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Justice pour le rappeur iranien Toomaj Salehi incarceré pour avoir critiqué le gouvernement !

Le rappeur Toomaj Salehi, qui s’est opposé à l’État, est arbitrairement maintenu en détention à la prison centrale d’Ispahan (province d’Ispahan), en relation avec ses activités pacifiques, comme sa participation au mouvement de révolte « Femme, Vie, Liberté » et la publication sur ses réseaux sociaux de messages critiquant les autorités iraniennes. En juin 2024, la Cour suprême a annulé sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort, et a renvoyé l’affaire devant une juridiction inférieure. Il est par ailleurs visé par de nouvelles accusations fallacieuses dans le cadre de procédures distinctes uniquement pour avoir exercé de manière pacifique ses droits humains, notamment la liberté d’expression par le biais de sa musique. 

Le 18 novembre 2023, après l’annulation du jugement du tribunal révolutionnaire par la Cour suprême, Toomaj Salehi a été libéré sous caution. Le 26 novembre 2023, il a publié sur YouTube une vidéo dans laquelle il a décrit en détail les actes de torture auxquels il avait été soumis et les plaintes qu’il avait déposées auprès des autorités au sujet de sa détention. Les autorités l’ont de nouveau arrêté le 30 novembre 2023, et le pouvoir judiciaire a annoncé qu’il était « détenu après avoir formulé des accusations infondées et sans preuve diffusées sur Internet » et qu’il était « poursuivi pour diffusion de mensonges dans l’intention de perturber l’opinion publique ». Début janvier 2024, son avocat a déclaré publiquement que Toomaj Salehi avait été condamné à un an d’emprisonnement dans le cadre de cette affaire, qui a été jugée par un tribunal révolutionnaire ; une cour d’appel a confirmé cette déclaration de culpabilité et cette peine d’emprisonnement à la mi-février 2024. Tous les procès de Toomaj Salehi ont été d’une iniquité flagrante. 

Écrivez au responsable du pouvoir judiciaire iranien et demandez l'annulation immédiate de l'exécution de Toomaj Salehi !

Complément d'information

Dans une interview accordée aux médias le 30 octobre 2022, après l’arrestation de Toomaj Salehi dans la province du Tchaharmahal-et-Bakhtiari, le procureur d’Ispahan, Mohammad Mousavian, a bafoué son droit à la présomption d’innocence en l’accusant publiquement d’avoir joué un « rôle crucial en provoquant, en incitant et en encourageant des émeutes ». En violation de son droit de ne pas témoigner contre soi-même et de son droit à la présomption d’innocence, des médias d’État ont diffusé plusieurs vidéos de propagande accusant Toomaj Salehi d’avoir « incité des personnes à la sédition et aux émeutes de rue » et montrant son arrestation et ses « aveux » forcés obtenus alors qu’il était détenu sans accès à un avocat et soumis à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements. Une source bien informée a indiqué à Amnistie Internationale que des agents avaient soumis Toomaj Salehi à diverses méthodes de torture et de mauvais traitements, notamment en lui versant de l’eau dessus avant de lui infliger des décharges électriques sur les pieds, en lui pointant un pistolet sur la tête en le menaçant de le tuer et de l’enterrer dans un trou qu’ils avaient creusé dans le sol, en lui piétinant la poitrine, en lui écrasant la jambe en fermant une portière de voiture dessus et en ne lui proposant aucun soin pour une blessure à l’œil qui continue à affecter sa vision. Lorsqu’il a brièvement été libéré sous caution en novembre 2023, Toomaj Salehi a déclaré publiquement que des agents lui avaient injecté une substance non identifiée dans le cou. Après son arrestation, Toomaj Salehi a été transféré dans un centre de détention dirigé par l’Organisation du renseignement des gardiens de la révolution, au sein de la prison centrale d’Ispahan, avant d’être déplacé dans la partie publique de cette dernière au bout de 252 jours. 

Le 2 juillet 2023, Toomaj Salehi a été jugé par la 1ère chambre du tribunal révolutionnaire d’Ispahan. Il n’a pu s’entretenir avec ses avocats que 30 minutes avant le procès, ce qui constitue une violation de son droit de bénéficier du temps et des ressources nécessaires à la préparation de sa défense. Le 10 juillet 2023, l’avocat de Toomaj Salehi a annoncé lors d’une interview que la 1ère chambre du tribunal révolutionnaire d’Ispahan avait rendu son jugement, en le déclarant coupable de six chefs d’accusation, et en le condamnant à une peine cumulée de 18 ans et neuf mois de réclusion. Selon son avocat, le tribunal l’a notamment condamné à six ans et trois mois d’emprisonnement au titre du commentaire de l’article 286 du Code pénal islamique, portant sur l’infraction de « corruption sur terre » (efsad fel arz). L’article 286 du Code pénal islamique dispose : « Quiconque, de manière généralisée, commet des atteintes à l’intégrité physique de personnes, des atteintes à la sécurité nationale, provoque des perturbations de la structure économique du pays, commet un incendie volontaire et des destructions, distribue des substances toxiques ou dangereuses, ou gère des lieux de corruption et de prostitution, d’une façon qui provoque de graves troubles à l’ordre public du pays ou de graves dommages pour l’intégrité physique de personnes ou de biens privés et publics, ou diffuse la corruption ou la prostitution à grande échelle est "corrompu" sur terre et doit être condamné à mort. » Le commentaire de l’article 286 précise que, si le tribunal n’établit pas, sur la base de la totalité des éléments disponibles, l’intention de provoquer des perturbations et de l’insécurité généralisées dans l’ordre public, de causer de graves dommages ou de diffuser la corruption ou la prostitution à grande échelle, et si les actions de la personne jugée ne tombent pas sous le coup d’autres sanctions juridiques, une peine d’emprisonnement sera prononcée plutôt qu’une peine de mort. Toomaj Salehi a également été condamné à un an et trois mois de prison pour « diffusion de mensonges dans l’intention de perturber l’opinion publique » pour les mêmes faits qui lui ont valu d’être condamné au titre du commentaire de l’article 286. D’après son avocat, ces chefs d’accusation découlent de ses publications sur X concernant le mouvement de révolte et critiquant les autorités. Toomaj Salehi a en outre été condamné à un an et trois mois d’emprisonnement pour « diffusion de propagande contre le régime » ; un an et trois mois assortis de 40 coups de fouet pour « troubles à l’ordre public » ; six ans et trois mois pour avoir « incité des personnes à la guerre et au meurtre dans l’intention de perturber la sécurité nationale » ; et deux ans et six mois pour avoir « incité des personnes à commettre des actes de violence ». Sa condamnation a été assortie d’une interdiction de voyager pendant deux ans, d’une interdiction de toute activité liée à la musique pendant deux ans et d’une obligation d’assister à des cours de savoir-vivre organisés par le département de la prévention de la délinquance du pouvoir judiciaire. Une précédente condamnation à six mois d’emprisonnement avec sursis prononcée en 2021 a également été prise en compte. En novembre 2023, la 39e chambre de la Cour suprême a annulé le jugement du tribunal révolutionnaire et a renvoyé l’affaire devant celui-ci pour qu’il soit rejugé. Le 21 janvier 2024, l’avocat de Toomaj Salehi a annoncé sur X que le tribunal révolutionnaire avait qualifié de « consultative » la décision rendue par la Cour suprême et avait renvoyé le dossier devant le parquet en lui ordonnant d’émettre un nouvel acte d’inculpation comportant 10 chefs d’accusation, notamment les deux dont il avait été acquitté, ainsi que deux nouveaux : « rassemblement et collusion en vue de commettre des infractions compromettant la sécurité nationale » et « complicité de rébellion armée contre l’État » (baghi). En avril 2024, la 1ère branche du tribunal révolutionnaire d’Ispahan l’a condamné à mort pour « corruption sur terre » (efsad fel arz).