscar Murillo et de PROVEA. Le harcèlement, les menaces et la détention de défenseur·e·s des droits humains ainsi que les attaques contre la société civile plus largement doivent cesser immédiatement. Cela nécessite notamment d’abroger la « loi anti-ONG » et les autres dispositions abusives et arbitraires du droit.

Nous rappelons à toutes les autorités vénézuéliennes que ces probables crimes de droit international et graves violations des droits humains font l’objet d’un suivi et d’un examen minutieux de la part des mécanismes internationaux d’obligation de rendre des comptes, y compris des Nations unies et de la Cour pénale internationale.

Nous demandons la libération immédiate et sans condition d’Eduardo Torres, de Javier Tarazona, de Rocío San Miguel, de Carlos Julio Rojas et de Kennedy Tejeda, ainsi que de toutes les victimes de détention arbitraire au Venezuela, et nous vous prions instamment de veiller à ce que leurs droits à la vie, à l’intégrité physique et à un procès équitable soient respectés.

Enfin, nous appelons à l’arrêt de toutes les attaques visant l’espace civique.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.

APPELS À  

Président de la République, Nicolás Maduro
Palacio de Miraflores,
Av. Nte. 10, Caracas 1012
Caracas, Venezuela

COPIES À  

Anita Anand
Ministre des Affaires étrangères
229, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel:  Anita.Anand@parl.gc.ca   


Ambassade de la République bolivarienne du Venezuela
32, chemin Range
Ottawa, ON K1N 8J4
Canada
Tel: (613) 235-5151/ (613) 447-4576 (24h) Fax: (613) 235-3205
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