LE MISSISSIPPI VA EXÉCUTER UN HOMME DE 79 ANS

CONTEXTE
Richard Jordan, 79 ans, doit être exécuté au Mississippi le 25 juin 2025. Il a été déclaré coupable du meurtre d'une femme en 1976. Sa condamnation à mort a été annulée à trois reprises en raison d’erreurs constitutionnelles. Une requête selon laquelle le prononcé de sa quatrième condamnation à mort a été motivé par une vindicte inconstitutionnelle de la part du ministère public n'a toujours pas été examiné sur le fond. Des experts ont conclu que Richard Jordan n'avait pas bénéficié d'une évaluation compétente de son syndrome de stress post-traumatique lié aux combats lorsqu’il a de nouveau été condamné en 1998, et qu'il souffrait de ce trouble depuis qu’il avait servi dans l’armée au Viêt-Nam. Le gouverneur doit commuer sa condamnation à mort.
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Lors du procès, du nouveau procès et de la nouvelle condamnation de Richard Jordan, le même procureur a dirigé l'accusation tout au long de l'affaire - d'abord en tant que procureur adjoint de district, puis en tant que procureur spécial à la demande de la famille de la victime, après avoir été rappelé d’un cabinet privé. Richard Jordan a été jugé une première fois en 1976 ; il a été déclaré coupable de meurtre passible de la peine capitale et automatiquement condamné à cette sentence. Lorsque la loi relative à la peine de mort a été délcarée inconstitutionnelle, il a été rejugé en 1977 et condamné à la même peine. En 1982, sa peine de mort a été annulée en raison d'une instruction inappropriée donnée au jury. En 1983, il a été condamné à la peine capitale pour la troisième fois. Cette décision a été annulée, des circonstances atténuantes ayant été exclues à tort. À ce stade, le procureur a proposé à Richard Jordan un accord sur la peine selon lequel il serait condamné à la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, à condition qu'il accepte de ne pas faire appel. Le procureur a dressé la liste des raisons justifiant l’accord, notamment les remords exprimés par Richard Jordan, sa bonne conduite pendant ses 15 années de prison, ses tentatives visant à apporter « des contributions significatives à la société », sa « force positive » en prison et son service militaire pendant la guerre du Viêt-Nam. Le tribunal de première instance a accepté cet accord en 1991. Cependant, il s’est avéré invalide car, au moment où il a été conclu, la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle ne s'appliquait qu'aux personnes considérées comme des délinquants d'habitude, ce qui n'est pas le cas de Richard Jordan. Lorsque dans une autre affaire, quelques années plus tard, cette erreur a été révélée, Richard Jordan a cherché à ce qu’elle soit rectifiée dans son dossier en demandant une réduction de sa peine de détention à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle en détention à perpétuité. La Cour suprême de l'État a annulé sa sentence, mais statué que le ministère public pouvait requérir la peine de mort lors d'une nouvelle audience s’il le souhaitait.
En 1985, la Cour suprême des États-Unis a établi que les États devaient fournir aux accusés indigents dont la santé mentale serait un problème lors du procès l'accès à un expert en santé mentale suffisamment disponible pour la défense et indépendant de l'accusation pour « aider efficacement à l'évaluation, à la préparation et à la présentation de la défense ». Avant sa nouvelle condamnation de 1998, les avocats de Richard Jordan ont demandé une évaluation psychiatrique afin de déterminer s’il souffrait d’un syndrome de stress post-traumatique lié aux combats lorsqu'il a servi au Viêt-Nam. Le tribunal a alors nommé un psychiatre employé par l’État qui n'avait pas d'expérience en matière de syndrome de stress post-traumatique lié aux combats et le juge a ordonné que son rapport soit transmis simultanément à l'accusation et à la défense. Ce rapport, fondé sur un entretien de deux heures, concluait qu'aucun élément ne permettait de prouver qu’il souffrait de ce syndrome, et ajoutait qu'il souffrait en fait d'un trouble de la personnalité antisociale ; depuis, il a été démontré que cette conclusion préjudiciable était une erreur de diagnostic. La déclaration de Richard Jordan selon laquelle il avait été démobilisé avec les honneurs de l'armée a été rejetée comme un mensonge et l'hypothèse qu'il avait été démobilisé sans les honneurs a été utilisée pour étayer le diagnostic de trouble de la personnalité antisociale. La défense a choisi de ne pas appler certains témoins à la barre, de peur qu’ils ne soient décrédibilisés par l'accusation en se servant du rapport du psychiatre (comme cela s'est produit avec leur premier témoin).
Sans que rien dans le dossier ne suggère que les facteurs qu'il avait énumérés en 1991 pour justifier une condamnation à perpétuité aient changé, le procureur a fait valoir que la perpétuité pour l'accusé ne rendait pas justice, que son statut de personne « fiable » (acquis pour bonne conduite pendant qu'il purgeait sa peine de détention à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, et qui lui donnait une certaine liberté de mouvement au sein de la prison), lui donnait la « liberté absolue » de « se promener » et d'avoir des contacts extérieurs par téléphone, tandis que la famille de la victime « souffrait plus que lui », dans une sorte de « punition inversée ». Cela « sonnerait le glas de notre système de justice pénale », a-t-il déclaré, « de permettre que cette mascarade se poursuive ». Il « profite d’une bonne vie » et « tue la société aujourd’hui ». Ces arguments, ainsi que d'autres arguments incendiaires, sont contraires aux normes internationales qui exigent des magistrats du parquet qu'ils « exercent leurs fonctions en toute équité » et « respectent et protègent la dignité humaine et défendent les droits de la personne humaine ». En vertu du traité sur les droits humains signé par les États-Unis en 1977 et ratifié en 1992, « le but essentiel » du système pénitentiaire est « l’amendement et le reclassement social » des détenus. Utiliser des preuves de réinsertion et de bonne conduite en détention pour justifier l'exécution d'une personne est contraire à ce principe.
En appel, ses avocats ont fait valoir que la sentence capitale de 1998 découlait d’une vindicte inconstitutionnelle de la part du ministère public (à titre de représailles à l'encontre d'un accusé ayant exercé un droit légal - en l’occurrence, la requête déposée par Richard Jordan visant à réduire sa peine de détention à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle en peine de détention à perpétuité lorsque le caractère non valide de l’accord sur la peine a été mis en lumière). En 2014, la Cour d’appel fédérale a refusé de donner suite à la demande, en raison de l’opinion dissidente de l'un des trois juges. Ce dernier a estimé qu'il y avait une « bonne
raison » de parler de vindicte du ministère public, notant que deux autres accusés encourant la peine capitale, déclarés coupables de crimes tout aussi odieux et dont les accords sur la peine avaient été annulés pour la même raison, avaient été condamnés à la réclusion à perpétuité. La différence, a ajouté le juge fédéral, était que leur affaire n’était pas suivie par ce même procureur. Cette différence, que l'État n’explique pas, est « perturbante », écrit-il, et l'allégation de vindicte est suffisamment fondée pour justifier une audience complète. Les deux juges majoritaires notaient eux aussi que, dans un circuit analogue, la Cour d'appel avait accordé une réduction de peine à un accusé de l'Arizona condamné à la peine capitale, en invoquant un motif de vindicte largement identique à celui de Richard Jordan. Lorsque la Cour suprême des États-Unis a refusé d'intervenir dans l'affaire Richard Jordan en 2015, trois juges ont exprimé une opinion dissidente, estimant que le seuil requis pour démontrer que « ses droits constitutionnels avaient été violés » avait été atteint et que le bien-fondé de sa demande devait être examiné.
Depuis que la Cour suprême fédérale a approuvé les nouvelles lois relatives à la peine capitale en 1976, 1 629 personnes ont été exécutées aux États-Unis - toutes depuis la première condamnation à mort de Richard Jordan. Le Mississipi a procédé à 23 exécutions, la dernière le 14 décembre 2022. En 2025, les États-Unis ont exécuté 22 personnes. Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine de mort, en toutes circonstances.
LETTRE À ENVOYER
Monsieur le Gouverneur,
Je vous demande instamment de commuer la peine de mort prononcée contre Richard Jordan, âgé de 79 ans. Je ne cherche pas à minimiser la gravité du crime pour lequel il a été condamné ni à en minimiser les conséquences. L’enlèvement et le meurtre pour lesquels il doit être exécuté le 25 juin 2025 ont été commis en janvier 1976. Du fait d’erreurs juridiques, sa condamnation a a été annulée à deux reprises et sa condamnation à mort à trois reprises, avant que la sentence capitale dont il fait l’objet actuellement ne soit prononcée en 1998.
En 1991, après la troisième annulation de la condamnation à mort de Richard Jordan, le procureur a plaidé en faveur d’une peine de détention à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. Il a souligné la bonne conduite de Richard Jordan en prison, ses efforts pour aider la société et son service militaire au Viêt-Nam. Le juge a accepté cet accord sur la peine. Toutefois, des années plus tard, il est apparu que cet accord n’était pas valide aux termes de la loi en vigueur dans le Mississipi à l’époque. Après l’annulation de la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, le procureur a choisi de requérir de nouveau la peine de mort en 1998. Un juge de circuit fédéral et trois juges de la Cour suprême des États-Unis ont estimé qu'il existait des preuves que la décision du procureur de requérir à nouveau la peine de mort était une mesure de représailles parce que Richard Jordan avait tenté d’obtenir une réduction de sa réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle en une peine de réclusion à perpétuité avec possibilité de libération conditionnelle, après que l'accord s'est avéré non valide et que cette allégation de vindicte inconstitutionnelle de la part du procureur justifiait une audience complète sur le fond. Ces juges étant toutefois minoritaires, aucune audience n’a été ordonnée.
Aux termes de la législation fédérale, Richard Jordan avait droit à un expert en santé mentale indépendant de l’accusation qui l’assisterait dans sa défense. Il n'a jamais reçu cette aide lors de la nouvelle détermination de sa peine en 1998. Avant qu'il ne soit condamné à nouveau, ses avocats ont sollicité une évaluation psychiatrique afin de déterminer s'il souffrait d’un syndrome de stress post-traumatique après avoir servi pendant la guerre du Viêt-Nam, lorsqu’il avait une vingtaine d’années. Le juge a choisi un psychiatre d’État qui avait peu d’expérience avec les anciens combattants. Après une brève évaluation, ce médecin a déclaré que Richard Jordan ne présentait pas de signe de syndrome de stress post-traumatique. En 2022, un neuropsychologue spécialisé dans ce domaine a déclaré que Richard Jordan n’avait pas été dûment évalué en 1998. Cet expert et un autre médecin ont conclu que Richard Jordan souffrait et souffre toujours d’un syndrome de stress post-traumatique lié aux combats. Aucun jury n’a examiné de telles preuves.
Le droit de grâce accordé au pouvoir exécutif permet de remédier à des injustices que le pouvoir judiciaire n'a pas pu ou pas voulu réparer. Je vous prie d’empêcher l'exécution de Richard Jordan et de commuer sa peine de mort.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Gouverneur, l’expression de ma haute considération.
APPELS À
Gouverneur Tate Reeves
Sillers Building, 19th Floor, 550 High Street
Jackson, MS 39201, États-Unis
Courriel : governor@govreeves.ms.gov
COPIES À
Anita Anand
Ministre des Affaires étrangères
229, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel: Anita.Anand@parl.gc.ca
Son Excellence M. Peter HOEKSTRA
Ambassade des États-Unis d'Amérique
490, Promenade Sussex
Ottawa, ON K1N 1G8
Tel: (613) 238-5335 / 688-5335 (24h) Fax: (613) 688-3082